Avec le temps, tout s’en va et Ramadan n’est plus là. Cependant, perdure le souvenir du meilleur et du pire. Celui-ci, dur à cuire, incrimine les brutes promptes à la dispute. Chamailles et colères à répétition émaillent le mois de Ramadan.
Quelle est donc la raison de pareille implosion ? Le sens commun l’impute à la hchicha, l’herbe, autrement dit le tabac fumé ou aspiré à travers le narguilé iranien alter-ego du calumet de la paix indien.
Le manque de l’horrible drogue durant le jeûne où doivent prévaloir l’abstinence et la prière serait au principe de la colère mortifère. Sans aucun doute, mais deux autres éléments d’explication demeurent à exhumer tant « il n’est de science que du caché », soutenait Gaston Bachelard, l’épistémologue renommé.
Le premier de ces critères explicatifs a trait au prétexte fourni par le contexte. Je me fâche à tout moment, vu la hchicha de Ramadan reconnue par chaque musulman. Le second élément de l’élucidation relève de la nouvelle piste à suivre pour découvrir la source ultime de la dispute. Elle pointe vers un lien construit entre la surconsommation et la sexualité. Une fois la panse pleine de couscous djerbien, de paella italienne et de baklaoua tunisienne, la réplétion gastrique surexcite le désir diabolique. Hélas, après la rupture du jeûne et le shour, le réveil matinal expose à maîtriser l’envie de grimper au septième ciel sous peine de rompre le jeûne incompatible avec la jouissance propice à la délivrance. Ainsi mis sous pression, le pauvre jeûneur décharge sa mauvaise humeur pour un oui, pour un non. Et Ramadan étend le champ de la perpétuelle confrontation.
Le manque ramadanesque a trait à la drogue et au désir de jouir.
Mais nous occultons ce grand secret tout comme si nous étions asexués.
« Hypocrite lecteur, mon semblable, mon frère », écrit Baudelaire. Mais les saints peinent à cacher ce destin commun. Tout comme chaque humain, l’abbé Pierre n’est guère insensible à la manière d’une pierre. Gros mangeur et grand violeur, son cas de figure oriente l’investigation vers les méprises de l’Église taht iljbayib tra laâjayeb. Cloîtrées, à vie, au couvent, les repenties n’ont que Dieu pour amant. « Mais il se manifeste si peu souvent », me disait le préhistorien Leroi Gouran, lors de la fouille menée à Percevent. Aujourd’hui, avant de nous snober, Ramadan lègue une série de prescriptions. Parfois nimbées de contradictions.
Outre le dérapage du gaspillage avec les déchets augmentés de 3%, un signal paradoxal oppose la tendance à grossir et l’exigence du désir. Un dilemme confronte la raison à la passion. A ce propos, le personnage campé au sommet de l’autorité affronte une situation plus compliquée. Comment gérer, à la fois, sa personne et la société ?
Au moment où il prétend gérer le monde entier, Trump devient la risée de son mépris affiché envers la diplomatie : « Je viens d’avoir un entretien téléphonique très positif avec le premier ministre canadien ». Celui-ci réplique aussitôt : « Il n’en est rien. Nous allons taxer fortement les produits américains dès le 2 avril ». La Chine et la Russie observent le président des États-Unis, cet imbécile colosse aux pieds d’argile. Il veut prendre Gaza au nom de l’Evangile.
Mais où commence le profane et où finit le sacré ? « Min ayna tabtadi wa ila ayna tantahi », écrivait Ibn Rushd dans le Livre Tafsir ma baâd attabi3a.
Maintenant, au Moyen-Orient, cela commence par l’invasion et cela finit par « Mort à Israël, mort à l’Amérique » satanique. A l’œuvre partout et surtout au fil des magouilles politiques, la discorde émaille, aussi, les rapports établis entre les éléments d’un même gouvernement. Dans son livre anecdotique « Sur le chemin de Bourguiba », Driss Guiga narre la trajectoire de ses déboires et de sa démission provoqués par le parti pris de Mzali. Et Sadok Ben Jemaâ, jouant le tout pour le tout, enfonce ce clou : « Il y a une logique, nous avons échoué ».
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