Les dernières données du Conseil des marchés financiers révèlent une situation bancaire qui interpelle. Au 31 décembre 2024, les trois principales banques publiques tunisiennes – la BNA, la BH Bank et la STB – n’ont consacré que 13,88% de leurs crédits aux secteurs stratégiques, soit 5,859 milliards de dinars sur un encours total de 42,2 milliards. Ce constat soulève des questions sur l’adéquation entre les politiques de crédit et les besoins réels du pays.
Des secteurs vitaux sous-financés
L’analyse des chiffres montre des déséquilibres flagrants. Le secteur agricole, pourtant crucial pour la sécurité alimentaire, ne bénéficie que de 1,168 milliard de dinars, représentant seulement 7,19% des prêts accordés. Le logement, autre priorité sociale, capte 13,66% des financements. Quant aux institutions publiques stratégiques, elles doivent se contenter de moins du quart des crédits octroyés par la STB. Dans le même temps, les banques orientent massivement leurs financements vers la consommation, le tourisme et les activités industrielles, au détriment des secteurs considérés comme prioritaires par les autorités.
Le poids des créances douteuses
La situation se complique lorsqu’on examine le dossier des prêts non performants. Les trois établissements publics cumulent 6,8 milliards de dinars de créances douteuses, un montant équivalent à 51% des recettes attendues du mécanisme de réconciliation pénale. La STB détient la part la plus importante avec 3,159 milliards de dinars, suivie de la BH Bank (2,048 milliards) et de la BNA (1,667 milliards). Ces créances problématiques limitent la capacité des banques à jouer pleinement leur rôle dans le financement de l’économie.
Le mécanisme de réconciliation pénale, révisé en 2024, prévoit d’affecter 80% des sommes recouvrées au développement des régions les plus défavorisées. Les observateurs économiques appellent quant à eux à une révision des politiques de crédit pour mieux aligner les financements sur les priorités nationales. Alors que la Tunisie affronte des défis structurels majeurs, la question du rôle des banques publiques dans le développement du pays reste plus que jamais d’actualité. Les prochains mois seront déterminants pour voir si les orientations évoluent vers un meilleur équilibre entre rentabilité financière et utilité économique et sociale.
Financement : L’orientation des crédits bancaires en question
Miniature people: Group of small businessmen standing on coin with Business Growth concept.