Frank Pacard, Directeur de l’enseignement et de la recherche de l’École polytechnique de Paris : Développer la formation continue co-construite autour de l’entrepreneuriat et l’innovation

Diplômé de l’École polytechnique et de l’École nationale des ponts et chaussées, docteur en mathématiques et titulaire d’une habilitation à diriger des recherches, Frank Pacard est le Directeur de l’enseignement et de la recherche de l’École polytechnique de Paris. Il s’est rendu pour quelques jours à Tunis. Objectif : développer la coopération avec notre pays à travers l’augmentation du nombre de Tunisiens à l’École polytechnique d’une part et le développement de formations continues co-construites avec des partenaires tunisiens d’autre part. Interview

Pouvez-vous nous donner une idée de ce qu’est l’École polytechnique de Paris ?

C’est l’une des plus anciennes écoles d’ingénieurs françaises créées lors de la révolution française, lorsque la France voulait former des ingénieurs et des cadres de haut niveau. L’École existe depuis plus de 200 ans et dispense maintenant une formation d’ingénieurs de très haut niveau pour près de 500 élèves par an. Il s’agit d’une formation pluridisciplinaire, basée, depuis la création de l’École, sur l’idée qu’il faut confronter les élèves aux meilleurs scientifiques du moment, mais aussi leur dispenser une formation en sciences humaines. L’École polytechnique offre également des formations de Master et de Doctorat.

Comment accéder à l’École polytechnique de Paris ?

L’accès au cycle ingénieur polytechnicien de l’École n’est possible qu’à travers un concours très exigeant. Ce concours est, avec celui de l’École normale supérieure de Paris, le plus sélectif de l’ensemble des concours scientifiques français. Pour le préparer, il est nécessaire de passer par deux ans de classes préparatoires, qui sont des filières très sélectives. Chaque année, de brillants élèves tunisiens passent par les classes préparatoires, en Tunisie ou en France, et ce n’est que par la suite qu’ils présentent le concours d’entrée à l’École polytechnique. Il n’y a qu’un seul concours d’admission mais avec plusieurs filières d’entrées et le nombre de places varie d’une filière à l’autre.

Pouvez-vous nous expliquer, comment les places ne sont pas les mêmes ?

Nous avons chaque année environ 500 élèves ingénieurs dont400 Français et 100 étrangers, ressortissants du monde entier. Le nombre d’élèves est fixé à l’avance, ce qui permet aux élèves d’évaluer leurs chances de réussite au concours. Le nombre d’étrangers a légèrement augmenté cette année – nous accueillons 112 élèves étrangers dans la dernière promotion – mais  augmenter significativement le nombre d’élèves par promotion demanderait de changer le système pédagogique. Dans le cycle ingénieur polytechnicien, nous avons donc une centaine d’étrangers par promotion dont des Tunisiens, et tous les candidats au concours sont égaux face à une sélection qui, il faut le reconnaitre, reste difficile. Difficile, essentiellement parce que le niveau requis pour accéder à l’École polytechnique de Paris est très élevé. Par ailleurs, l’effectif global de l’École permet de garantir une qualité de l’enseignement exceptionnelle, reconnue comme essentielle par les employeurs. Les conditions d’admission sont drastiques pour tous afin de garantir, outre la qualité de l’enseignement, une qualité homogène entre les élèves.

Qu’en est-il des Tunisiens ?

Auparavant, on accueillait chaque année une dizaine d’élèves tunisiens réussissant le concours et intégrant le cycle ingénieur polytechnicien. Aujourd’hui, environ 6 à 7 élèves tunisiens intègrent le cycle ingénieur polytechnicien chaque année, d’où mon déplacement à Tunis, afin d’essayer de comprendre pourquoi le nombre de Tunisiens intégrant l’École polytechnique a légèrement diminué et afin d’identifier des leviers de promotion. Nous parlons là des Tunisiens qui intègrent le cursus ingénieur de l’École polytechnique de Paris. Il y a d’autres voies pour accéder à l’École, notamment le Master et le Doctorat, pour lesquels les conditions d’admission sont différentes. Pour ces formations, la sélection se fait généralement sur dossier et peut être complétée par un entretien. Nous accueillons une douzaine de Tunisiens dans ces filières.

Quels débouchés pour les diplômés de l’École polytechnique ?

Les débouchés de nos diplômés sont très va¬riés. Ils peuvent aussi bien être des chercheurs de haut niveau en mathématiques, en physique, en économie – comme Jean Tirole – des ingénieurs, des managers… Nos diplômés ne restent pas tous en France, et beaucoup s’engagent dans une expérience internationale. En ce qui concerne les Tunisiens, plusieurs sont revenus en Tunisie où ils ont tous des parcours professionnels remarquables.

Vous avez lancé un nouveau programme de formation continue, de quoi s’agit-il ?

On vient de lancer, en France, des programmes de formation continue qui sont conçus par des Professeurs de l’École polytechnique et qui rencontrent un très grand succès. Une des raisons de ma présence ici, c’est mesurer l’opportunité de développer de tels programmes en Tunisie. Des programmes qui seront co-construits avec des partenaires tunisiens. L’idée étant de partager des programmes de formation continue entre l’École polytechnique d’un côté et un partenaire sur place de l’autre. J’ai notamment discuté avec des partenaires potentiels, pour lancer un programme de formation continue sur le thème de l’innovation technologique et de l’entrepreneuriat.

L’École accorde-t-elle une bourse à ses étudiants ?

Les élèves français de l’École polytechnique ont le statut de militaires et à ce titre, ils sont rémunérés. Pour les élèves tunisiens, il y a les bourses du gouvernement tunisien. Mais il y a aussi la fondation de l’École polytechnique, qui fait appel à la générosité des anciens élèves et qui attribue des bourses aux étudiants étrangers. L’idée est que tous les élèves du cycle ingénieur aient le même niveau de vie, quelle que soit leur origine géographique et sociale.

N.F

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