Lors de la journée symbolique célébrée par le ministère des Affaires étrangères de la migration et des Tunisiens à l’étranger (MAE) à l’occasion du 79ème anniversaire de l’Organisation des Nations Unis (ONU) organisée hier, jeudi 24 octobre 2024, au siège de l’Académie diplomatique internationale en Tunisie, le ministre Mohamed Ali Nafti qui se trouvait en mission à Paris pour assister à la conférence de soutien au Liban se déroulant le même jour en France, a tout de même réussi à être présent parmi les invités de son département grâce à une visioconférence.
Dans de son allocution, le chef de la diplomatie tunisienne a transmis un message fort, insistant sur la nécessité d’un travail commun, caractérisé par l’esprit de partenariat et par l’action collective basée sur les principes de paix et de sécurité internationale pour assurer la prospérité pour tous.
La Tunisie est riche en valeurs onusiennes
« Célébrer l’anniversaire des Nations Unies au siège de l’Académie diplomatique internationale de Tunis témoigne de notre sincère volonté de cultiver chez les jeunes générations et chez les diplomates les objectifs de l’action multilatérale et les valeurs onusiennes qui sont les principes fondateurs des lois internationales à savoir, les principes de l’égalité souveraine des États, le non-recours à la force et le règlement pacifique des différends, le respect des lois économiques et sociaux, le respect des droits humains et du droit au développement aussi. C’est un évènement qui nous rappelle, 79 ans après la mise en vigueur de la charte, combien il nous importe ainsi qu’aux peuples des Nations Unies de réaffirmer aujourd’hui, non seulement par la parole, mais aussi par l’action, surtout dans un contexte international, notre résolution de préserver les générations présentes et futures des guerres et à proclamer, à nouveau parmi les droits fondamentaux de l’Homme, de tous les Hommes sans discrimination, la dignité et la valeur de la personne humaine dans l’égalité des droits des Hommes, des femmes ainsi que les nations qu’elles soient grandes ou petites. La Tunisie qui a rejoint les Nations Unies en 1956 a toujours été un fervent défenseur des principes fondateurs de cette organisation. J’estime qu’il est de notre devoir de rappeler l’action diplomatique tunisienne qui a sollicité les nations unies pour plaider sa cause au nom des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes en 1952, bien avant son accession à l’indépendance et a réussi à accéder au siège pour porter la question tunisienne à l’attention de l’assemblée générale quatre années avant la proclamation de l’indépendance de la Tunisie.
Et depuis, la Tunisie n’a jamais quitté l’enceinte onusienne. Et c’est pour cela que la Tunisie en tant que pays indépendant, a mené avec brio cette principale bataille diplomatique et les différentes requêtes qu’elle avait déposées auprès des Nations Unies cherchant des résolutions qui lui rendent justice aussi bien après la bataille de Sakiet Sidi Youssef en 1958 qu’après la bataille de Bizerte en 1961 ou lors des deux agressions commises par Israël sur son territoire, en l’occurrence le raid sur Hammam Chatt en 1985 et l’assassinat d’Abou Jihad en 1988. Tout récemment en 2020 en tant que membre non permanent du conseil de sécurité, et au terme de quatre mois de négociations, la Tunisie et conjointement avec la France, a réussi à faire adopter la résolution appelant à une pause humanitaire durable et au renforcement de la coopération et à la solidarité humanitaire à travers une action internationale durant la période du Covid19. L’adhésion de la Tunisie aux valeurs de paix et son engagement aux côtés des Nations Unies dans ce domaine se sont illustrés dans sa longue tradition de la paix commencée depuis 1960 seulement quatre ans après l’indépendance de la Tunisie lorsque mon pays avait répondu favorablement à l’appel prononcé par le secrétaire général pour aider le Congo afin d’instaurer la paix dans ce pays. La Tunisie occupe actuellement la 21ème place mondiale et la troisième position arabe dans la liste des pays éditeurs de paix. Et une pensée ici aux soldats de la paix de par le monde ainsi que ceux qui ont péri sur le terrain. Et je ne peux m’empêcher ici d’avoir une pensée émue au personnel humanitaire décédé à Gaza par les frappes de l’occupant ».
Il faut restaurer la crédibilité de l’ONU !
« La guerre et le génocide que mène l’entité occupante contre les civils à Gaza au vu et au su de tout le monde et devant l’impuissance de l’ONU à faire respecter les décisions de ces organes principaux et à trouver une solution durable et définitive à cette situation dramatique d’injustice qui dure depuis 75 ans est un défi béant à la crédibilité et l’efficacité de l’institution onusienne. L’incapacité du conseil de sécurité internationale à mettre fin à cette violation systématique de l’article 2 de la charte qui interdit la menace ou l’emploi de la force contre la souveraineté et l’intégrité territoriale et l’indépendance politique de tout Etat comme on le constate actuellement au Moyen Orient notamment au Liban, constitue une preuve irréfutable que le système actuel a atteint ses limites et qu’une révision modernisé s’impose pour mettre l’ONU au diapason du défi ».
Revoir le système d’aide financière
« Au 79ème anniversaire de l’ONU, il est fort regrettable de constater que nous n’avons jamais été aussi confronté à des défis existentiels dont les différends en conflits armés, l’impact du changement climatique, l’accroissement des inégalités, etc. ont mis à rude épreuve l’action de notre organisation. Force est de constater que malgré le travail assidu où depuis 1945, l’ONU a accompli d’importantes réalisations dans l’intérêt de l’humanité toute entière, où elle a fait face à l’ampleur des défis et au désengagement de certains, l’impression générale aujourd’hui c’est la nécessité impérieuse d’accélérer les réformes du système international afin de le rendre plus équitable, plus juste et plus efficace et à même de face aux défis de notre monde contemporain. La lutte contre les inégalités exige une accélération de la réforme de la situation financière internationale et des institutions qui ne sont plus en mesure d’assurer une sécurité mondiale ni d’offrir aux pays en développement le niveau de soutien dont ils ont besoin. Convaincue de cette nécessité, la Tunisie estime opportun d’envisager une nouvelle approche de la coopération internationale basée sur l’égalité la non-ingérence dans les affaires internes et le respect de la souveraineté nationale et sur la solidarité humaine, la décision du destin et les intérêts des peuples. (…) Nous avons ressenti chez les onusiens la volonté sincère de mobiliser davantage de ressources nécessaires pour rapporter leur appui aux pays en développement pour les aider à faire face aux principaux défis.
De par cette conviction, nous souhaitons entamer l’année 2025 avec le renforcement de l’action multilatérale et de l’accomplissement de la coopération de notre système avec les nations unies et nous sommes convaincus que malgré le retard accusé dans la réalisation des réformes escomptés l’ONU demeure à nos yeux, le seul refuge le père idoine, l’espace vital et le récipient d’air de la légalité internationale.
Abir CHEMLI