Festival International de Hammamet, retour aux sources

 

Le Festival international de Hammamet souffle cette année sa cinquantième bougie. Cette édition se tient donc sous le signe du retour aux sources avec un programme qui fait la part belle au théâtre, au chant, aux musiques les plus diverses et spectacles inclassables. Et c’est le directeur du festival, M. Kamel Ferjani, lui-même musicien et chef d’orchestre, qui a présenté le programme, entouré par le chanteur Lotfi Bouchnak et l’acteur Kamel Touati qui présentent des spectacles originaux.

Théâtre d’abord, puisque l’ouverture se fera avec «Klem Ellil Zéro Virgule» de Taoufik Jebali qui se place toujours dans la même démarche intellectuelle, celle d’un observateur, d’un artiste-philosophe qui prend de ses distances avec la société qui l’entoure.

 « Richard III »de Jaâfer Guesmi qui reprend l’histoire d’une famille engluée dans des luttes internes et qui se bat tantôt dans les coulisses, tantôt à la lumière du jour. Ce conflit a engendré Richard III, figure emblématique du pouvoir absolu.

Avec « Ré…animation » Kamel Touati renoue avec les planches avec l’histoire d’un homme angoissé, anxieux et insomniaque, se trouvant dans un espace fermé et qui essaye de vivre un second souffle. Hanté par le rêve de partir, de découvrir un autre monde, son rêve est interrompu par son vécu.

« Tsunami » Fadhel Jaibi et Jalila Baccar continuent à piocher dans l’histoire moderne de la Tunisie, un cycle dominé par la question de la mémoire car «un pays sans mémoire est un pays qui ne sait jamais où il va». Dans cette pièce ces deux monstres sacrés du théâtre tunisien, pénètrent dans les arcanes de la société tunisienne et posent avec audace les questions que personnes n’ose poser.

Lamine Ennahdi sera aussi de la partie avec « Lila Ala Dalila », l’histoire de « El Ayech » un citoyen Tunisien d’une cinquantaine d’années qui, pendant presque deux heures nous raconte son histoire, ses rencontres et ses aventures dans la Tunisie postrévolutionnaire…

Côté musique, il y a « Rissalet salem » est un spectacle Tuniso-Égypto-Indonésien un message d’amour, de fraternité, de paix et de tolérance. Ils nous viennent du Liban : Oussama Rahbani présente Hiba Tawaji pour la première fois en Tunisie. Actrice et metteur en scène, elle chante en arabe, anglais et français et interprète différents styles de musiques, tels que le pop, le jazz et l’opéra.

« Mawal » avec Leila Hjaiej et Zied Gharsa, avec son raffinement musical entre airs orientaux et tradition tunisienne.

De son côté, Cheb Mami a su réussir son chemin artistique et devenir populaire à l’échelle internationale, grâce à ses duos avec Sting, Zucchero et d’autres stars. En 2013, il bat le record d’affluence arabe au Festival Mawazine avec 120000 spectateurs.

Algérie, toujours avec la chanteuse Souad Massi qui a grandi dans une famille artistique et s’est passionnée très tôt pour la musique. Elle apprend la guitare et danse le flamenco. En 2001, elle sort Raoui (Le Conteur) qui remporte un franc succès. On dit d’elle que c’est la Tracy Chapman du Maghreb. Loin de la vague déferlante du raï, Souad Massi, guitare en bandoulière, apporte un son nouveau à la musique algérienne.

On ne présente plus Gloria Gaynor, la voix légendaire de «I will survive». C’est sa première apparition en Tunisie avec un show magistral. En plus, elle a préparé une surprise pour le public de Hammamet…

États Unis toujours, Kool & The Gang est une véritable légende vivante de la « Great Black music ». Le groupe se compose aujourd’hui de 11 membres dont quatre depuis 45 ans. Sur scène, ils alternent leurs morceaux jazzy des années 1970 avec leurs tubes des années 1980.

Earth Wind & Fire Experience Feat Al Mckay est un mélange révolutionnaire des styles soul, jazz, funk et rythmes africains qui a donné à leur musique un son attractif.

Saber Rebai, surnommé « le prince de la chanson arabe », sera présent lors de la clôture de cette 50e édition du festival de Hammamet, toujours avec son label de qualité et de sérieux. Il promet dans ce spectacle un tour de chant entre les anciens tubes et les nouveautés extraites de son dernier album «Ajmal mokhtasar».

Et puis, il y a des spectacles inclassables comme ces « Drôles de Magiciens » un caléidoscope de magiciens internationaux avec pour dénominateur commun l’originalité et l’humour. Le Ballet Carmen présente « La Danse Mytique » avec Natalia Osipova, est une icône en Russie de l’académie du Bolchoï. Elle se penche à nouveau sur cette œuvre inoxydable et relève le défi de présenter un ballet original.

« Taraf de haidouks et kocani orkestar » ou quand le légendaire groupe Roumain Taraf de Haïdouks s’associe au fameux Koçani Orkestar de Macédoine, créant une magie de la musique tzigane… Et puis il y a les jeunes qui essayent de se faire une place au soleil et que vous trouverez sur le programme ci-joint. À noter enfin que les prix des spectacles oscillent entre 20 et 50 Dinars, ce qui commence à faire beaucoup…

Rappelons que Villa Sebastian est un domaine qui comprend des résidences, plusieurs hectares de jardins et un parc arboré en front de mer. Réalisée dans les années 20 par Gheorge Sebastian, mécène roumain et conçue pour recevoir de nombreux hôtes, Villa Sebastian est vite devenue un lieu cosmopolite de rencontres d’artistes, d’intellectuels et de personnalités de tous horizons. De 1932 à 1962, Giacometti, Paul Klee, André Gide, se sont succédés dans ce chef d’œuvre de l’architecture hammametoise.

Pendant la guerre, elle abrite le Maréchal Rommel qui la réquisitionne pour y vivre le « crépuscule de son rêve africain » et qui cède la place, ironie de l’histoire, à Winston Churchill qui y rédige une partie de ses mémoires. Les travaux de la maison, que l’on doit à Vincenzo Decara, ont duré trois ans et ont fait l’objet de plusieurs réfections au point que l’adage « construire et démolir comme Sebastian » circulait à Hammamet.

En 1962, le domaine est vendu à l’État tunisien qui y crée le centre culturel actuel. C’est la fondation Gulbenkian qui finance en 1964 le théâtre de plein air de mille places dominant la mer, qu’on doit à l’architecte Paul Chemetov. Depuis 1999, la villa et le parc sont inscrits sur la liste du Patrimoine Classé. Le Centre Culturel International de Hammamet est membre du Réseau International des Centres Culturels de rencontre, qui compte près de 40 centres actifs dans le monde.

Le festival s’ouvre en 1965 en accueillant Aly Ben Ayed et Maurice Béjart avant d’inviter d’autres grands noms comme Roger Planchon. Dès les années 1980, le festival devient pluridisciplinaire avec des personnalités comme Ute Lemper, Mikis Theodorakis, Myriam Makeba, Léo Ferré …

 Yasser Maârouf

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