En Tunisie, la pandémie épuise les soignants mais n’effraie pas les touristes

Quand l’hôpital de la station balnéaire de Sousse s’est trouvé quasiment à court d’oxygène, les médecins ont suivi anxieusement le trajet du camion qui devait les approvisionner. Sur la côte tunisienne, la flambée de Covid-19 inquiète les soignants mais ne freine pas les touristes.
La Tunisie, qui a peiné à trouver les doses de vaccins nécessaires avant que l’épidémie ne s’emballe de façon inédite en juillet, enregistre aujourd’hui l’un des pires taux de mortalité liée au coronavirus au monde.
Mais à quelques kilomètres de l’hôpital Farhat Hached de Sousse, des milliers de touristes — pour beaucoup vaccinés — continuent à profiter de la plage. Malgré la crise, le pays reste ouvert aux visiteurs et il n’y a pas de quarantaine pour les personnes, vaccinées ou non, arrivant avec des tours opérateurs.
Si les hôtels peuvent recevoir jusqu’à 50% de leur capacité habituelle, le service de réanimation de l’hôpital de Sousse affiche lui complet depuis des semaines.
« Quand on vous dit « dans trois heures, il n’y a plus d’oxygène », ça stresse, on prépare des bouteilles partout », souligne le Dr Khaled Ben Jazia, chef du service de réanimation.
« Il y a deux jours, il ne restait plus qu’une heure d’oxygène, vous imaginez la catastrophe si on a une rupture? Je n’ai jamais été aussi stressé (…) on était chacun avec des bouteilles au chevet des patients, au cas où », raconte-t-il.
« Quand on a entendu la sirène de l’escorte qui accompagnait le camion (d’approvisionnement en oxygène), ça a été un soulagement. On est rentrés épuisés mais heureux », affirme le médecin.
* »A l’hôtel, tout va bien » 
A l’hôtel Bellevue Park de Sousse, les clients ne sont eux pas inquiets.
« J’ai eu mes deux vaccins », souligne Doris Brecking, touriste allemande de 71 ans bronzant au bord de la piscine. « A l’hôpital, il y a des gens malades, mais ici à l’hôtel, tout va bien avec le protocole sanitaire. Je n’ai pas eu peur. »
La France, d’où arrivent de nombreux touristes, a placé la Tunisie sur liste rouge mais autorise quand même les personnes doublement vaccinées à s’y rendre sans motif impérieux, laissant la porte ouverte aux séjours touristiques.
« Si je me retrouve là en quarantaine avec la petite… », s’était inquiétée avant de partir Stéphanie Wilmert, une Française venue du Luxembourg. « Mais l’envie de revenir ici était trop forte », confie-t-elle.
« Je ne me suis pas amusée à aller en ville (…) même si je suis vaccinée », indique la vacancière. « On avait oublié les masques, on avait tendance à dire « c’est bon, c’est fini » mais non, ce n’est pas fini du tout. »
Début juillet, une responsable de la Santé a indiqué que le système de santé tunisien s’était « effondré », une affirmation ensuite démentie par le ministère.
* « Situation précaire » 
« On tient le coup, mais la situation est précaire, vu le manque de ressources humaines et de soutien logistique », souligne le Dr Zied Mezgar, chef des Urgences à Sousse.
« La catastrophe ne viendra pas de l’afflux de patients, mais de l’épuisement des soignants, » estime-t-il. Son service a accueilli jusqu’à 50 malades, pour une équipe de sept personnes.
L’annonce mercredi du chef du gouvernement Hichem Mechichi indiquant que le personnel hospitalier ne pourrait prendre aucun congé a suscité la colère parmi des soignants déjà à bout.
Après un an et demi de pandémie, le tourisme, secteur clé en Tunisie puisqu’il représente entre 8 à 14% du PIB, a été laminé.
Alors « on doit s’adapter », souligne Nizar Marghli, directeur de l’hôtel Bellevue Park, qui a perdu un tiers de son chiffre d’affaires par rapport à 2019.
« Le pire est derrière nous », espère-t-il, comptant sur l’accélération prochaine de la campagne de vaccination.
Selon la Banque centrale tunisienne, les revenus du tourisme sur les six premiers mois de l’année ont baissé de 25% par rapport à l’an passé, une saison déjà difficile bien que le pays ait rapidement circonscrit la première vague de contamination.
(AFP)

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