La bataille des chiffres

Entre les chiffres annoncés par  ILEF (Observatoire de Protection du Consommateur) à propos du cancer en Tunisie et les démentis du ministère de la Santé, où se situe la réalité du cancer en Tunisie ?

 

Il faut tout d’abord dire que la polémique concerne l’augmentation de nouveaux cas de cancer enregistrés  depuis 2007 jusqu’à mai 2013. Selon ILEF «Le nombre de personnes atteintes de cancer a augmenté de 38,5 % entre janvier 2012 et mai 2013 par rapport aux taux enregistrés entre 2007 et 2010, avec 1790 nouveaux cas enregistrés. 

Le ministère rectifie «l’évolution annuelle du nombre de personnes atteintes de cancer ne peut pas dépasser 1%.»

 

Des chiffres alarmants

En Tunisie il y a entre 10.000 et 12.000 nouveaux cas de cancer (tous types confondus) chaque année. Ce chiffre est  donné par l’OMS (Organisation mondiale de la santé) dans son rapport publié à l’occasion de l’élaboration d’une stratégie  de coopération OMS–Tunisie 2010–2014, à propos du cancer. 

Il  n’y a pas si longtemps on parlait de 9000 nouveaux cas puis de 10 000 (5900 pour le sexe masculin et 4400 pour le sexe féminin), selon les données publiées des registres du cancer en Tunisie. Aujourd’hui, on a dépassé les 12.000 (certains praticiens parlent de 15.000.)  

Entre 9000 et 12.000 la différence est de 3000, c’est déjà 33,33% non ? On n’est donc pas loin des chiffres fournis par ILEF.

Cette bataille des chiffres est l’occasion de rappeler que la stratégie de lutte contre le cancer a sérieusement besoin d’être amplifiée en Tunisie. La mise en œuvre du Plan national de lutte contre le cancer doit figurer parmi les priorités  du ministère de la Santé publique. Est-il normal que jusqu’à présent personne ne puisse avancer de chiffres exacts sur le nombre de personnes ayant un cancer dans notre pays ?

 

Trois registres des cancers

Dans les pays avancés, des registres sont mis en place pour fournir des indicateurs épidémiologique, établir des politiques de prévention, suivre les tendances de la maladie et évaluer les interventions. En Tunisie, trois registres de cancers ont été établis,  mais seul  le registre  du nord, qui répond aux normes requises , constitue la principale source d’informations sur les cancers en Tunisie.  Malgré certaines limites,  les données générées par ce registre permettent de dresser l’état des lieux du cancer en Tunisie et d’en mieux saisir les différentes parties. 

Malheureusement,  les cancers sont encore découverts  à un stade très avancé, souvent de métastases dont la prise en charge est extrêmement lourde au plan médical et économique. L’OMS a estimé que «la Tunisie a des taux modérément plus élevés que ceux  des pays en développement comparables  au point de vue socioculturel». Elle ajoute que le  programme national de prévention et  de dépistage  du cancer en Tunisie est déficient sur le plan opérationnel. 

Les localisations les plus fréquentes des  cancers chez l’homme sont le cancer du  poumon, suivi du cancer de la vessie puis,  selon les régions, le cancer de la prostate ou  les cancers colorectaux. Chez la femme, le  cancer du sein arrive en tête suivi, selon les  régions, des cancers du col de l’utérus ou des  cancers colorectaux.

Toujours selon le rapport de l’OMS, le nombre de cas de cancer chez les  hommes, sera multiplié par 3,5 en 25 ans (entre 1998  et 2024) et par 2,7 chez les femmes.

 

Développer les plans d’action

Le cancer pose un grand défi à la santé publique : il est l’une des premières causes de mortalité, il coûte très cher à l’État et aux ménages. Les inégalités sociales face à cette  maladie constituent un autre aspect dont il faut tenir compte dans le Plan national.

Les actions programmées dans ce plan s’articulent autour de trois grands axes : la prévention primaire, la prévention secondaire et la prise en charge des malades.

La prévention primaire comporte des interventions pour réduire les facteurs de risque des cancers, comme le tabac, le déséquilibre alimentaire, l’exposition au soleil, les infections sexuellement transmissibles, la pollution atmosphérique, etc.  

La prévention secondaire, quant à elle, se focalise sur le dépistage des cancers que l’on peut effectuer grâce à des moyens et méthodes dont l’efficacité est  prouvée.   

Le véritable enjeu pour la Tunisie est maintenant de mettre en œuvre les stratégies élaborées et de développer des plans d’action actualisés et pertinents.

Samira Rekik

 

Le cancer est en Tunisie, deuxième cause de mortalité

18.7% parmi l’ensemble des décès chez les hommes et 14.7% parmi l’ensemble des décès chez les femmes.

En Tunisie, le cancer du poumon est le cancer  le plus fréquent chez l’homme et  le cancer du sein est le  premier cancer chez la femme.

Chaque année on dénombre 400 nouveaux cas de cancer chez les enfants.

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