Protocolaire avec des piques couverts d’humour : c’est ainsi que nous pouvons qualifier la cérémonie de passation de pouvoir entre le gouvernement sortant d’Essid et l’entrant de Chahed. S’il y a bien une chose que l’ancien Chef de gouvernement a apprise durant son court séjour à la Kasbah, c’est bien l’art de communiquer. Explications.
Béji Caïd Essebsi, Ghanouchi et Chahed dans le viseur
Deux piques, sous couvert d’humour, ont été glissées dans le discours d’adieu de Habib Essid. « Aujourd’hui, c’est une initiative. Demain, ce sera une fatwa. N’est-ce pas, Sidi Cheikh ? », a déclaré Habib Essid à l’adresse de Rached Ghannouchi, faisant référence à l’initiative présidentielle qui a signé l’arrêt de mort de son gouvernement.
Autre allusion, quoique moins violente, à l’adresse de Youssef Chahed lui-même. En s’adressant à lui, Habib Essid a utilisé le terme « ministre » au lieu de « chef de gouvernement ». Une « erreur » qu’il a rectifiée avec un sourire, la justifiant par l’habitude de l’appeler ministre car il était dans son équipe.
Ennahdha est au pouvoir malgré les apparences
En d’autres terme, Habib Essid semble avoir profité de la passation de pouvoir pour livrer ses derniers messages et pour tacler ceux qui ont voulu lui faire la peau. En essayant de lire entre les lignes, on peut penser qu’Essid voulait dire deux choses. Tout d’abord, le fait de s’adresser à Ghannouchi est une manière d’affirmer que ce dernier, avec son parti, est aux commandes de l’État avec le président de la République. Ensuite, comme nous le savons, la réplique de l’ancien Chef du gouvernement est aussi une attaque à l’encontre du président de la République. Il semble les tenir pour responsables de l’instabilité du pays. Longuement dans son discours, Habib Essid a insisté sur l’importance de la stabilité politique. « Ce gouvernement doit durer car la Tunisie ne supporte plus l’instabilité », a-t-il martelé.
Habib Essid semble vouloir savoir, à travers un humour feutré qu’il a été évincé au bout d’un an par Ghannouchi et Beji Caïd Essebsi pour nommer à sa place un Chef de gouvernement docile. Cela ne l’empêchera pas de plaider en sa faveur afin de le garder en poste au-delà d’une année.
Avec ses attaques masquées aux allures de plaisanteries, Habib Essid est finalement parvenu à toucher quelques cordes sensibles de ceux qui l’ont écarté.
M.F.K