En matière de développement régional, on ne peut pas dire que les huit gouvernements successifs depuis le 14 Janvier 2011 aient franchi plusieurs étapes décisives sur le chemin, certes long et escarpé, de la promotion socio-économique des régions intérieures défavorisées, alors qu’il s’agit de la revendication majeure des jeunes des régions intérieures qui ont provoqué le soulèvement populaire du 14 janvier 2011._
Nous sommes loin, très loin de cet objectif ambitieux.
En effet, le gouvernement actuel se rappelle la veille de la commémoration du 17 décembre 2010 à Sidi Bouzid, qu’il y a des projets de développement en panne à Sidi Bouzid et qu’il convient de déléguer plusieurs ministres sur place pour examiner de quoi il s’agit et comment déblayer les obstacles qui entravent le processus de développement de la région, histoire de faire patienter encore plus les habitants de la région qui poirotent déjà depuis sept ans.
Il y a là une sorte de désinvolture de la part des pouvoirs publics, voire incompétence, inconscience ou encore incapacité d’assumer les responsabilités de la gestion des affaires de l’Etat et d’enclencher le processus de croissance dans les régions.
Assumer le développement d’une région, ce n’est pas construire une route par-ci, motoriser des puits par-là, ou encore construire un réseau de distribution de gaz.
Il importe de concevoir un plan de développement cohérent et intégré avec un timing précis et des objectifs concrets en matière de création d’emplois, d’implantation d’entreprises privées, d’investissements publics…
Le temps des promesses est révolu, car la crédibilité des pouvoirs publics auprès des populations locales s’est émoussée et épuisée au bout de quelques années. L’heure de vérité a sonné. En effet, la pauvreté est croissante, la progression du chômage des jeunes effective, la flambée du coût de la vie bien apparente et la dégradation des conditions de vie, sont là. C’est pourquoi les trois ministres qui ont fait le déplacement à Sidi Bouzid à la veille du 17 décembre n’ont pas reçu, le moins que l’on puisse dire, le meilleur accueil de la part de la population locale.
Il faut dire que les pouvoirs publics ont concocté des programmes sous la pression des mouvements populaires et socio-politiques. Plusieurs projets disparates sans aucune cohérence, qui n’ont pas encore été réalisés, connaissent des obstacles et des difficultés et ne sont même pas de nature à créer des emplois permanents ou à impulser une dynamique de croissance._
Il s’agit de la construction de la route expresse Tunis-Jelma dont les travaux ne commenceront que fin 2018 au mieux, et de l’exploitation du gisement de phosphate de Meknassy qui rencontre des difficultés au niveau de l’acquisition des terres nécessaires à l’exploitation et qui n’a pas encore trouvé de financement. Ainsi que le marché du gros de la ville de Sidi Bouzid qui doit être construit sur 20 ha mais dont les travaux n’ont pas encore été entamés, outre le financement à trouver. La plupart des projets n’ont pas encore été engagés car il faut trouver les financements nécessaires, assainir le statut foncier, réaliser les études techniques et économiques, lancer les appels d’offres et surtout trouver les entreprises qui accepteront de les réaliser.
Il y a également l’approvisionnement en gaz de la ville pour 45 MD, la construction d’une station de production d’électricité à Mazouna avec une puissance de 100 MW pour 250 MD, ainsi que l’électrification des puits.
Le barrage d’Ezzazia est prévu, mais est-ce que les études ont été faites ? De quel coût s’agit-il ? Y a-t-il un financement et une date pour le début et la fin des travaux ?
Il est fondamental que l’Etat assume son rôle en matière de réalisation et de modernisation des infrastructures de base : construction de routes, aménagement de zones industrielles, raccordement aux réseaux électriques, alimentation en gaz et en eau potable, organisation des transports publics, formation professionnelle…
Il doit également créer un climat des affaires favorable à l’investissement privé : simplification des formalités administratives, facilitations d’accès au crédit bancaire, incitations financières et fiscales, instauration d’un climat de confiance entre l’administration et les promoteurs privés.
L’amorce de la promotion du développement régional ne peut être une réalité sans l’engagement ferme et irréversible du secteur privé, que ce soit celui des chefs d’entreprises et des hommes d’affaires originaires de la région qui s’approprient ainsi la destinée de leur origine et prennent en charge sa croissance économique, ou bien celui des entrepreneurs originaires des grandes villes du littoral qui disposent de capitaux et découvrent des opportunités d’investissement et de création de projets économiques dans les régions. Car en fait, ce sont les investisseurs privés à travers l’implantation de projets économiques dans les régions qui vont dynamiser les activités économiques de la région, créer de la valeur ajoutée et des emplois sur place.
Pour “faire bouger les choses”, il faut une ferme volonté des politiques de concevoir la croissance économique des régions et de faire aboutir les projets, grâce à la mobilisation des responsables techniques et des cadres administratifs supérieurs dans les régions.
Un suivi et un contrôle continu de l’avancement des chantiers s’imposent.
Ce qui est valable pour Sidi Bouzid l’est pour tous les gouvernorats des régions intérieures défavorisées : Kasserine, Siliana, Kébili, Tataouine, Medenine, Kairouan, Jendouba, Gafsa…
Il faut compter 12 gouvernorats sur 24 en attendant que l’on crée les districts.
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