“Il n’y a aucun sens à une révolution sans une révolution culturelle”

Militant, avocat et romancier, Khaled Krichi est sur tous les fronts. Apportant un regard critique sur les lois, le régime, la Constitution, la Révolution (…) qu’il décortique à travers ses écrits, maintenant qu’il n’est plus interdit de publication. Aujourd’hui, il jongle entre les romans, les ouvrages juridiques et la narration des faits historiques et vécus… On lui doit entre autres titres : « Autour de la passion et de la Révolution », « L’image du père » et «Opposition aux condamnations civiles».
Interview

Il semble que vous jongliez entre les genres, pourquoi cet investissement pluriel ? 
J’ai déjà rédigé plusieurs ouvrages et études liés à ma pratique juridique, étant donné que je suis avocat et ancien enseignant à la faculté de Droit et des sciences politiques. Mon orientation fut en quelque sorte imposée. Par ailleurs je suis passionné de littérature et de romans.Après avoir été emprisonné au début des années 90 dans une affaire politique liée à la deuxième guerre du Golfe, j’ai choisi de poursuivre des études de sciences juridiques après avoir été libéré. J’ai toujours essayé d’exprimer mes convictions politiques et citoyennes par la fiction littéraire. Ce que j’ai écrit dans L’Image du père est relatifaux protestations de la rue tunisienne à cette époque qui revendiquaient l’envoi de nos troupes pour s’engager aux côtés de l’Irak dans cette guerre.

Pouvez-vous nous parler de votre parcours de militant ?
Après avoir quitté la prison, j’ai rejoint l’Union générale des étudiants tunisiens, UGET, à l’université et j’étais parmi les fondateurs d’un nouveau mouvement : les étudiants panarabistes.
Entamant ma carrière d’avocat, nous avions fondé, des militants de toutes tendances et moi-même, l’Association internationale des prisonniers politiques. J’ai été désigné Secrétaire général de l’Association des jeunes avocats, huit mois après avoir rejoint un cabinet d’avocat. En mars 2005, j’ai fondé le Mouvement d’union des nassériens en Tunisie en collaboration avec d’autres militants, entre autres feu Mohamed Brahmi. Au Caire, la même année, j’ai fondé le Congrès nassérien en avril 2005.

Pas d’œuvres publiées à l’époque ?
J’écrivais à l’époque pour des journaux d’opposition : Achaab, Al-Mawkef, etc. Une revue culturelle a publié ma nouvelle «L’image du père». En février 2009, j’ai présenté une requête pour avoir l’autorisation de créer le journal Nasserya avec feu Mohamed Brahmi.
La période de l’après Révolution a vu la naissance du mouvement «Le peuple» dans la suite de l’Union des nationalistes arabes avec Mohamed Brahmi.

La période de l’après Révolution, est-elle une période propice à la publication d’anciennes œuvres ou est-elle inspiratrice de nouvelles ?
Je n’ai pas pu publier avant le 14 janvier, mais mes œuvres ont été écrites bien avant. Par exemple, je n’ai ajouté que l’épilogue et le dernier chapitre à mon livre « Autour de la passion et de la Révolution ». Tout le reste fut écrit avant, sous pseudonyme. C’était un ensemble de textes que j’ai publié, sous couvert d’anonymat sur le net. L’image du père est composé de huit nouvelles, quatre ont été écrites avant la Révolution et  quatre après. Après la Révolution, j’ai également créée le journal Al Karama disparu au bout de vingt numéros.

Croyez vous que la liberté d’expression soit vraiment menacée aujourd’hui en Tunisie ?
Je crois qu’elle est menacée par l’extrémisme et le désordre, beaucoup plus que par le risque de se voirun jour limitée ou censurée.  

 

Que dit votre œuvre « Autour de la passion et de la révolution » ?

«Autour de la passion et de la révolution» est une revendication d’une révolution culturelle. Il n’y a aucun sens à une révolution sans une révolution culturelle qui l’accompagne.
Dans « Opposition aux condamnations civiles », je me suis opposé aux lois civiles se rapportant aux droits des personnes condamnées par contumace dans des affaires d’ordre civil. J’ai demandé l’activation du comité créé au sein du ministère de la Justice et de modifier le journal des plaidoiries civiles et commerciales. 

Pas de nouvelles œuvres en vue ?
Dans le même esprit de la revendication d’une révolution culturelle, croyant en l’existence d’écrivains de théâtre talentueux et de nouvelles voix de la Révolution, je travaille en ce moment sur un nouveau roman Ghawgha (Vacarme) qui sera adapté au théâtre. Il s’agit d’une «biographie» de la Révolution tunisienne. je travaille également en ce moment sur un livre autour du régime politique en Tunisie, La constitution de la Révolution, entre la légitimité institutionnelle et la légitimité révolutionnaire et qui sera publié au même moment que la version finale de la Constitution.
                                                                                                                                               Propos recueillis par
                                                                                                                                                   Hajer Ajroudi

 

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