Le sauvetage des entreprises publiques dont la situation dramatique est en train de s’aggraver encore plus chaque mois est non seulement nécessaire mais ultra urgent, car le déficit abyssal qu’elles sont en train d’accumuler est devenu ahurissant, alors que l’Etat ne peut pas continuer à assumer les subventions, crise des finances publiques oblige.
La position de l’UGTT qui consiste à refuser de façon systématique toute sorte de privatisations, n’est ni soutenable, ni rationnelle, elle est même suicidaire et contre-productive dans la mesure où les entreprises en l’objet sont au bord de la faillite, ce qui condamnerait leur personnel au chômage.
On peut comprendre, sans justifier ce comportement qui consiste à défendre les intérêts immédiats de ses adhérents, une “sorte de fonds de commerce” ou de raison d’être, mais qui reste sans fondement.
La rationalité consiste à défendre la pérennité des entreprises économiques qui est à la base de la prospérité du tissu social sous-jacent et de la promotion de l’emploi.
Le comportement de la “chaise vide” est négatif par définition, celui du chantage à la grève générale ou sectorielle contre performant, car c’est un refus de dialogue et une auto-exclusion de la participation au sauvetage du pays au même titre que les autres partenaires sociaux, dans un but de prise en compte de l’aspect social.
En matière de privatisation, il n’y a pas de dogme mais il s’agit d’examiner au cas par cas par une commission où seront représentés aussi bien les représentants du secteur privé au sens large du terme que ceux des travailleurs, les banques qui ont financé et continuerons à la faire et bien sûr les pouvoirs publics. Mais il y a des critères : la sauvegarde de la notion de service public et de l’exercice de la responsabilité de l’Etat d’abord.
Ensuite faire assumer au secteur privé son rôle : investir pour créer de la valeur ajoutée et de l’emploi en contrepartie des avantages accordés par l’Etat.
Les entreprises colossales actives dans le secteur stratégique au sens large du terme comme la STEG, la SONEDE, l’ONAS, les radios et la TV nationales, Tunisair, la SNCFT, TRANSTU, l’ETAP, la STIR doivent garder leur statut public, même si l’injection d’une “dose réduite” de capitaux privés minoritaires est susceptible d’améliorer leur gestion, donc leurs résultats de façon sensible. Le changement de gouvernance pour rentabiliser ces entreprises s’impose dans le cadre de contrats-programmes.
Les difficultés apparaissent lorsqu’il s’agira de privatiser El Fouladh, la Société nationale de cellulose, la société tunisienne du sucre etc. car le poids social et la masse des investissements sont énormes .
Le problème sera de trouver des privés capables de payer le prix qu’il faut. Le recours à un partenaire stratégique s’impose. En effet, le sauvetage des entreprises publiques implique trois actions majeures que seul le secteur privé est en mesure d’accomplir et de réussir, car il en a le courage et les moyens avec la bénédiction de l’Etat.
Un assainissement financier qui inclut, aussi bien le rééchelonnement des échéances impayées, l’abandon de certaines dettes, ainsi que la recapitalisation de l’entreprise afin de rétablir les équilibres financiers à condition d’assurer aux intéressés un dédommagement équitable. Il y a également des allègements à réaliser au niveau des effectifs humains, destinés à réduire la charge salariale abusive suite à des recrutements pléthoriques et anarchiques à objectifs électoralistes et clientélistes nocifs constatés durant l’exercice du pouvoir par la Troïka.
Mais l’investissement massif s’impose dans la rénovation de l’outil de production avec prise en compte des nouvelles technologies en fonction du repositionnement stratégique de l’entreprise sur le marché et la mise à l’ordre du jour de la compétitivité.
En effet, l’Etat n’a plus les ressources budgétaires pour investir de façon massive dans les entreprises et de toute façon, il n’est pas un bon gestionnaire.
Il y a également le changement de gouvernance et la modification du modèle de gestion, l’entreprise a besoin de rigueur, de rentabilité et de compétitivité pour s’imposer face à la concurrence.
Ce n’est pas une œuvre d’utilité sociale ou d’entraide pour recruter des salariés incompétents ou inutiles.
La privatisation intelligente sélective et partielle faite selon des critères transparents a fait ses preuves de réussite dans le passé lorsqu’il s’était agi par exemple des cimenteries et de la SOTUVER dans l’industrie lourde, de “Magasin Général” dans la distribution, des hôtels de la SHTT qui étaient en ruine et qui sont devenus des palaces, la Banque du Sud au bord de la faillite est devenue Attijari bank, une des banques les plus actives sur le marché bancaire.
Il n’est pas question je suppose de privatiser pour le moment les banques publiques qui font l’objet d’une restructuration en bonne voie de concrétisation, ni les grandes entreprises publiques, qui méritent cependant une mise à niveau destinée à revoir l’organisation et la productivité du personnel, telles que la STEG, la SONEDE, TUNISAIR, la COTUNAV et la Transtu.