Inondation: Medjerda, la vallée du bonheur et de la mort

Ne dérogeant pas à la règle, les riverains de la vallée de la Medjerda ont enduré plusieurs souffrances ces derniers jours, suite aux pluies diluviennes qui se sont abattues sur la région du Nord-Ouest où elles ont provoqué, on ne peut plus, par endroit ,des dégâts jugés importants au secteur agricole , principale victime de toutes les intempéries que la région a connues tout au long de son histoire. En dépit des multiples promesses, souvent à la guimauve, exprimées par les différents gouvernements qui ont présidé au sort de la Tunisie depuis son indépendance, ce même calvaire se reproduit, périodiquement, dans la région, surtout en cas de fortes pluies, notamment dans les gouvernorats de Jendouba, Béja et un degré moindre Siliana, et ce en raison de la géographie fragile de ces régions, au demeurant situées en plaine et toujours confrontées au risques d’inondation en cas de fortes pluies, à l’image des giboulées qui ont fortement arrosé tout le Nord-Ouest la semaine écoulée.

La présence de nombreux barrages et autres cours d’eau souvent à forte teneur en apport hydrique, à l’image de la vallée de la Medjerda, oued Mellègue, oued Tassa et oued Bouhertma  qui se conjuguent pratiquement tous tout près de la ville de Boussalem, balayée à plusieurs reprises et pendant plusieurs années par les eaux pluviales, constituent une menace sérieuse pour la sécurité des habitants, voire pour leur survie.

Les citoyens de Boussalem ont beau crié leur misère et la précarité de leurs conditions de logement mais aucun gouvernement n’a réussi à mettre au point une stratégie efficace pour remédier à cette situation intenable

La plus grande menace provient principalement de la vallée de la Medjerda qui prend sa source en Algérie. Elle est alimentée, dans sa progression, par plusieurs autres cours d’eau  et se transforme en cas de  pluies torrentielles en véritable danger pour les habitants de Boussalem, Jendouba, Ghardimaou et Medjez El Bab.

En parallèle, le barrage de Mellègue construit en 1956 n’est plus en mesure de jouer le rôle qui est le sien en matière de retenue d’eau, d’autant plus qu’il a pris des rides et s’est fortement envasé. Aujourd’hui il n’arrive plus a retenir plus d’une centaine de millions de mètres cubes d’eau, contre 180 millions au cours de sa jeunesse.. en cas de fortes pluies, certaines quantités d’eau sont inévitablement libérées du barrage et se déversent directement dans la vallée de la Medjerda, située en aval de l’ouvrage.

Deux autres barrages interviennent aussi dans ce scénario potentiel d’inondation en l’occurrence les barrages de Beni Mtir (73 millions de mètres cubes) et de bouhertma, en amont de Boussalem. Malgré leurs fortes capacités de rétention d’eau, ils peuvent parfois déborder et se transformer en danger pour la population résidant dans la délégation de Boussalem.

Il faut dire que l’on a frôlé, cette année, une nouvelle catastrophe, car la vallée de la Medjerda a débordé, la semaine écoulée, à Ghardimaou, Oued Mliz, Jendouba et à Boussalem, provoquant d’importants dégâts au secteur agricole en ce que l’eau a inondé plusieurs terres agricoles ensemencées, laissant leurs propriétaires dans l’amertume. Ces derniers voyaient, la mort dans l’âme, leur récolte engloutie sous l’eau après avoir nourri bien d’espoirs de voir la campagne agricole aboutir surtout que la saison agricole était annoncée très prometteuse et sous les meilleurs auspices dans ces régions très fertiles où le cumul pluviométrique a atteint parfois des pics imprévus, ce qui a eu pour effet de provoquer ces nouvelles inondations.

A Boussalem, l’eau a envahi, en effet, deux cités résidentielles et les propriétaires des lieux ont été évacués rapidement, en raison de la montée des eaux dans les foyers situés dans ces quartiers jouxtant la Medjerda alors qu’un sexagénaire a, malheureusement péri emporté par les eaux à Henchir Ellaij, à mi-chemin entre Sakiet Sidi Youssef et Kalaat Senan ( gouvernorat du Kef ) suite à des pluies torrentielles  qui ont littéralement balayé la région lors de la journée de jeudi dernier avec des cumuls pluviométriques très élevés en comparaison avec la moyenne habituelle de cette époque.

Dans la foulée et suite aux coupures de plusieurs routes nationales et régionales,  les autorités régionales de Jendouba n’ont trouvé d’autres moyens que  de suspendre les cours dans tous les établissements  scolaires du gouvernorat de Jendouba, excepté Ain Draham et Tabarka, jusqu’au début de cette semaine et ce en raison des risques majeurs qui pèsent sur la sécurité des habitants et des élèves en premier lieu.

A Béja, le topo n’était guère plus reluisant car la ville de Medjez El Bab est demeurée toujours une sources d’inquiétude pour les autorités en ce qu’elle est située tout près de la vallée de la Medjerda et à un niveau où l’oued Khalled vient la renflouer, pour rajouter de nouveaux apports hydriques mais la vallée a légèrement débordé, cette fois-ci sans pour autant constituer une grande menace pour la sécurité de ses riverains. La ville n’a, certes, pas été envahie par l’eau mais certaines cités ont été menacées par les eaux et les habitants sont restés deux nuits durant sur le qui-vive. Cependant deux personnes ont été évacuées in extrémis à Béjà par les services de la protection civile alors qu’elles allaient être emportées par les eaux qui ont envahi leur foyer.
Le nouveau gouvernement de Habib Essid  a décidé d’envoyer sur place, à la demande des élus de la région de Jendouba, des responsables gouvernementaux pour s’enquérir de la situation dans cette région et prendre les mesures qui s’imposent du moins celles d’urgence. Cependant, saura-t-il enfin prendre les mesures salutaires pour endiguer définitivement ce phénomène  qui hante la population du Nord-Ouest chaque fois qu’il vient à pleuvoir à torrent  dans la région? L’espoir est permis même si l’on sait que les chemins de l’enfer sont souvent  pavés de bonnes intentions.

J.T

 

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