Même en temps de crise, les « représentants » du peuple semblent être incapables de se hisser à la hauteur des circonstances et à la hauteur des attentes des électeurs. La plénière consacrée à l’audition du Chef du gouvernement, Elyes Fakhfakh, par l’ARP (Assemblée des Représentants du Peuple), a rapidement tourné au vinaigre. Et une fois encore, ce sont les mêmes clients qui se permettent de semer la zizanie.
Il faut dire que certains députés ont formulé des propos plausibles. C’est le cas de Samia Abou, députée du Courant Démocratique, qui a dénoncé la volonté de Rached Ghannouchi, président de l’ARP, d’avoir le contrôle de l’institution. Celui-ci a, en effet, convoqué le Chef du gouvernement pour la dite séance, sachant que ce dernier avait refusé une rencontre avec le Bureau de l’ARP, considérant qu’elle était inconstitutionnelle. Autrement dit, le Cheikh de l’ARP a visiblement voulu imposer sa volonté, coûte que coûte. Une histoire d’ego en somme.
L’autre intervention « remarquable » est celle de l’incorrigible et infatigable Seifeddine Makhlouf, et sa troupe de la Coalition d’Al Karama. Malgré la gravité de la situation, malgré le contexte difficile et particulier que toute la nation est en train de vivre, ils n’ont pas manqué de s’attaquer à l’UGTT (Union Générale Tunisienne du Travail) pour dénoncer les prétendues agressions que certains représentants de la centrale syndicale auraient fait subir à Mohamed Affes. La séance a fini par être levée par le vice-président de l’ARP, Tarak Fetiti.
En temps normal, nous n’aurons peut-être pas attiré l’attention sur un tel spectacle de désolation. Sauf qu’aujourd’hui, la Tunisie, comme d’autres pays, est en pleine guerre contre le coronavirus. Dans ces situations, l’ego et les déclarations hasardeuses des députés – pas tous, ne mettons pas tout le monde dans le même sac – doivent exceptionnellement être mis de côté. Les Tunisiens et la Tunisie méritent bien mieux que cela. Les députés ont-ils conscience de cela ? Quelle a été leur valeur ajoutée hier ? Aucune. Et si l’on pensait, sans transition, aux véritables représentants de la nation qui luttent actuellement, au péril de leurs vies et malgré la misère qu’ils touchent à la fin de chaque mois – corps médical, sécuritaire, armée, protection civile – ? En ces temps de crise, avec certains députés du « calibre » de Makhlouf et sa troupe, il est indécent de leur accorder autant de privilèges matériels, alors que les vrais héros sont dans une situation désespérée. Nos « élus » ont, une fois encore, manqué une occasion de se taire.
Fakhri Khlissa