Avec l’approche de l’été et l’apparition des grandes chaleurs, le spectre des coupures d’eau dans certaines villes et régions du pays, de façon imprévue et incertaine, commence à hanter les esprits des citoyens, alors que les agriculteurs dans certaines régions du pays comme les gouvernorats du nord du pays où il y a des périmètres publics irrigués sont en colère, car ils ont subi des restrictions dans l’alimentation en eau de leur groupement, qui touchent les cultures maraîchères : 20% seulement des volumes d’eau seront réservés et administrés aux arbres fruitiers.
Le déficit pluviométrique dure depuis deux ans et a engendré une psychose chez les responsables de notre agriculture.
En effet, le déficit de stockage de l’eau dans les barrages est de l’ordre de 450 millions de mètres cubes, par rapport à la moyenne décennale, car le stock actuel ne dépasse pas le milliard de m3. Les deux déficits annuels successifs de pluviométrie étant de 30% et de 45% pour les deux années écoulées.
Notre pays est pauvre en eau, nous vivons dans une zone de stress hydrique puisque la consommation moyenne du Tunisien est de 436 m3 par an, alors que le seuil adopté par la FAO est de 500 m3 par an et par habitant.
En effet, si certaines zones au nord de notre pays reçoivent près de 1000 mm d’eau par an, les 2/3 de notre pays reçoivent moins de 200 mm de pluie par an, considérés comme le seuil minimal pour faire pousser des cultures ou même entretenir des pâturages extensifs.
Or, avec le réchauffement climatique, non seulement les températures moyennes grimpent rapidement d’où la nécessité de compenser la hausse du thermomètre par un apport supplémentaire d’eau, mais la quantité de pluie a tendance à diminuer et les irrégularités interannuelles de pluie s’amplifient, ce qui engendre une pression croissante sur les besoins de l’agriculture en matière de consommation d’eau.
Rappelons que 80% de la consommation en eau de notre pays est destinée à l’irrigation.
La stratégie nationale en matière de gestion des ressources en eau consiste à poursuivre la construction de barrages et de lacs collinaires pour optimiser la mobilisation des eaux de surface et renforcer la capacité de stockage des barrages afin de réguler les disparités interannuelles en matière de pluviométrie.
Mais il y a aussi le développement de l’utilisation des eaux non conventionnelles avec la désalinisation de l’eau de mer et le recours aux eaux traitées.
Le transfert des eaux du Nord vers le Cap Bon, Sfax et le Sahel mis en pratique par le ministère de l’Agriculture depuis le mois de janvier 2017 a coûté cher, soit 29 millions de dinars en énergie électrique pour le pompage et a mobilisé une grande partie de l’infrastructure hydraulique du pays : à partir du barrage de Barbara vers Bouhertma (100.000 m3/j) de Sidi Barrak et de Ziatine vers Sejnane (650.000 m3/j).
L’ensemble des eaux étant véhiculé à travers le canal de la Medjerda vers le Cap Bon selon un débit de 750.000 m3/j.
Conjointe et solidaire avec le ministère de l’Agriculture, la SONEDE assume certes une lourde tâche et une grande responsabilité en matière de disponibilité et de régularité de l’approvisionnement en eau, aussi bien pour l’eau potable que pour les besoins de l’irrigation des périmètre publics.
Deux problématiques se posent en la matière : le niveau du volume d’eau stocké dans les barrages d’une part, d’autre part la fiabilité et l’état d’usure du réseau de canalisations de la SONEDE qui compte 52.000 km dont une bonne partie sont vétustes, car elle datent de plus de 30 à 40 ans.
Il y a là une source de pannes de déperditions et de défaillances en matière de distribution d’eau en période de forte pression.
Il serait souhaitable et plus efficace de créer une filiale de la SONEDE, spécialisée dans les forages pour des raisons d’efficacité et de répartition des rôles, car dans le Centre et le Sud, c’est le recours à la nappe qui permet d’améliorer l’approvisionnement en eau de la population, auquel il faut ajouter le raccordement au réseau de distribution.
Il en est de même pour la construction des stations de désalinisation de l’eau de mer : la SONEDE ne peut à la fois gérer le quotidien et en même temps entreprendre de grands projets. D’où le retard flagrant pris par la construction de la station de Djerba qui ne sera pas prête pour assurer la haute saison touristique 2017. Le réseau de la SONEDE a besoin d’être rénové et restructuré pour réduire les fuites et faire face aux besoins.
Le gaspillage de l’eau est une certitude douloureuse qui mérite une stratégie nationale, efficace et dissuasive de rationalisation de la consommation, aussi bien en agriculture que dans l’hôtellerie et chez les ménages.
Il y a la sensibilisation certes, mais aussi la sanction pour ceux qui dilapident cette ressource nationale.
Il n’est pas permis de remplir des piscines privées alors que la population dans le Centre et le Sud souffre d’une pénurie d’eau potable.
La SONEDE doit s’activer pour achever les forages et les projets en retard de réalisation.
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