Entre 520 grammes et 1,67 kg : c’est la quantité de déchets générée quotidiennement par chaque habitant des 20 principaux pays africains producteurs, selon un rapport conjoint de la CNUCED et du PNUE. Des chiffres qui cachent une réalité bien plus complexe, où croissance économique, pression démographique et défaillances environnementales s’entrechoquent.
L’Afrique produit-elle trop de déchets… ou pas assez d’infrastructures ?
En cette fin de Ramadan, les métropoles comme Tunis, Le Caire ou Casablanca voient leurs déchets bondir de 20 à 30 %, alimentés par les repas collectifs et la surconsommation. Mais au-delà de ce pic saisonnier, l’Afrique subit une lame de fond : urbanisation galopante, démographie explosive et infrastructures saturées. Résultat ? La gestion des déchets solides municipaux devient une bombe à retardement.
Le Cameroun caracole en tête du classement avec 1,67 kg/habitant/jour, malgré un Indice de Croissance Inclusive (ICI) parmi les plus bas du continent (24,9). Un paradoxe qui s’explique par une urbanisation chaotique et un secteur informel omniprésent. Le Rwanda, lui, affiche 1,02 kg/jour, alliant politiques environnementales strictes (interdiction des plastiques) et pression démographique (+2,7 % par an). Quant à Maurice (0,99 kg), son ICI élevé (39,2) prouve qu’un développement mieux réparti peut limiter – sans l’annuler – l’impact des déchets.
Tunisie et Nigeria : deux modèles sous tension
La Tunisie se hisse à la 4e place (0,80 kg/jour), avec des conditions de vie correctes (55,9) mais un score environnemental faible (34,2) et des inégalités criantes (25,0). Le Nigeria, 5e (0,78 kg), illustre le cas d’une économie dynamique étouffée par ses propres contradictions : Lagos, mégapole de 15 millions d’habitants, croule sous les ordures, faute de tri structuré.
Pire encore, le Soudan (6e, 0,76 kg) affiche l’ICI le plus bas d’Afrique (5,3), miné par des conflits et un effondrement des services publics. À l’inverse, la Côte d’Ivoire (9e, 0,62 kg) se distingue par son score d’égalité record (67,2), malgré des infrastructures défaillantes.
Déchets et développement : le grand écart africain
L’Afrique du Sud (11e, 0,58 kg) incarne ces contradictions : des conditions de vie dignes des pays développés (66,9), mais un taux d’inégalités abyssal (17,7). Le Maroc et l’Égypte, à égalité (13e, 0,55 kg), paient eux aussi leur tribut aux déséquilibres sociaux. Le Caire, notamment, dépend largement des Zabbaleen, ces recycleurs informels qui tentent de contenir l’hémorragie.
En queue de classement, le Burkina Faso ferme la marche avec 0,52 kg/habitant/jour. Des chiffres qui, s’ils semblent modestes, reflètent une réalité implacable : en Afrique, les déchets ne sont pas qu’un problème écologique. Ils sont le symptôme d’un modèle de développement à repenser.
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