Expert-comptable, enseignant universitaire, ancien président du conseil de l’OECT et président du centre de gouvernance de l’IACE,
Fayçal Derbal est considéré comme un expert économique et financier confirmé, connu pour la finesse de ses évaluations et de ses analyses.
Nous lui avons demandé de s’exprimer sur les mesures prioritaires à prendre durant les 100 premiers jours du nouveau gouvernement.
Lutte contre la contrebande
Faire face et combattre le «banditisme» économique qui sévit depuis quelques années au point d’altérer la souveraineté de l’État. Ce phénomène s’est manifesté à travers la contrebande et la commercialisation de produits importés de manière illicite au vu et au su de tout le monde.
Lutter contre le commerce anarchique qui a envahi les domaines publics et qui a suffoqué le secteur formel
Lutter également contre le non-respect de la règlementation des prix et de la concurrence.
Relance de la croissance
Il est essentiel d’assurer le suivi de la finalisation des textes de lois indispensables pour la relance de l’activité économique et de l’investissement,dont principalement le code de l’investissement et la loi sur le partenariat public-privé (PPP.)
En effet, les investisseurs ont besoin d’un code d’investissement qui soit à la fois rassurant pour garantir leurs droits, mais aussi incitatif pour les attirer vers le site Tunisie lorsqu’il s’agit d’étrangers qui peuvent être tentés d’aller ailleurs.
Ce document fondamental tarde depuis trois ans alors que son adoption est urgente.
La loi relative au partenariat public-privé a été élaborée depuis deux ans et déposée à l’ANC, mais non encore examinée. Son adoption sera le point de départ de plusieurs grands projets d’infrastructure créateurs de richesses et d’emplois durables.
L’État investisseur
La dynamisation de l’investissement public et la réalisation des grands projets d’État conformément au budget du développement en évitant les retards d’exécution dudit budget.
En effet, les projets prévus dans les budgets d’investissement de l’État qui varient de 4 à 6 milliards de dinars chaque année depuis trois ans n’ont été réalisés que dans une proportion de 20 à 50% alors que les crédits sont disponibles.
La plupart des projets connaissent des obstacles fonciers et souffrent de lenteurs et de complications administratives, alors que l’État doit donner l’exemple et émettre un signal fort en faveur de l’investissement pour promouvoir la croissance.
Assainir le climat social
Œuvrer pour un climat social serein et assaini à travers des négociations avec les organisations patronales et syndicales mettant fin aux contestations, aux grèves, sit-in et toutes autres manœuvres de blocage des activités des entités économiques.
Redresser la balance commerciale
Mettre en œuvre un plan de redressement de la balance commerciale à travers la rationalisation des importations et la relance des exportations.
En effet, le déficit de notre balance commerciale a atteint un niveau record, soit 12,5% du PIB, alors que nous continuons à importer en devises fortes des biens de consommation de luxe, des produits inutiles et futiles qui peuvent très bien attendre des jours meilleurs pour laisser la priorité aux produits alimentaires de base et aux produits énergétiques.
La réforme fiscale
Les premières mesures relatives à la réforme fiscale ont déjà été décidées. Le nouveau gouvernement devrait continuer sur la même lancée et dans le même sens : combattre l’évasion fiscale et rétablir la justice fiscale, une date butoir devrait être fixée pour ne pas laisser les choses stagner. Il s’agit maintenant de passer à l’application des mesures arrêtées : la mise en œuvre ainsi que le contrôle.
Il importe aussi de moderniser l’administration fiscale et d’étoffer les effectifs pour faire face à l’élargissement de l’assiette fiscale.
Il est essentiel de mettre au point le code unique des impôts pour dépasser l’éparpillement et la multiplicité des textes à caractère fiscal.
À propos de la pression fiscale, celle-ci a augmenté de façon sensible pour atteindre 22,5%, ce qui est beaucoup. Il faudrait fixer un taux plafond qui ne devrait pas être dépassé : 20 à 20,5%, quitte à élargir l’assiette des contribuables pour optimiser les recettes fiscales. C’est pourquoi le futur gouvernement devrait fixer des objectifs précis à la réforme fiscale.
La promotion de l’emploi
Il s’agit de l’une des principales revendications de la Révolution qui ne peut malheureusement pas trouver de solution tout de suite, mais à moyen et long termes.
Ce qui compte, c’est de prendre tout de suite des mesures pour impulser l’investissement public et privé qui doivent créer des emplois de façon massive et durable.
Ridha Lahmar