Les barragistes de la zone Afrique sont désormais connus. À l’exception notable de la Côte d’Ivoire, les grandes équipes sont encore là.
À la suite d’affiches alléchantes pour clôturer les dernières journées du 2e tour des éliminatoires de la zone de la Confédération africaine de football, les 10 meilleures équipes du moment sont connues. Elles se retrouveront au mois de mars 2022 pour des barrages qui s’annoncent passionnants. Indépendamment de la Coupe du monde, il s’agit également de l’ultime phase de répétition avant la Coupe d’Afrique des nations du mois de janvier prochain. De nombreux enseignements sont à tirer des derniers matchs de cette dernière phase avant les barrages.
*Algérie et Nigeria dans la douleur
Le match nul du Burkina in extremis face au Niger avait permis aux Étalons de rester en capacité de finir premiers de leur groupe, à condition d’engranger une victoire en Algérie. Le match aller avait donné le ton, le match retour a confirmé la capacité du Burkina à faire déjouer ses adversaires. Avec l’une des expressions collectives les plus impressionnantes du continent, aux côtés de l’équipe du Mali, le Burkina va fortement regretter son manque d’efficacité face à un champion d’Afrique aux ressources insoupçonnées. Celles-ci ont permis aux Fennecs d’éviter une désillusion avec un score de parité de 2 buts partout. Toutefois, avec de telles prestations, le Burkina peut mettre le cap sur la Coupe d’Afrique des nations (CAN) et espérer créer la surprise, comme en 2013, où les Étalons avaient atteint la finale qu’ils avaient disputée avec le Nigeria. Concernant l’Algérie, sa série d’invincibilité se bonifie (32 matchs quand même). Nul doute que Djamel Belmadi tentera de se servir des leçons tirées de son double affrontement avec le Burkina pour réaliser les ajustements nécessaires et sortir victorieux de son match de barrage sans oublier d’être en condition de conserver son titre continental.
Pour ce qui est du Nigeria, l’impression laissée par la qualification est beaucoup moins rassurante. En effet, dans un groupe comprenant le Cap-Vert (qui a séduit durant cette phase de qualifications), le Liberia et la Centrafrique, les Super Eagles, entraînés par Gernot Rohr, étaient censés dominer sans trop de difficultés. Une défaite surprise à domicile contre la République centrafricaine a relancé la course à la première place et offert au public un match décisif contre le Cap-Vert pour la dernière journée. Dans un match très difficilement manœuvré, les Super Eagles ont cédé un match nul sur leur terrain, sans convaincre, contre leur dauphin, qui méritait peut-être même plus.
*Cameroun, Ghana et RD Congo au bout de l’effort
Dans un autre groupe, la grande affiche de cette 6e journée opposait le Cameroun et la Côte d’Ivoire. Elle a offert une rencontre pleine de rythme et d’intensité au cours de laquelle les Lions indomptables ont fait le plein de confiance. Il faut dire que les hommes du sélectionneur Toni Conceição semblent avoir trouvé un juste équilibre, notamment au milieu de terrain où l’ancien marseillais Zambo Anguissa et le milieu de Hellas Vérone, Martin Hongla, ont marqué le match de leur empreinte. Si le Cameroun a semblé en rodage, il s’est agi sans aucun doute d’un match référence sur lequel il devrait être possible de s’appuyer dans la perspective de la prochaine Coupe d’Afrique des nations et des barrages à venir. Devant leur public, nul doute que l’objectif de gagner à nouveau le trophée sera déterminant, la dernière Coupe d’Afrique organisée au Cameroun ayant eu lieu en 1972, édition pendant laquelle le Cameroun a terminé troisième.
Autre pays, autre parcours. Le Ghana, qui a composé avec le retour de Milovan Rajevac sur le banc, s’est fait une frayeur avec un match nul au contenu décevant contre l’Éthiopie (1-1). Par conséquent, il devait absolument prendre 3 points la dernière journée lors de la réception de l’Afrique du Sud. Mission accomplie au Cape Coast Sports Stadium dans un match électrique qui a l’a vu s’en sortir grâce à un penalty réussi du capitaine André Ayew, qui a marqué pour sa 100e cape avec les Blacks Stars. Si l’arbitrage global de ce match a été vivement contesté par les Sud-africains (qui ont déposé un recours à la CAF et la Fifa), le Ghana semble ouvrir une nouvelle ère accompagnée par l’émergence de jeunes prometteurs talents autour des cadres confirmés que sont les frères Ayew, Thomas Partey (indisponible lors des deux derniers matchs), le défenseur de Leicester Daniel Amartey ou encore Mubarak Wakaso.
À l’image du Ghana, la République démocratique du Congo était plutôt mal embarquée avec seulement deux points glanés lors des deux premières journées avec deux matchs nuls, contre la Tanzanie et le Bénin, puis une défaite à Madagascar lors de la quatrième journée. Guidée par le retour en sélection de Dieumerci Mbokani, la sélection d’Hector Cuper a su se reprendre pour finir avec panache (victoire 3-0 en Tanzanie), malgré un arbitrage des plus contestables lors de la dernière journée contre le Bénin (victoire 2-0). Un gros soulagement pour les Léopards, la seule équipe qualifiée à jouer les barrages et qui ne prend pas part à la Coupe d’Afrique des nations.
*Maroc, Sénégal et Mali tranquilles
Qualifié depuis le mois d’octobre, le Maroc de Vahid Halilhodzic a continué sa marche en avant pour finir sur un sans-faute. Les Lions de l’Atlas ont leurs 6 matchs de poule, malgré la blessure de son attaquant du FC Séville Youssef En-Nesyri, touché aux ischio-jambiers. Son cas est d’ailleurs source de tensions entre le club andalou et la Fédération marocaine de football. En effet, alors que le club de Liga a annoncé une indisponibilité de 2 à 3 mois, ce qui signifie un forfait pour la CAN, le coach Vahid a contredit le communiqué du FC Séville. « Le staff médical de l’équipe marocaine surveille sa situation avec beaucoup d’intérêt et nous sommes optimistes quant à son état de préparation », a-t-il déclaré, avant d’en rajouter une couche : « Nous avons fait notre analyse et nos tests. Il a une nouvelle blessure au biceps fémoral gauche. Il est bien guéri, il n’y a pas de bleu. J’ai entendu dire qu’il serait absent pour la Coupe d’Afrique, entre deux et trois mois d’arrêt. Peut-être deux ou trois ans, je ne sais pas, a-t-il plaisanté, ça dépend de qui parle. Pour moi, ce sera deux ou trois semaines au maximum. » Chaude ambiance donc, du côté des Lions de l’Atlas.
Du côté des Lions de la Teranga, après un match nul in extremis décroché sous une forte pluie au Togo lors de la 5e journée, on a profité de la dernière journée pour travailler ses gammes en l’absence de Sadio Mané, sorti sur blessure à Lomé. Ce match a permis à des joueurs comme Ismaïla Sarr ou Krépin Diatta de montrer qu’ils sont en mesure de prendre plus de responsabilités, tandis que Nampalys Mendy, en manque de temps de jeu du côté de Leicester, a pu démontrer l’importance de son rôle au milieu du terrain, un secteur où les Lions ont besoin de plus de certitudes.
Ainsi, si le Sénégal et le Maroc ont assuré l’essentiel avec respectivement 16 et 18 points, l’équipe dont la sérénité et la maîtrise collective ont impressionné est le Mali. Les Aigles, autour d’une ossature de grande qualité ont sans doute le meilleur vivier de joueurs du continent et jamais ils n’ont été aussi près de jouer une Coupe du monde. Avec 5 victoires, un match nul et aucun but concédé dans son groupe, le Mali est sans doute l’équipe qu’il faudra surveiller de très près, et pour la CAN et pour les qualifications au Mondial du Qatar pour lequel les barrages s’imposent pour la zone Afrique.
*Des chocs en perspective dans les matchs de barrage
Ce format des éliminatoires débouchant sur des barrages rappelle une fois de plus la difficulté pour les équipes africaines à se présenter régulièrement à la Coupe du monde. Avec 5 équipes à qualifier pour une Confédération de 54 pays, il est très difficile pour l’Afrique de présenter à coup sûr ses 5 sélections les plus performantes tant la phase de qualifications laisse une marge d’erreur non dommageable faible.
Au registre des statistiques, le Cameroun détient le record de qualifications consécutives au nom du continent. Les Lions indomptables en totalisent 4 (1990, 1994, 1998, 2002). Ce record pourrait cependant être égalé par le Nigeria si les Super Eagles parviennent à se qualifier pour l’édition 2022. De quoi comprendre que la Toile se soit enflammée ces derniers jours autour de la question d’une trop faible représentation du continent.
Voilà qui conduit à apprécier autrement l’édition 2026 de la Coupe du monde. Celle-ci prévoit la participation de 48 équipes, dont 9, voire 10, issues du continent africain, et ce, après un tournoi de barrages intercontinental. Il est ainsi regrettable qu’une solution favorable à l’Afrique n’ait pas été trouvée dans le format d’une Coupe du monde à 32 équipes, notamment à la suite de la Coupe du monde 2010, organisée en Afrique du Sud, où le continent possédait exceptionnellement 6 équipes.
En attendant, retenons que les 10 pays qualifiés seront répartis en deux chapeaux, suivant leur positionnement au classement FIFA. Pour les barrages en vue du Mondial au Qatar, ce sont le Sénégal, l’Algérie, le Maroc, la Tunisie et le Nigeria qui composeront le chapeau 1 tandis que l’Égypte, le Cameroun, le Ghana, la RD Congo et le Mali composeront le deuxième lot d’équipes. Le tirage au sort du tour final des éliminatoires de la zone Afrique aura lieu à Doha, le 18 décembre prochain. Il promet d’accoucher de confrontations épiques et propres à soulever l’enthousiasme des passionnés du ballon rond.
(Le Point)