La signature du mémorandum d’accord entre la Tunisie et l’Union Européenne en juillet 2023 a-t-elle vraiment permis de réduire la migration clandestine et la crise humanitaire que ce phénomène a causé? Si l’on se base sur les chiffres fournis par le Forum Tunisien des Droits et économiques et sociaux (FTDES), il semble que l’on est très loin du compte.
Il est vrai que le nombre de Tunisien(ne)s qui sont arrivés en Italie a baissé entre janvier et août 2023 par rapport à la même période en 2022, passant de 11 700 à 9 200 (-20%), mais ce chiffre cache des faits préoccupants. Intervenant su les ondes de Shems FM, le porte-parole du FTDES, Romdhane Ben Amor, est justement revenu sur le sujet.
Au total, plus de 18 000 migrants irréguliers, toute nationalité confondue, sont arrivés en Italie entre janvier et août 2023. Entre juillet et août, il y en a eu 7500. Toujours entre janvier et août 2023, les autorités tunisiennes ont réussi à intercepter 39 000 personnes. « L’approche sécuritaire a permis de réduire l’impact de la vague migratoire », a déclaré le porte-parole du FTDES.
D’autre part, selon les chiffres fournis par la même source, on constate qu’août 2023 a été rude et très chargé. En effet, rien que durant ce huitième mois de l’année, plus de 3190 migrants irréguliers ont rejoint l’Italie. En juillet 2023, il y en avait 1700.
Les causes de ce phénomène
Les causes, selon Romdhane Ben Amor, sont multiples. Il y a, tout d’abord, les conditions climatiques qui étaient propices à l’organisation des traversées de la Méditerranée. En effet, depuis août 2023, les températures étaient relativement fraîches, ce qui a permis aux migrants de voyager sans subir les effets de la canicule.
Ensuite, ces populations fuient la crise économique et la pauvreté. Elles sont également victimes des changements climatiques. Les canicules, par exemple, ont accentué le stress hydrique et elles ont lourdement affecté l’agriculture. Pour de nombreuses personnes, dont des Tunisiennes, partir est la meilleure solution qui soit.
Autre phénomène constaté par le FTDS: la montée de l’effectif des mineurs, des femmes et des familles parmi les migrants. De fait, entre janvier et août 2023, plus de 600 familles ont rejoint l’Italie. Parmi les voyageurs, il y avait 25% de mineurs et 7% de femmes.
Mémorandum d’accord entre la Tunisie et l’Union Européenne: une pression politique sur la Tunisie
« Depuis la signature du mémorandum d’accord entre la Tunisie et l’Union Européenne, le nombre de migrants a paradoxalement augmenté. L’accord est le résultat d’une grande pression politique exercée sur la Tunisie. De plus, on ne dispose d’aucune information sur le mémorandum (l’exécution, le déblocage des fonds…) », a indiqué le porte-parole du FTDS.
Ces faits prouvent que le mémorandum n’est pas la solution la plus adéquate à la crise migratoire. « Il faut lutter contre les causes qui poussent les gens à migrer, comme la crise économique », a noté le porte-parole. Dans ce même ordre d’idées, il affirme que la politique des VISAS de l’Union Européenne a aggravé la situation.
« On s’attendant à une plus grande souplesse de la part de l’Europe au niveau de l’octroi des VISAS. Or, ce n’est ce que l’on a constaté. Bien au contraire: l’Union tend vers plus de rigidité », a déclaré Romdhane Ben Amor, qui estime que la crise humanitaire risque d’empirer, notamment au niveau des frontières avec la Libye. « La situation risque de se compliquer avec la baisse des températures. L’Union Européenne, pour sa part, tente d’exporter la crise du Lampedusa vers les pays du Sud », a encore déclaré le porte-parole du FTDS.