Des dettes pour payer des dettes : jusqu’à quand ?

Chedli Ayari, gouverneur de la Banque Centrale de Tunisie, a déclaré que le financement du budget 2017 s’annonce difficile, voire impossible, dans l’état actuel des choses. La croissance économique est en berne et elle peine à atteindre 1% (0,8%). Slim Chaker, ministre des Finances, a indiqué que ces difficultés sont justement dues au ralentissement de la croissance Tunisienne, mais a tenu à rassurer en soulignant que « la situation reste acceptable compte tenu de la conjoncture mondiale qui subit une forte stagnation de l’économie ». Le ministre a ajouté que les institutions mondiales, à savoir le G7, le Fonds Monétaire International et la Banque Mondiale, soutiennent pleinement la Tunisie.

Slim Chaker a, ensuite, évoqué l’accord de garantie d’emprunt signé avec les États-Unis et qui permettra à la Tunisie d’avoir accès à hauteur de 500 millions de dollars aux marchés des capitaux internationaux. Nous avons donc, d’un côté, le Gouverneur qui se montrer peu optimiste quant à la situation financière du pays. De l’autre, le ministre des Finances qui se veut rassurant.

Qui croire dans ce cas ? La déclaration du ministre nous amène inévitablement à penser que la stratégie économique Tunisienne consiste à emprunter pour rembourser des emprunts. Or, c’est un dangereux cercle vicieux qui risque de provoquer l’asphyxie de l’économie nationale, devenue incapable de créer des richesses à travers l’investissement qui demeure, soulignons-le, le seul moyen fiable de rembourser les dettes et de faire avancer l’économie.

Faute de moyens pour investir, l’État se tourne vers la rigueur budgétaire. Mais qui est en train de la subir réellement ? Le citoyen, en grande partie. C’est une chose que l’on peut constater en Grèce, où le peuple subit plein fouet les ajustements structurels du FMI et de l’Eurogroupe, qui ont dicté la politique de rigueur d’Alexis Tsipras. L’Espagne et la France n’ont pas échappé à la règle. Dans tous les cas, c’est toujours le citoyen qui paie la grande part de la facture. Les coupes budgétaires sont appliquées d’abord aux revenus des retraités et des fonctionnaires. Sans oublier les hausses vertigineuses des impôts visant à augmenter les recettes fiscales.

Avec une telle politique économique qui ne fait que tuer la classe moyenne, pourtant un élément moteur de la croissance, les décideurs se trompent lourdement de cibles. Que faire dans ce cas ? Il faut plutôt s’attaquer aux privilèges et aux revenus exorbitants des gros bonnets du pays, réduire la sur-utilisation des voitures de fonction dans les administrations publiques, instaurer une justice fiscale qui amène les plus aisés à contribuer davantage à l’effort national de lutte contre la dette, etc. En résumé, tant de mesures qui permettront d’économiser des millions de dinars par an et de remplir les caisses de l’État, assez suffisamment pour pouvoir lancer des projet d’investissement, créer de la richesse et rembourser les dettes.

L’important au final, n’est pas de savoir comment ni auprès de qui on compte emprunter, mais plutôt d’identifier les racines du mal et de s’y attaquer. Ainsi, on pourrait commencer à espérer et à penser à la relance économique tant recherchée.

 

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