France : pourquoi une cinquième vague sera difficile à éviter

Malgré la vaccination de la population contre le Covid-19, les modèles étudiés par l’Institut Pasteur montrent que le variant Delta perturbe les bonnes prévisions faites en juin.
Le variant Delta est venu semer la panique dans les modélisations de l’épidémie de Covid-19. Les scientifiques de l’Institut Pasteur avaient de meilleures prévisions pour l’automne au vu de la campagne vaccinale. Les mesures prises cet été, comme l’extension du passe sanitaire, ont également permis de limiter la casse. La « quatrième vague – on va parler avec prudence – est maîtrisée on va dire, contrôlée », a déclaré le Premier ministre français Jean Castex mardi, à l’occasion d’une visite dans un centre de vaccination alsacien. Les chiffres s’améliorent en effet, avec une baisse du nombre de nouveaux cas continue depuis le 17 août. Selon les calculs de Guillaume Rozier, fondateur de CovidTracker, sur Twitter, on détectait dimanche « 22% de cas en moins cette semaine par rapport à la précédente (14 873 chaque jour en moyenne) ».
Mais la France n’est pas à l’abri d’une cinquième vague. Surtout, celle-ci devra être anticipée autrement si l’on veut éviter un nouveau pic hospitalier et les conséquences qu’il implique. C’est ce qui ressort de l’étude publiée par l’Institut Pasteur lundi. Celle-ci envisage différents scénarios afin de nous préparer au mieux à toute éventualité. Il ne s’agit toutefois pas de prédictions.
*Les non-vaccinés, des super contaminateurs
Les résultats de l’étude insistent bien sur l’importance de la vaccination face au Covid et ses variants. « Les adultes non-vaccinés contribuent de façon importante à la pression sur l’hôpital », souligne l’institut, précisant que, selon leurs calculs, « les personnes non-vaccinées de plus de 60 ans représentent 3% de la population mais 43% des hospitalisations ». La couverture vaccinale doit ainsi être la plus importante possible, notamment chez les personnes fragiles, notent les scientifiques.
Les personnes non-vaccinées engendrent aussi davantage de contaminations. Les experts recommandent des mesures de contrôle ciblant cette population afin de « maximiser le contrôle de l’épidémie tout en minimisant l’impact sociétal par rapport à des mesures non ciblées. » Pourtant, se concentrer seulement sur les personnes vaccinées ne suffira pas. L’Institut Pasteur insiste alors sur l’importance du modèle « tracer, tester, isoler », notamment des personnes non-vaccinées.
*Aucune mesure prise = scénario catastrophe
Pour l’un des modèles, les scientifiques ont pris l’hypothèse d’un relâchement total des mesures à l’automne, avec un R0 (taux de reproduction du virus) à 5 et une couverture vaccinale de 70%, 80% et 90% chez, respectivement, les adolescents, les adultes de 18-59 ans et les plus de 60 ans. Aujourd’hui, nous sommes à 64%, 81% et 88%.
Le relâchement des mesures constituerait une grave erreur selon eux, qui mènerait à une vague caractérisée par un pic de 5200 admissions hospitalières par jour, soit un chiffre plus important que les deux vagues de 2020. Car même si le vaccin est efficace à 95% contre le risque d’hospitalisation, affirme Pasteur, 28% des hospitalisations surviennent chez les personnes âgées, malgré leur large participation à la campagne de vaccination.
La vaccination reste donc un atout majeur dans la lutte contre le Covid-19, selon ces modèles qui anticipent les pires scénarios. Car il est très improbable que toutes les mesures de restrictions mises en place dans le cadre de la crise sanitaire sautent à l’automne, d’autant qu’Emmanuel Macron n’exclut pas de prolonger le passe sanitaire au-delà du 15 novembre.
Le confinement ne semble, lui, plus une option nécessaire pour endiguer l’épidémie. En effet, grâce au vaccin, une diminution de 20 à 30% des transmissions suffirait à éviter la saturation en cas de nouvelle vague, tandis que les deux confinements de 2020 avaient permis de diminuer la transmission de 70 à 80%. « Je pense que nous avons les moyens de ne pas reconfiner », a estimé le ministre de la Santé Olivier Véran fin août sur BFMTV, mais l’apparition de nouveaux variants pourrait « lui donner tort ».
Actuellement, le Delta vient compromettre les prévisions enthousiastes faites par Pasteur au mois de juin. A l’époque, alors que le variant pointait le bout de son nez, les scientifiques tablaient sur une réduction de 10% des contaminations pour passer le prochain pic. « Ce niveau de réduction peut être atteint via des mesures de protection (comme les masques, le lavage des mains), un certain niveau de distanciation physique, le passe sanitaire et la stratégie tester-tracer-isoler », précisent les auteurs de l’étude.
*Avec Delta, les vaccinés aussi contaminent
Car ce variant vient changer la donne, même chez les vaccinés. Il diminue en effet la protection et on sait que les personnes vaccinées peuvent être contaminées et contaminer les autres.
Par ailleurs, « plus la population est vaccinée, plus la proportion de vaccinés parmi les cas augmente », pointent les scientifiques qui s’attendent à ce qu' »à peu près la moitié des infections aient lieu chez des personnes vaccinées (alors que ce groupe représente plus de 70% de la population) ».
Les chercheurs insistent sur l’importance de conserver les gestes barrières et le port du masque, y compris chez les personnes ayant reçu leurs injections. Car si « des mesures de contrôle ciblant les individus non-vaccinés peuvent aider à maximiser le contrôle épidémique, des mesures visant à réduire le risque d’infection et de transmission, comme le port du masque, devraient encore s’appliquer aux individus vaccinés dans des situations où la transmission est possible, par exemple en intérieur ».
(L’Express)

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