Jeune démocratie en péril

Derrière la prolifération de la menace terroriste qui sévit dans notre pays, dont le point d’orgue a été l’attentat sanglant de Sousse qui a pris pour cible des victimes innocentes qui ont choisi notre pays pour passer leurs vacances, se cache l’obstination des groupes terroristes à faire avorter l’expérience démocratique naissante en Tunisie et à plonger le pays dans la violence aveugle, la peur et l’anarchie.

A la faveur du chaos qui sévit en Libye, de la recrudescence des menaces provenant de la frontière sud difficilement contrôlable, des risques de plus en plus récurrents d’infiltration de groupes terroristes et d’armes, la Tunisie est à la croisée des chemins, son processus démocratique reste encore fragile et l’Etat, affaibli, risque de s’effondrer si la situation sécuritaire arrive à empirer et les difficultés économiques et sociales viendraient s’aggraver encore plus.
En butte à une agitation sociale continue, à des querelles politiques sans fin, des menaces terroristes et sécuritaires qui ont gagné en intensité, des difficultés économiques et des problèmes sociaux de plus en plus insoutenables, la Tunisie est au milieu du gué.
Aujourd’hui, elle ne supporte plus de nouvelles secousses et, encore moins, d’autres tragédies en relation avec la nébuleuse terroriste dont le rayon d’action s’est étendu des régions montagneuses de l’Ouest aux grandes zones urbaines dont le mode opératoire nous rappelle les sinistres exactions commises un peu partout en Irak, en Syrie et en Libye pour faire régner la peur, la mort et détruire l’ordre social.
En décrétant l’état d’urgence, le Président Béji Caid Essebsi savait que cette décision sera grave de conséquences et qu’elle risque d’altérer quelque peu l’image qu’on a voulu promouvoir de la Tunisie post-élections 2014. La question qui se pose est encore plus lancinante, aurait-il pu agir autrement ?
Face aux défis, plus que jamais insistants, qui risquent de porter atteinte à la sécurité du pays, à son unité, à son modèle de société et à son processus démocratique, la marge de manœuvres est devenue très étroite. Seule la mobilisation générale et la prise de conscience de la gravité des dangers qui guettent le pays sont à même de lui permettre de sortir de la mauvaise passe, d’éviter le pire.
Sans verser dans un pessimisme exagéré, l’on peut dire qu’aujourd’hui, notre destin est entre nos mains et il nous revient, à nous tous, de défendre notre démocratie, notre République, notre modèle de société par une mobilisation effective qui bannit tout laxisme et toute forme de surenchère qui ont, jusqu’ici, empesté la vie politique, économique et sociale.
Une mobilisation qui implique une prise de conscience des risques qui pèsent sur la Tunisie, un engagement résolu à orienter tous les efforts et moyens pour endiguer cette menace, une acceptation de consentir des sacrifices au service du pays et un consensus national qui permet de mettre un terme à une situation de désobéissance civile qui a duré plus de cinq mois et qui risque de tout emporter avec elle.
A un moment où, les véritables desseins des terroristes sont devenus connus par tous et que les masques sont tombés, notre responsabilité à nous Tunisiens, dans cette phase cruciale que connaît le pays, est manifestement entière. L’heure est venue pour que les partis politiques, la société civile, les organisations nationales et les élites se défassent de leur nonchalance assassine et assument pleinement leur responsabilité. En effet, au regard d’une situation économique et sociale désastreuse et de risques terroristes de plus en plus présents, toute défaillance mènerait le pays à l’inconnu, préparerait le lit à ces groupes pour semer la terreur et la confusion dans le pays et annoncerait la mort de l’Etat civil.
Mobilisation signifie retour au travail, mettre un terme à la fièvre destructrice de l’économie et de l’entreprise, prendre la pleine mesure des défis qui se pointent et faire les bons choix, ceux-là même qui participent à renforcer le sentiment d’unité nationale et à préserver l’expérience démocratique de tout retournement. Pour ne pas signer l’arrêt de mort de ce processus, qui a suscité bien d’intérêt à travers le monde et de rancœurs chez les obscurantistes qui ne jurent que par la destruction de ce rêve que les Tunisiens ont délibérément choisi, on n’a qu’un choix à faire et une responsabilité à assumer.

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