Infrastructures délabrées ou défaillantes ?

Autrefois, l’argument massue pour attirer les investisseurs extérieurs dans notre pays, était la qualité de nos infrastructures de base.
Ce temps-là est malheureusement révolu, faute d’avoir su investir de façon judicieuse, rationnelle et en temps utile dans la modernisation, la rénovation et le renforcement de nos équipements, aménagements et infrastructures de base.
C’est à cause de cela que de grands projets structurants et à haute valeur ajoutée “nous évitent” d’aller ailleurs alors qu’il s’agit d’investissements internationaux lourds et à forte densité de main-d’œuvre.
Il est difficile d’admettre qu’un pays qui souffre du stress hydrique accentué depuis deux décennies par l’impact du réchauffement climatique, soit victime d’inondations catastrophiques de façon répétitive sinon cyclique. Ces inondations étant coûteuses en pertes humaines, dégradations du bâti public et privé, mais aussi responsables de graves dommages économiques, notamment pour l’agriculture : récoltes et outils de production.
Il y a là des interrogations à adresser aux pouvoirs publics : les défaillances sont-elles dues aux déficits en matière d’infrastructures de base, aux erreurs humaines de gestion, des ressources en eau et de mesures de prévention des catastrophes naturelles, ou bien à l’absence de stratégie et de bonne gouvernance de la part des responsables ?
La mobilisation des ressources en eau consiste à construire des barrages-réservoirs destinés à faire face aux besoins d’approvisionnement en eau potable de la population et à l’irrigation des cultures. Or, si au bout de deux années consécutives de sécheresse relative, les pouvoirs publics sont amenés à priver d’eau les périmètres irrigués de certaines régions du pays et à “organiser” en été des coupures d’eau potable dans plusieurs quartiers de certaines villes ou villages pendant quelques heures ou journées, il y a là un aveu d’échec. En effet, cela intervient au bout de deux plans décennaux de mobilisation des ressources hydrauliques du pays qui ont abouti, grâce à des centaines de milliards de dinars d’investissements, à construire un réseau de grands barrages-réservoirs, outre l’édification de dizaines de barrages et l’aménagement de centaines de lacs collinaires. Conclusion : on a mobilisé 90% des eaux de ruissellement et malgré cela, on n’arrive pas à sécuriser l’alimentation en eau de la population au bout de deux ans de sécheresse.
Il y a là un problème grave qui mérite un diagnostic approfondi et des solutions efficaces. D’autres constats nous surprennent et nous interpellent.
La construction des barrages dure parfois dix ans : il y a là un dérapage des coûts, des délais et une entorse à l’efficacité, car il y a en principe une harmonisation avec les prévisions d’exploitation des périmètres irrigués.
Quand on écoute les interventions du ministre de l’Agriculture à l’ARP à l’occasion de l’adoption du budget 2018, on est surpris par le fait qu’il y a plusieurs chantiers de barrages “qui n’en finissent pas de se construire”, alors on se propose d’entamer l’édification de plusieurs autres barrages.
Tout en faisant confiance aux ingénieurs, techniciens et experts du ministère qui étudient sur le plan technique et financier ces projets et contrôlent la conformité des travaux confiés aux entreprises privées aux cahiers des charges, on est amené à se poser des questions sur le coût final des travaux par rapport aux prévisions et sur le respect des délais contractuels.
Nous croyons savoir qu’il y a des bassins-réservoirs devenus obsolètes : remblayés par les alluvions charriés par les eaux de ruissellement, ils n’ont presque plus de capacité de stockage. C’est le cas du barrage sur l’oued Mellègue.
Plutôt que de déblayer les débris, les hydrauliciens du ministère de l’Agriculture ont décidé la construction d’un autre barrage en amont : le haut Mellègue.
Les projets de barrages en cours de construction sont déjà nombreux : Saïda, Kalaâ Kébira, Douimes et haut Mellègue, or la progression est très lente déjà. Pourquoi ne pas accélérer le rythme dès lors que les financements sont disponibles ? Mystère.
Voici que trois nouveaux barrages seront entamés en 2018, selon les déclarations du ministre de l’Agriculture à l’ARP : Oued Tessa, Khalled et Raghaï. Parallèlement, les canalisations de transfert des eaux du Nord vers le Centre se poursuivront entre le barrage de l’oued Maleh vers les oueds kamkoum et Tina, mais aussi d’El Haouareb vers Sidi Saâd.
Heureusement que l’édification d’ouvrages de protection des villes contre les inondations est prévue en 2018, avec le rehaussement du barrage de Sidi Saâd, ainsi que l’aménagement de la basse vallée de la Medjerda, du Mornag et d’El Aroussa. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.
L’état de 45% de nos routes reconnaît le ministre de l’Equipement, lors du débat de son budget à l’ARP, n’est pas satisfaisant, ce qui veut dire en clair, que 90% de nos routes sont dans un état de détérioration avancée et de toute façon, non conformes aux normes internationales, si l’on excepte les autoroutes et quelques routes nationales et voies express. Ne parlons pas des routes régionales.
En effet, 55% de notre réseau routier, soit 20.000 km, sont bitumées, mais ont subi des dégradations énormes ces dernières années et n’ont pas été réhabilitées, car cela implique la mobilisation des politiques pour donner l’impulsion et trouver les financements nécessaires et celle de l’Administration pour réaliser les études techniques et préparer les dossiers d’appel d’offres. Or cela a été si peu le cas depuis sept ans.
Il n’y a donc pas de quoi promouvoir le développement régional et l’implantation d’entreprises économiques. Quant aux voies express, destinées à désenclaver les régions défavorisées. On en parle encore depuis sept ans mais ça n’avance pas ou presque.
Les gares routières, notamment celles des louages, comme celle qui permet d’aller au Cap bon, sont dans un état de délabrement prononcé d’anarchie inextricable et d’hygiène déplorable. De quoi renoncer au voyage. Un environnement digne de la cour des miracles dans l’indifférence générale.
Depuis plus de douze ans, on fait payer aux candidats au voyage, un supplément destiné à construire soi-disant, une vraie gare digne de ce nom sur le même terrain offert par la mairie de Tunis, mais rien n’a été fait à ce jour, et on se demande où sont partis les centaines de milliers de dinars collectés.
Il y a encore beaucoup à dire sur l’encombrement et l’anarchie de mise au port de Radès qui n’a pas connu d’extension depuis vingt ans. Il en est de même de la saturation de l’aéroport Tunis-Carthage qui n’est plus digne d’un payas touristique, car il a besoin d’une extension et d’une rénovation urgentes.

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