La BIRD :Promouvoir l’emploi ou maintenir les privilèges ?  

 

Le centre de veille et d’intelligence économique de l’IACE, présidé par Walid Bel Haj Amor, a organisé un atelier de réflexion à propos d’une étude menée par des experts de la Banque mondiale à propos des obstacles à la création d’emplois dans la région MENA avec la participation de Mme Gray, directrice du bureau de la Banque mondiale à Tunis  et en présence des auteurs de l’étude.

Focus sur le cas de la Tunisie.

Il faut rappeler d’abord que le taux élevé du chômage est à l’origine de la Révolution en Tunisie et que ce taux ne s’est pas amélioré malgré la réalisation d’un taux de croissance économique de 4 à 5% sur le long terme avant 2010. C’est qu’il y a des obstacles structurels et des dysfonctionnements d’ordre réglementaire relatifs au modèle économique en vigueur dans notre pays.

L’objectif consiste à les diagnostiquer en vue d’apporter des réformes appropriées et des solutions adéquates au problème de l’emploi, compte tenu des tendances démographiques.

Radioscopie de la création d’emplois

Le paradoxe dans notre pays c’est que ceux qui sont les mieux outillés pour trouver un emploi et apporter une valeur ajoutée, à savoir les jeunes diplômés du supérieur, sont ceux qui ont moins de chance pour trouver un emploi.

Selon l’étude de la BM, 37% des emplois créés le sont dans des entreprises qui comptent moins de 5 salariés.

Les entreprises qui comptent entre 5 et 9 emplois ont beaucoup de difficultés à se développer.

80% des entreprises disparaissent au bout de quatre ans.

10% des emplois créés ont été réalisés par des entreprises qui comptent plus de 1000 salariés, 65% des entreprises qui accèdent au pouvoir politique sont actives dans des secteurs interdits aux IDE.

Selon les statistiques entre 1996 et 2010 les start-up ont créé 500.000 emplois qui ont engendré des entreprises de différentes tailles en Tunisie.

L’handicap de notre pays c’est que nous créons 1,2 SARL pour 100 personnes en âge de travailler contre 4 en Bulgarie par exemple, alors que cette dernière est loin de constituer un record ou une performance en la matière. Les sociétés employant moins de 5 salariés constituent 40% du tissu entrepreneurial.

Il a été constaté qu’il y a une grande lenteur dans le processus de croissance de la productivité dans les entreprises nouvellement créées à cause de la persistance de plusieurs obstacles dont la protection des entreprises contre la concurrence. Ce sont donc les politiques publiques qui entravent la croissance.

 

Persistance des privilèges accordés aux entreprises “politiquement connectées”

La BM appelle politiquement connectées en Tunisie les entreprises économiques possédées et/ou dirigées par des personnes anciennement apparentées à l’ancien régime et qui ont été confisquées par l’État après la Révolution.

Ces sociétés bénéficient de divers avantages dont l’accès à des lots de terrains industriels et des facilités comme un accès plus facile aux crédits bancaires. Les secteurs les plus juteux de l’économie comme certaines activités d’importation soumises à des quotas ou à des agréments leur étaient réservées.

Cela constituait des obstacles majeurs aux nouveaux venus pour entrer sur le marché toujours selon les conclusions de la Banque mondiale.

Cela a engendré également une lenteur des gains de productivité dans les entreprises, vu que c’est la concurrence qui est à l’origine de l’amélioration de la productivité.

Ce sont les politiques publiques qui sont responsables de la situation. Par exemple l’administration qui refuse d’octroyer des agréments pour l’implantation d’hypermarchés constitue un obstacle à la croissance, car il s’agit d’un secteur porteur qui crée des emplois et tire la croissance industrielle.

Quelles solutions pour promouvoir l’emploi ?  

Alors que faut-il faire pour promouvoir l’emploi dans notre pays ? Quelles sont les entreprises et les secteurs d’activité qui tirent vers le haut les recrutements ?

D’après la Banque mondiale, il faudrait réviser les lois qui régissent le marché de l’emploi pour y apporter des assouplissements relatifs aux effectifs de travailleurs.

Il faudrait surtout abolir les privilèges accordés aux entreprises politiquement connectées qui empêchent la concurrence d’émerger et aux nouvelles entreprises de s’imposer sur le marché.

Parmi ces privilèges on peut citer les quotas d’importation accordés aux uns et non aux autres, l’accès au crédit bancaire, les agréments et les autorisations accordées par les administrations sur présentation de dossiers…

Il y a également l’accès aux lots de terrains à usage industriel situés dans des sites stratégiques. L’administration, qui se substitue parfois au pouvoir politique dispose d’un pouvoir discrétionnaire important pour favoriser les uns et faire obstacle aux autres. Les politiques publiques doivent accorder une égalité de chances et un traitement égalitaire pour toutes les entreprises.

Il y a également un climat des affaires à instaurer : favorable et incitatif à l’investissement.

Ridha Lahmar

 

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