Par Ahmed Souleymen
Les péripéties, malheureuses, qui viennent encore une fois secouer le déroulement des épreuves du bac cette année nous interpellent douloureusement. Pourtant la chose n’en est as à sa première édition puisque nous avons eu, par le passé, à compter avec des cas similaires. Qu’est-ce qui a fait donc que ce qui s’est passé cette fois sorte, pour ainsi dire, de l’ordinaire et ait suscité tant de tapage ?
Les raisons tiennent particulièrement peut-être à la couleur de l’époque aux conditions somme toutes singulières dans lesquelles nous vivons et à l’idée que certains se font des examens, de la concurrence sociale et en général de la valeur même des études en tant que facteur d’émulation et de réussite. Ce qui s’est passé cette année n’est pas sans nous rappeler qu’en filigrane, le bac a été depuis longtemps la cible de la tricherie et de l’arnaque.
Des cas de fraudes ont toujours fait partie du décor et, à chaque fois, nous eûmes à gérer des situations similaires desquelles aucun de nous n’en est sorti indemne. Loin de nous leurrer, la déconvenue de l’actuelle session ne fait que nous conforter dans l’idée de l’impératif d’une sérieuse prise de conscience du phénomène -parce qu’en fait, c’en est un- et de la nécessité d’en tirer les conclusions qui conviennent.
Qu’il y ait donc des fraudes ou des tentatives dans ce sens, cela n’est nullement exclusif de l’époque mais, bel et bien, un fait ritualisé au point de générer des traditions en la matière ! Déjà, tout au début du siècle précédent, le cheikh Tahar Ben Achour en a fait écho dans l’un de ses ouvrages à propos de certains étudiants zeitouniens qui n’hésitaient pas, lors des examens, à user de tous les stratagèmes pour tromper la vigilance des surveillants.
Des générations entières d’élèves, d’ici ou d’ailleurs, s’y sont adonnés sans vergogne, multipliant les astuces et fignolant les procédés. Tout ceci pour dire que ce que nous venons d’enregistrer cette année ou lors des précédentes sessions n’est, en lui-même, surprenant en rien et, à la limite, « de bonne guerre ». Qu’il y ait, en la circonstance, pareil défi entre candidats aux examens et l’administration par surveillants interposés, c’est la part de risque liée à tout examen.
Le constat des faits en eux-mêmes n’a pas ou ne devrait pas susciter les cris d’alarme enregistrés ça et là et n’ pas de prime abord de quoi semer le doute ou de jeter le trouble sur la qualité du déroulement des épreuves du bac sous nos cieux. D’ailleurs, la proportion de fraude enregistrée par rapport au nombre général des candidatures (400 sur plus de 140 mille candidats) ne suggère en rien qu’il y a péril en la demeure et ne justifie en rien la tendance alarmiste que certains semblent entretenir à ce propos.
Cette année, les faits se sont illustrés par les procédés de fraudes manifestement perfectionnés. De quoi se poser bien des questions à propos de ces stratagèmes qui, en d’autres circonstances, auraient de quoi attirer l’attention. Il n’est nullement question à ce propos de jeter le quolibet sur les techniques de surveillance mais plutôt sur le « génie » mal conseillé des fraudeurs.
À n’en point douter, il importe de revoir le procédé du déroulement des épreuves du bac, les méthodes d’encadrement des candidats et les procédures de contrôle durant toutes les périodes des examens. Les techniques de contrôle mises en pratique actuellement arrivent manifestement à leurs limites. Les dessins des fraudeurs actuels et ceux qui se prédestinent à l’être nous lancent à tous un défi. Saurions-nous capables de les relever ?
A.S.