En permettant à un génocidaire de s’exprimer depuis sa tribune, l’Organisation des Nations unies a perdu le peu qui reste de sa crédibilité. Le premier ministre israélien, Netanyahu, condamné par le procureur général de la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, a profité de l’occasion pour menacer et humilier l’organisation onusienne : «Je vous le dis… l’ONU est considérée…comme rien de plus qu’une force méprisable». Un cinglant camouflet qu’on pourrait traduire par quelque chose comme «le rôle de cette organisation, on n’en veut plus. Son existence non plus». Cela a causé tant de tort à l’ordre mondial que même Hitler, en pleine folie, n’aurait pas fait mieux.
Il faut regarder les choses en face : le monde est confronté à deux nouvelles maladies incurables : la récente hiérarchisation de l’ordre mondial et l’effondrement des Nations unies et son système. La crise est désormais publique. Elle est opérationnelle avec le désastre au Moyen-Orient et le très dangereux face-à-face entre l’Occident et la Russie en Ukraine. Elle est stratégique avec la dislocation du système de sécurité mondiale et ses institutions. Elle est politique par la mise en cause de l’ordre bâti en 1945 et la percée des Etats voyous. L’enjeu, dans ce monde dominé par la logique de puissance, est immense. Les États-Unis et leur allié sanguinaire, Israël, méprisent l’Organisation des Nations unies et ses institutions, dénoncent le droit des peuples colonisés à l’indépendance et prônent l’occupation des territoires usurpés et l’extermination de leurs populations. Leurs dirigeants affichent même un faible pour les guerres, les massacres et les génocides. Une situation effrayante d’un monde aveugle, dans lequel destruction et hypocrisie se contrebalancent affreusement avec leurs millions de victimes qui ont transformé en charnier le premier quart de ce vingt et unième siècle. Les attaques contre le droit international n’ont jamais été aussi criantes. L’ordre mondial subit une érosion inquiétante, qui se manifeste dans l’image calamiteuse des institutions onusiennes, humiliées, ridiculisées et qui cherchent d’abord à se protéger. Bref, un désastre majeur pouvant encore évoluer dangereusement au regard d’un nouveau retournement du risque géopolitique dans la mesure où l’Organisation des Nations unies et ses institutions apparaissent comme les principales sources d’incapacité et d’impuissance alors que, par effet contraste, des Etats voyous, comme Israël, représentent l’ordre de la force.
La question, maintenant, est de savoir si cette décadence totale est une phase transitoire vers la reconstruction d’un nouvel ordre mondial, comme celui de l’après-guerre, ou si elle est porteuse d’un chaos encore plus désastreux.
L’Organisation des Nations unies doit retrouver une raison d’être, dans un monde tourmenté qui met à rude épreuve les valeurs humaines et le droit international sur lesquels elle est fondée. Il faut arrêter de singer les discours de la justice et de la paix par des Etats voyous, des puissances qui protègent les génocidaires et les criminels de guerre et des institutions impuissantes. L’organisation onusienne doit créer les conditions de son autorité morale et juridique pour défendre la justice, la liberté et la paix, car il est question de respecter le droit international, de se conformer à ses règles, à supposer que ces règles soient claires et ne permettent pas l’impunité. Il ne faudrait pas que les peuples opprimés concluent qu’elle est incapable de répondre à leur droit à l’indépendance et à la liberté.
On entend souvent des voix qui font innocemment rêver d’une nouvelle et équitable gouvernance mondiale, mais franchement, elle n’est pas pour demain.
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