La question se doit d’être posée après la publication des derniers chiffres de croissance par l’Institut national des statistiques (INS). Cette question est d’autant plus importante que la reprise des dynamiques de croissance constitue l’un des défis majeurs de notre pays après cette panne prolongée, à laquelle les gouvernements n’ont pas réussi à trouver de réponses adéquates. En effet, notre croissance économique est restée fragile et faible entraînant un impact négatif sur l’emploi, les grands déséquilibres macroéconomiques et le retour de la confiance.
Les derniers chiffres de l’INS nous donnent deux informations importantes de mon point de vue. La première concerne la croissance qui a été meilleure lors du troisième trimestre que lors du second, avec un taux de 0,7% nettement au-dessus de celui enregistré lors du second et qui n’a pas dépassé les 0,1%. Cette croissance sera par ailleurs de 2,1% en glissement annuel. Il s’agit certes d’une amélioration par rapport à nos résultats du second trimestre et par rapport à nos performances de l’année passée qui se situaient autour de 1%. Mais, cette amélioration reste faible et ne nous permet pas de sortir du sentier de la croissance fragile dans lequel nous sommes enfermés depuis quelques années. Ces résultats ne nous permettront pas d’atteindre les prévisions de croissance présentées dans la loi de Finances 2017 qui étaient pourtant modestes et se situaient autour de 2,5%, et encore moins de nous projeter sur un sentier de croissance forte qui nous permettrait de nous attaquer de front aux défis de l’emploi, des grands déséquilibres financiers et redonnerait confiance à nos acteurs économiques et aux investisseurs étrangers.
Le second élément à retenir des derniers chiffres publiés par l’INS concerne la composition sectorielle de cette croissance. Il faut dire que nous attendions avec impatience l’évolution de cette composition dans la mesure où parallèlement à la panne de la croissance, nous assistons depuis quelques années à un retrait des secteurs industriels qui étaient au centre du modèle de développement de notre pays et à une montée des secteurs traditionnels comme l’agriculture qui, avec le tourisme, devenaient les moteurs de la croissance dans notre pays. Ces évolutions sont en contradiction avec le niveau de diversification atteint par notre économie depuis plusieurs décennies.
Or, les derniers résultats de l’INS nous apportent une importante nouvelle qui concerne le retour en grâce des secteurs industriels après une longue accalmie. Ainsi, les industries manufacturières ont connu un important sursaut lors de ce troisième trimestre avec une croissance de 2,8% par rapport au second et de 0,6% en glissement annuel alors qu’elle avait été négative et s’est située autour de -0,6% au cours de l’année 2016. Certes, il est encore tôt pour parler d’une inflexion, mais il s’agit d’une évolution positive d’autant plus qu’elle est portée par des secteurs qui constitueront la base du nouveau modèle de développement, comme les industries mécaniques et électriques qui ont enregistré une croissance de 2,8% par rapport au second trimestre. D’autres secteurs industriels ont enregistré la même évolution positive comme celui des industries agro-alimentaires dont la croissance a été de 3,4% au troisième trimestre par rapport au second et celui des industries chimiques avec une croissance de 5,1%.
Les autres grands secteurs de notre économie ont enregistré des performances moyennes avec l’agriculture qui a connu une croissance de 2% en recul par rapport à son niveau lors du second trimestre. Le secteur des services marchands dans lequel nous trouvons le tourisme a maintenu un niveau relativement élevé lors du troisième trimestre avec la haute saison touristique et une croissance estimée à 4% lors de ce trimestre. Reste un grand absent dans ce raffermissement de la croissance : le secteur des industries non manufacturières qui comprend les activités pétrolières et minières dont la croissance négative s’est située lors du troisième trimestre autour de -3,3%. Ce recul s’explique par la forte baisse de la croissance dans le secteur pétrolier et du gaz naturel. Ainsi, la moyenne de la production journalière de pétrole dans notre pays est passée de 46 500 à 37 500 barils.
Certes, la croissance économique a poursuivi le léger frémissement qu’elle a connu en début d’année, mais qui s’est estompé lors du second trimestre. La croissance reste molle et ne permettra pas au gouvernement de maintenir ses engagements d’une croissance de 2,5% comme il l’a indiqué lors de la présentation de la loi de Finances 2017. Elle est également loin de mettre notre économie sur la voie d’une nouvelle dynamique de croissance forte et capable de raviver la confiance des acteurs économiques nationaux et internationaux et d’enregistrer des progrès dans la réalisation des engagements en matière d’inclusion sociale. Seule éclaircie à ce tableau plutôt morose le retour des secteurs industriels qui reprennent un peu de leur lustre d’antan. Espérons qu’il s’agit d’une inflexion durable et non pas d’une évolution passagère.