La première échéance électorale municipale démocratique, au lendemain du soulèvement démocratique du 14 janvier 2011 approche à grands pas. C’est pourquoi, au-delà de l’aversion d’une majorité de Tunisiens vis-à-vis de la “chose politique” (28% d’intentions de vote seulement), il convient d’émettre des interrogations sur le rôle des collectivités locales, la responsabilité et le devoir des gestionnaires de la commune vis-à-vis de l’œuvre du développement local.
Le législateur a été très généreux en matière de prérogatives et de responsabilités octroyées à travers le code des collectivités locales pour assurer à la population locale, les conditions nécessaires à une vie économique prospère, à une vie sociale sereine et active et à des activités culturelles riches et variées.
Seulement voilà, le manque de volonté et de compétence des responsables municipaux, élus ou désignés, d’une part, et le manque d’encadrement adéquat et de moyens matériels d’autre part, font que “sur le terrain”, concrètement, nous sommes loin, très loin, bien en deçà des besoins minimums de la population.
En effet, la plupart de nos mairies n’arrivent pas à assurer le minimum vital de leur rôle, car les trottoirs sont défoncés, les chaussées crevassées, les espaces verts rares et non entretenus, l’enlèvement des ordures ménagères est défaillant…
L’état d’insalubrité des marchés municipaux où s’approvisionnent les habitants, est souvent indescriptible, tandis que l’hygiène des abattoirs est souvent déplorable.
Ne parlons pas de l’insécurité alimentaire dans laquelle se trouvent les gargottes, les cafés et autres lieux où se préparent, se conservent et se vendent pâtisseries, repas et boissons, sans contrôles rigoureux et fréquents des agents de la puissance publique et au mépris de la santé des consommateurs.
Le citoyen est en droit de demander que la mairie fasse plus pour le bonheur de la population
Souvent, les collectivités locales disposent de vastes réserves foncières, qui ne sont pas exploitées à bon escient ou alors pas du tout pour le bien-être des habitants de la cité, parce qu’elles maîtrisent “le foncier”, mais aussi parce qu’elles disposent de larges pouvoirs et parfois peuvent accéder à de gros moyens.
La commune peut et doit promouvoir le développement local : créer et aménager des zones industrielles et des zones d’activités économiques (centres commerciaux), impulser la construction de logements sociaux.
Il y a de grandes potentialités de partenariat entre l’Etat et les collectivités locales destinées à favoriser la réalisation de projets de développement local.
Par exemple, l’Etat est propriétaire d’immenses terres domaniales, il peut et doit céder à titre gracieux aux communes, les parcelles de terrains nécessaires à la construction d’un marché de gros de fruits et à l’aménagement d’une zone industrielle.
L’Etat doit octroyer des subventions financières conséquentes aux communes dont les recettes fiscales sont modestes, pour leur permettre de financer leurs projets.
Pour nous inspirer, nous avons sous les yeux des exemples édifiants relatifs aux réalisations de la ville et du gouvernorat de Tunis en matière de développement à la fin des années 60, lorsque feu Hassib Ben Ammar était gouverneur-maire de Tunis.
En effet, celui-ci avait pris plusieurs initiatives réussies pour impulser le développement de la Capitale et avait créé des sociétés comme El Iskan et l’Intercommunale des travaux. Il avait alors créé la zone industrielle la Cherguia I pour favoriser l’implantation d’entreprises industrielles, fait construire l’hôtel International Tunisia, ainsi que des logements sociaux à Ben Arous, le nouvel abattoir de Tunis et le marché de gros de Bir Kassâa.
La coopération décentralisée a de beaux jours devant elle pour ce qui est de l’aide au développement entre régions et villes européennes, notamment françaises d’une part, et d’autre part, villes et gouvernorats tunisiens, aussi bien dans le domaine économique que social et culturel.
Pourquoi la coopération décentralisée est-elle très intéressante pour les communes et les régions de notre pays ?
Parce qu’elle ne comporte pas d’endettement, ni de charges financières à supporter par la partie tunisienne, qu’elle porte sur des projets concrets et bien ciblés, qu’elle constitue souvent un transfert de technologie et de compétences et qu’elle débouche sur des relations fructueuses et durables à long terme.
Si l’Etat a la volonté réelle de promouvoir le développement local et régional conformément aux dispositions de la Constitution et aux revendication légitimes de la population, il faudrait mettre d’urgence, une véritable stratégie de coopération décentralisée tous azimuts.
Il s’agit d’une nouvelle gouvernance fondée sur l’économie des coûts, avec réalisation de projets de développement rentables, selon des méthodes efficaces, conformément aux besoins des habitants de la ville et de la région, mais aussi en fonction des attentes des marchés extérieurs.
De grandes agglomérations et villes françaises comme Paris, Strasbourg, Lyon, Marseille, Grenoble, Nice, Bordeaux, Nantes et Toulouse, disposent de gros moyens et peuvent apporter, outre des équipements à titre gracieux, une expérience, une expertise et des compétences très utiles.
Les nouvelles régions françaises prospères comme Rhône-Alpes, les Hauts de France, Provence-Côte d’Azur, Loire-Atlantique… recèlent des potentialités très intéressantes pour les régions défavorisées de notre pays dans des domaines aussi différents que le tourisme, l’horticulture, l’artisanat, les mines, l’irrigation, le numérique, l’environnement…