Budget: L’impératif de rigueur

Dans un contexte économique fragile et très incertain, l’économie tunisienne ne cesse d’accumuler les faiblesses. Ce qui inquiète le plus, c’est que pour l’instant, les  signes de reprise pour 2015 ne sont pas là. Il faut d’abord reconnaître qu’un déficit élevé augmente mécaniquement la dette et donc le risque d’insolvabilité et le coût des emprunts. De même, un déficit élevé limite les marges d’action d’une politique budgétaire active et anticyclique. De plus, un resserrement simultané de la politique budgétaire et de la politique monétaire risque de reporter la relance et de freiner la croissance.

Si les risques sont largement connus, la question qui demeure en suspens qu’est-ce que doit faire le gouvernement pour réduire le déficit et éviter donc ces risques? Bien évidemment, il n’y a pas de solution clé en main, mais il s’agit soit de prendre des mesures portant sur les recettes et les dépenses pour réduire le déficit, soit de tenter de retrouver une croissance forte et durable — ou les deux à la fois. De toute manière,  la rationalisation des dépenses publiques apparaît aujourd’hui comme incontournable mais une accélération de la croissance peut également bénéficier au budget.

L’expérience internationale nous enseigne qu’en concevant des stratégies de redressement, les autorités doivent être conscientes de deux faits :

Les coupes dans les dépenses non prioritaires facilitent l’ajustement budgétaire : on a en général plus de chance de réduire le déficit en taillant dans les dépenses courantes. Pourquoi? Parce qu’en diminuant les transferts (subventions et autres prestations) et les salaires, on fait moins pression sur les dépenses non discrétionnaires, qui tendent à augmenter dans le temps, et cela peut améliorer la croissance tendancielle. Alléger les charges courantes représenterait non seulement une économie à court terme, mais freinerait aussi la dynamique de hausse des dépenses publiques. Relever la part de l’investissement public augmente également les chances de réduction du déficit en redéployant le budget vers des programmes favorables à la croissance et susceptibles d’élever la productivité à moyen terme grâce à de meilleures infrastructures.

Une augmentation des recettes fiscales pourrait aussi être nécessaire : là où un ajustement s’impose, les économies risquent de ne pas suffire. Il est largement admis qu’une hausse des recettes fiscales est indispensable à une réduction du déficit. Il faut en effet respecter un équilibre entre les coupes dans les dépenses et la majoration des prélèvements. La contribution des recettes à un redressement d’envergure ne dépend pas du ratio prélèvements/PIB initial : réformer les recettes concourt à la réduction du déficit même quand ce ratio n’est pas assez bas. Toute réforme des prélèvements doit préserver la croissance et limiter les distorsions. Simplifier le système fiscal en élargissant l’assiette pourrait améliorer le rendement. Ainsi, taxer le secteur financier, par exemple, pourrait être considéré comme une solution envisageable.

On a en général de meilleures chances de réussir à faire baisser le déficit en procédant à des économies mais, si l’ajustement nécessaire est important, une hausse des impôts peut y parvenir de façon plus durable. Il faut en effet assurer un équilibre entre coupes dans les dépenses et hausses des recettes pour éviter l’inefficience et soutenir des plans d’assainissement ambitieux. Toutefois, l’augmentation des prélèvements doit être maniée avec prudence, surtout là où ils sont déjà élevés, pour préserver l’efficience économique et minimiser les distorsions.

Mohamed Ben Naceur

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