Lors d’une récente réunion de la commission de lutte contre la corruption et de la bonne gouvernance relevant de l’ARP, il a été question, selon Maghreb Confidentiel, d’organiser une audition du gouverneur de la Banque centrale de Tunisie et du ministre des finances et d’y joindre par skype l’ancien président d’ABCI et ancien dirigeant de la BFT, Magid Bouden. La proposition serait du député de la coalition nationale, Souhail Alouini.
L’information en elle-même constituait une surprise dans la mesure où les autorités refusent de soulever cette question.
Nouveau rebondissement dans cette affaire ou en rapport avec elle.
D’abord la décision de changer le chargé du contentieux de l’Etat pour négligence dans la gestion de cette affaire.
En effet le chargé du contentieux de l’Etat aurait appliqué aveuglément les instructions qu’il recevait de son supérieur hiérarchique, en l’occurrence le ministre, sans vérifier le contenu du dossier ou l’implication de ces instructions sur le déroulement de la procédure engagée contre l’Etat tunisien par le fonds d’investissement étranger ABCI.
Ensuite, le limogeage, jeudi, du directeur actuel de la BFT et son remplacement par un administrateur provisoire. Cette décision a été prise, semble-t-il pour entraver la proposition de la commission parlementaire et l’éventuelle audition proposée par le député.
Le comité de résolution de l’affaire de la BFT créé en août 2018 sur décision du gouvernement et composé de représentants de la banque centrale, du ministère des finances, de la STB et de la BFT ainsi qu’un représentant de la présidence du gouvernement s’était réuni vendredi pour décider de la nomination d’un administrateur provisoire de la banque. Sa mission serait d’évaluer la viabilité de la BFT. Et ce qui est certain c’est que d’administrateur provisoire le sieur évaluateur se transformera en liquidateur, l’évaluation aboutissant à coup sûr sur la non viabilité de la banque.
Et pour cause. Aucune opération de dépôt n’a été effectuée à la banque depuis décembre 2015 sur décision du gouvernement de l’époque et à l’initiative de Chedly Ayari ex-gouverneur de la BCT.
A l’époque on avait même demandé aux quelques clients de la banque de fermer leurs comptes et la BFT s’est retrouvée sans ressources avec un personnel qui se tournait les pouces.
Plus encore, et ce qui a mis la banque dans une situation de cessation d’activité, c’est l’absence de volonté politique de recouvrer les créances non payées de crédits obtenus sans aucune garantie par des personnes, pour la plupart connues en tant qu’hommes d’affaires et qui se chiffraient à des centaines de milliards (900MD en 2015). un montant qui atteindrait aujourd’hui 1500MD.
On se rappelle ici la déclaration de Youssef Chahed qui avait qualifié cette affaire de la plus grosse affaire de corruption que la Tunisie ait jamais connue.
Le rebondissement que connaît la BFT aujourd’hui suite à ces nominations de dernière minute confirment ce souci du chef du gouvernement.
Evaluer la situation de la banque sans recouvrer ces créances ne peut mener qu’à la conclusion de sa faillite et les hommes d’affaires qui avaient bénéficié de ces crédits seront soulagés. Ce qui veut dire qu’on s’achemine à l’enterrement du recouvrement de ces créances et, par conséquent, l’enterrement de la BFT en beauté.
A signaler que la passation des pouvoirs entre le directeur limogé et l’administrateur provisoire désigné aurait lieu lundi 3 décembre 2018.
Une nouvelle tournure d’une affaire à rebondissements multiples mais qui risque de mettre les finances publiques à sec.
Affaire à suivre…