La mobilité est le propre de l’homme, notamment celle des jeunes, qu’ils soient compétents ou non qualifiés, dotés ou démunis de formation, au chômage ou à la recherche d’une promotion professionnelle ou sociale.
A travers l’histoire en Europe, en Afrique ou autour de la Méditerranée, il y a toujours eu des vagues d’émigration plus ou moins fortes, justifiées par des crises économiques, sociales ou politiques, qui ont favorisé la diversité culturelle et sociale des nations.
Depuis l’avènement du soulèvement démocratique du 14 janvier 2011, plusieurs indicateurs ont provoqué une accélération de l’émigration des compétences dans notre pays.
Instabilité politique, perturbations sociales, actes terroristes, marasme économique, croissance en berne, climat défavorable à l’investissement, stagnation du marché de l’emploi, inflation galopante.
Cela a incité plusieurs centaines de jeunes médecins (entre 400 et 700 dit-on faute de statistiques), mais aussi des centaines sinon des milliers d’ingénieurs, notamment des informaticiens, à partir en Europe à la recherche d’un emploi, mais aussi et surtout, de meilleures conditions de travail et de vie.
Des pays européens comme l’Allemagne et la France ont accueilli ces jeunes dans leurs structures publiques et privées conformément à leurs diplômes.
Il y a lieu de prendre en considération que, parmi les 240.000 diplômés du supérieur au chômage, il y a plus de 10.000 ingénieurs et plusieurs milliers de médecins. Cette situation dure depuis plusieurs années, elle est intolérable pour plusieurs raisons, économiques, sociales et politiques.
Il y a plusieurs facteurs qui justifient l’émigration : d’abord l’emploi, ensuite la rémunération, enfin les conditions de travail et les perspectives d’avenir.
On ne peut pas dire que la rémunération des jeunes compétences soit suffisamment motivante, vu le coût de la vie qui renchérit de plus en plus, pour leur permettre d’envisager l’avenir avec sérénité : mariage, acquisition d’un logement, achat d’une voiture…
Les conditions de travail sont souvent difficiles et peu encourageantes.
Les deux professions les plus sensibles sont celles de médecin et d’ingénieur-architecte.
D’abord, il s’agit des élèves les plus brillants au bac, ceux qui sont doués, qui viennent des lycées pilotes et qui ont obtenu les meilleures notes.
Ensuite, ce sont des étudiants qui ont fait preuve d’un cycle d’études supérieures réussies et qui ont obtenu leurs diplômes avec succès. Au bout de tant d’efforts, de sacrifices et de réussites, aboutir à une situation de chômage ou d’emploi sous-considéré, est pour le moins que l’on puisse dire, une déception amère.
Pour retenir les médecins sur place et les encourager à assumer leurs responsabilités dans les meilleures conditions, l’Etat a le devoir d’améliorer l’équipement des hôpitaux et garantir leur sécurité.
Renforcer l’encadrement des hôpitaux régionaux par des médecins spécialistes, est une tâche urgente, n’étant possible que si des incitations vigoureuses sont consenties par le ministère de la Santé sous forme de logements décents, d’indemnités consistantes et de conditions de travail dignes.
Les compétences tunisiennes émigrées peuvent et doivent favoriser le développement de la mère-patrie de plusieurs façons.
Investir dans le pays natal, faire bénéficier la Tunisie de leur savoir-faire, de la qualité de leurs relations, du fruit de leurs recherches et travaux, faire honneur au pays et faire briller l’image de la Tunisie par leur conduite et leur savoir.
Les émigrés tunisiens finissent toujours par revenir au pays.
Le terme de “fuite” est péjoratif, il invoque la notion de ne pas assumer une responsabilité et suppose que l’intéressé échappe à son devoir.
Est-ce le cas, lorsqu’on aspire à une promotion professionnelle et sociale, à de meilleures conditions de travail et de vie, ou à un autre environnement ? Probablement non.
Quand on ne trouve pas d’emploi conforme à sa formation et à ses qualifications, une rémunération correcte susceptible de permettre une vie digne, des conditions de travail conformes à ses ambitions, la mobilité constitue une solution provisoire, raisonnable, sinon durable.
Cela ne constitue pas une rupture définitive avec son pays natal, ni avec sa famille ni avec ses origines… Et encore moins, une ingratitude vis-à-vis de ce qui est dû à ses racines : coût de la formation, valeur de l’éducation…
Le Tunisien reste d’une façon ou d’une autre attaché à sa patrie, à ses racines, à sa famille et à ses amis.
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