Futur gouvernement: Les urgences des 100 jours se bousculent au portillon

Faisons ensemble des suppositions peu probables portant sur un gouvernement enfanté dans la douleur et difficilement approuvé par une ARP morcelée et changeante au gré des jours.
Nous lui accordons pour le moment un préjugé favorable pour ce qui est de la volonté de mettre à exécution un programme de gouvernement aussi ambitieux qu’improbable à réaliser, mais aussi à propos de la compétence de le mener à son terme et de le réussir.
Mais en fait, de quoi peut-il être fait finalement, tout au moins pour ce qui est des urgences à réaliser durant les 100 premiers jours, les priorités étant multiples et complexes ?
Les 100 jours étant un délai de grâce accordé par l’opinion publique à un nouveau gouvernement, le temps de lui permettre d’affûter ses armes et de tester ses méthodes de travail sur le terrain afin de faire ses preuves d’efficacité dans l’exercice du pouvoir, en parvenant à tenir quelques-unes de ses promesses.
Les défis à relever, il est vrai, se bousculent au portillon du nouveau gouvernement : par quoi va-t-il commencer afin de réussir cet examen de passage s’il a l’intention de survivre car aussi bien la population que l’ARP « l’attendent au tournant », si l’on peut s’exprimer ainsi.
S’attellera-t-il à attaquer les problèmes faciles à résoudre pour enregistrer quand même et rapidement des succès ? Ou bien fera-t-il preuve de savoir-faire et d’habileté en s’attaquant à des  réformes complexes dans le but de convaincre et de remporter l’adhésion de ceux qui lui font confiance ?
Nous privilégions la bonne foi et la bonne gouvernance d’un gouvernement qui veut survivre longtemps, peut-être les cinq ans de la mandature de l’ARP et de la présidence de la République.
Comment frapper un « bon coup » en donnant la priorité au défi vital et majeur de la population, à savoir la flambée du coût de la vie et son corollaire, l’effondrement dramatique du pouvoir d’achat des citoyens ?
Cela peut donner des résultats spectaculaires, même à court terme, s’il y a la pertinence, la volonté sincère et la bonne méthode, tout en adoptant aussi bien la sanction que l’anticipation et la préparation minutieuse. Est-ce trop demander à une classe politique peu expérimentée pour ce qui est de la gestion des affaires publiques, mal secondée par une Administration démotivée et peu mobilisée ?
Ne parlons pas de suspicions possibles de corruption dans la mesure où nous n’avons pas de preuves concrètes mais de simples convergences de maladresses lorsqu’il s’agit par exemple d’importations de pommes de terre avariées de Turquie ou de céréales contaminées d’uranium dans le but de combler un manque sur le marché, alors que la compensation se fait par le recours au budget de l’Etat.
Cela implique le concours des brigades de contrôle des prix, des instruments de mesure et de l’hygiène publique en privilégiant la contribution des circuits de commercialisation officiels des produits agricoles, de lutte contre les spéculateurs et contrebandiers de tout bord, avec des sanctions dissuasives. Des dispositions efficaces doivent être prises pour le recours aux circuits courts de vente du producteur au consommateur avec des surfaces de vente permanentes.
Le deuxième défi à relever est celui du taux élevé du chômage des jeunes, des femmes, des diplômés du supérieur, notamment dans les zones intérieures mais aussi de la précarité des emplois dans le secteur informel sans protection sociale et en dessous des seuils de pauvreté.
C’est la conséquence d’une croissance molle et faible, qui découle d’un climat délétère des affaires et d’une morosité économique. Les moteurs principaux de la croissance (investissement et exportations) étant en panne, la demande intérieure qui résulte des augmentations de salaires sans progression de la productivité du travail, est plus néfaste que positive.
Cependant, les potentialités économiques ne manquent pas, pour peu que certaines corrections peu coûteuses mais ô combien positives au niveau des résultats, soient apportées.
Les gisements de productivité ne manquent pas pour peu que le gouvernement soit à l’écoute et sache négocier avec les structures professionnelles et la société civile.
Le tourisme, les phosphates et l’agroalimentaire fourmillent de gains possibles de productivité. Il suffit de veiller à l’application de la loi, promouvoir le dialogue pour bénéficier de la paix sociale, savoir convaincre, tenir les promesses et respecter les engagements pris. L’investissement a été asphyxié par les pouvoirs publics à cause du désaccord entre la BCT et la politique du gouvernement, allusion aux restrictions de la politique monétaire avec un taux directeur élevé destiné à lutter contre l’inflation alors qu’il a « fermé le robinet » du financement bancaire.
Sans qu’il y ait une politique d’accompagnement pour promouvoir l’investisseur des PME. Le résultat : l’inflation n’a presque pas baissé (6,7% au lieu de 7,6%), alors que le coût du financement s’est envolé. C’est donc le blocage de l’investissement.
Il est urgent de relancer l’investissement privé des PME par des taux d’intérêt bonifiés pour ce qui est des crédits bancaires.
La mauvaise gestion des finances publiques a fait en sorte que l’Etat tarde à payer les entreprises de bâtiment en charge de l’exécution des appels d’offres relatifs aux projets de développement, ce qui engendre faillites et difficultés financières, par ricochet un taux de chômage croissant.
Prenons l’exemple du budget de l’Etat pour 2020 : il comporte 25% de remboursement des crédits extérieurs, ce qui est beaucoup trop lourd, mais seulement 13% de fonds destinés à l’investissement et au développement, ce qui est dérisoire. En outre, près de 60% du budget vont aux salaires de la fonction publique, ce qui est anormal. Trois réformes peuvent être réalisées dans les entreprises publiques au cours des 100 premiers jours : Tunisair, la Transtu et El Fouladh, vu l’urgence des problématiques sociales et l’impact sur l’économie.
Il est urgent de réviser ces taux catastrophiques et de relancer une machine en panne.

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