« En Tunisie, le secteur de l'agriculture biologique a connu une véritable évolution durant ces dernières années. Il contribue annuellement à hauteur de 700 MDT dans les exportations. Il compte actuellement, plus de 9 mille intervenants contre seulement 300 au début des années 2000. Ainsi, les superficies de l'agriculture biologique ont atteint 300 000 hectares contre 16 000 auparavant. Quant aux produits biologiques, ils ont atteint un volume de un (1) Million de tonnes contre 4 Mille tonnes auparavant. », a annoncé Samia Maamar, la directrice générale de l'agriculture biologique au ministère de l'Agriculture, des Ressources hydrauliques et de la Pêche, lors de l’événement « BIO DAY Edition 2023 » organisé, ce mardi 16 Mai 2023, à Hammamet à l’initiative de ECOCERT, leader mondial de la certification des produits biologiques.
La reconnaissance d'équivalence est un atout
Selon elle, cette évolution a poussé le ministère de l’Agriculture à réfléchir autrement et à placer ce secteur d’activités au centre de ses priorités, appelant ainsi les agriculteurs et les sociétés agricoles à en profiter au regard des potentialités sur les marchés internationaux. Et d’expliquer que la Tunisie est le seul pays africain et arabe qui bénéficie de la reconnaissance d'équivalence avec l'Union Européenne pour l'exportation des produits biologiques et ce depuis 2009. Il s’agit, selon elle, d’un privilège pour promouvoir les exportations et mieux se positionner à l’échelle internationale.
La responsable au ministère de l’Agriculture a en outre assuré que même sur le marché local, les mentalités ont clairement évolué et le Tunisien cherche aujourd’hui le produit biologique et pense de plus en plus à sa santé et à l’environnement, faisant remarquer à ce propos qu’il s’agit de l’une des raisons ayant poussé le ministère de l’Agriculture à mettre en place un ensemble de mécanismes pour promouvoir ce secteur porteur.
Selon elle, des sections chargées de l’agriculture biologique ont été mis en place au sein des administrations régionales relevant du ministère de tutelle. Elles sont chargées de former, d’encadrer et d’accompagner les agriculteurs sur les techniques de production, le marché des produits biologiques et aussi sur les opportunités d’exportation.
Samia Maamar a fait savoir dans ce cadre qu’il existe 5 organismes de contrôle et de certification dont quatre étrangers et un seul Tunisien. Les travaux de ces structures sont annuellement contrôlés par le ministère de l’Agriculture. C’est une forme d’appui à la crédibilité du produit tunisien, selon ses dires.
Une nouvelle loi à négocier
Elle a toutefois souligné que l’Union européenne a mis en place une nouvelle loi où il n y a plus cette reconnaissance d'équivalence et qu’en vertu de cette nouvelle disposition, la Tunisie entrera prochainement en négociation avec l’UE pour pouvoir bénéficier des accords commerciaux. « Nous avons jusqu’à 2026 pour négocier», a-t-elle encore dit.
Pour y aller, elle a indiqué qu’un ensemble de projets on été mis en œuvre. « Il ne suffira pas aujourd’hui de parler d’huile d’olives ou de dattes biologiques mais plutôt de l’agriculture biologique comme levier de développement économique des régions car cela ne touche pas l’agriculture seulement mais aussi le tourisme, les énergies renouvelables l’artisanat et l’industrie.», a-t-elle dit.
Elle a aussi annoncé la création de bio-territoires : « Maintenant, nous avons trouvé les financements nécessaires au lancement de ce projet dont l’étude a été achevée depuis bon nombre d’années », a-t-elle précisé.
Outre les bio-territoires, elle a évoqué la biotechnologie pour développer à la fois l’agriculture et le tourisme : « Nous voulons faire évoluer les mentalités à l’égard de ce secteur surtout dans les structures d’appui comme les municipalités ou encore les gouvernorats pour appyer les gens qui veulent investir dans le tourisme biologique ou l’agrotourisme qui est une forme de tourisme qui relie les touristes à l'agriculture », a-t-elle dit.
Le troisième projet c’est faire de l’agriculture biologique une solution pour atténuer les changements climatiques.
La BIO pour lutter contre les pollutions
De son coté, Philippe Thomazo, Directeur général de Ecocert, leader mondial de certification biologique, présent en Tunisie depuis 2009, a assuré que la certification biologique est un marché qui a un grand potentiel de développement dans notre pays : « La Tunisie a sa propre réglementation biologique qui est très adoucie à celle de l’UE et qui fait de la Tunisie, un des pays pionniers en Afrique. C’est le premier pays africain qui s’est doté de sa propre réglementation », a-t-il affirmé.
Il a souligné l’intérêt de cette rencontre en Tunisie permettant d’échanger les opinions avec tous les intervenants du secteur mais aussi avec les institutions de l’Etat, mettant l’accent sur l’importance des produits biologiques pour lutter contre les pollutions des eaux et des sols et résoudre les problèmes des changements climatiques.
Une certification Bio pour le textile
Quant à elle, Imen Jaouadi, directrice Ecocert Tunisie a annoncé la mise en place, cette année, de la certification Bio dans le secteur du textile et habillement, faisant remarquer à ce propos qu’il ya une forte demande de la part des donneurs d’ordre qui sont les grandes marques internationales pour tourner vers l’Afrique du Nord, entre autres, la Tunisie : « Ilya une forte demande pour la certification des produits bio en Tunisie. », a indiqué Jaouadi, avant d’estimer que cette certification est dans l’intérêt des entreprises tunisiennes du textile pour augmenter leurs exportations et mieux se positionner en Europe.
Jaouadi a en outre indiqué qu’aujourd’hui, il n’ya pas vraiment beaucoup de choix pour la Tunisie : « les gens du secteur doivent s’aligner car même pour les produits conventionnés, il ya une limite. Il ya par contre une grande opportunité à saisir si nous voulons trouver un marché très intéressant à nos produits non seulement en Europe. », a-t-elle assuré.
Et d’expliquer que la certification BIO est considérée comme une garantie ou un visa pour exporter sur les marchés de l’UE comme la France, l’Allemagne, la Suisse ou pénétrer de nouveaux marchés comme le Brésil, la Chine et le japon.
Pour rappel, la Tunisie est le premier exportateur de produits bio en Afrique et dans le monde arabe, avec plus de 60 Mille tonnes de produits exportés. L’huile d’olive, les dattes, les produits maraîchers et les plantes aromatiques et médicinales constituent les principaux produits exportés. L’huile d’olive et les dattes biologiques ont généré à elles seules un chiffre d’affaires de plus de 700 MDT en 2021.
Khadija Taboubi