La lettre de Ridha belhaj, depuis sa prison, au bâtonnier Hatem Mziou !

Le membre du comité de défense des hommes politiques détenus dans l’affaire dite de « complot contre la sûreté de l’Etat », Islem Hamza, a publié, ce jeudi 4 janvier 2024, sur sa page Facebook une lettre adressée au bâtonnier des avocats tunisiens, Hatem Mezioude, ainsi qu’aux membres du BE de l’Ordre,  par l’avocat Ridha Belhaj.
Ci-après le texte intégral de cette lettre :
“En cette occasion de la commémoration du 13e anniversaire de la révolution et du 40e anniversaire des émeutes du pain , je m’adresse en particulier à tous mes collègues pour exprimer amèrement le silence suspect du bâtonnier et de mes collègues face à l’oppression et au abus que je subis, ainsi que mes compagnons de profession, des cadres d’Etat et des dirigeants de différents courants politiques.
Nous avons été soumis, pendant dix mois, à une détention pour des accusations infondées sans preuves ni fondements. Durant cette période, nous avons été témoins de toutes les formes de violation des droits fondamentaux garantis par la législation tunisienne et le droit international des droits de l’homme. Des perquisitions nocturnes répétées de nos domiciles, la détention, l’émission de mandats d’arrêt sans audience, l’arrestation d’avocats en plein exercice de leurs fonctions, l’invention des accusations basées sur des publications sur les réseaux sociaux, utilisées comme prétexte pour l’emprisonnement.
Le pire, c’est que tout au long de cette période, tes collègues qui t’ont précédé et qui ont lutté pour l’adoption de la loi sur les avocats et l’instauration de l’immunité professionnelle, se trouvent maintenant injustement emprisonnés, sans entendre la moindre réaction de votre part.
Vous constatez, écoutez et regardez les pressions exercées sur le pouvoir judiciaire et les juges par des menaces et des intimidations, ainsi que les violations flagrantes des droits des accusés, comme les actes de violence et de diffamation dans des discours officiels et au plus haut niveau, sans que vous n’ayez recours à la loi pour demander l’abandon complet de l’affaire et la libération des détenus. car cela représente une ingérence flagrante du pouvoir exécutif dans le déroulement des enquêtes, orientant et annulant complètement l’indépendance de la justice et les conditions d’un procès équitable.
Vous constatez et observez également une situation sans précédent, où les avocats qui assurent la défense dans l’affaire sont interdits de s’exprimer dans les médias, et certains d’entre eux sont même soumis à une enquête en raison de cette interdiction, tout cela pour occulter la vérité au public. Et malgré cela, vous restez silencieux, sans réagir pour défendre l’honneur et la dignité de l’avocat, comme si cela ne vous concernait pas.
Monsieur le Bâtonnier, l’avocat n’est pas simplement une profession pour gagner sa vie, car la défense de la liberté d’expression, de la liberté d’opinion, de l’action politique, et le respect de la primauté du droit sont au cœur de ses missions et de son histoire. De nombreux leaders du mouvement national ont émergé de ses rangs, tels que le leader Habib Bourguiba et le leader Salah Ben Youssef, qui ont dirigé la résistance contre le colonialisme, ainsi que d’autres qui ont assumé d’importantes responsabilités gouvernementales et ont rendu d’énormes services au pays, tels que le regretté  Fathi Zouhir, Mansour Chefi, Abdessattar Ben Moussa, et bien d’autres. Certains d’entre eux sont toujours parmi nous et nous leur souhaitons une bonne santé, ils n’ont jamais hésité à remplir leur devoir en s’opposant aux dérives du pouvoir après l’indépendance, et leurs plaidoiries sont devenues des références dans la défense des droits et la résistance à l’injustice.
Je tiens à préciser que je m’adresse à vous en tant que bâtonnier non pas pour une quête de faveurs ou une tentative de solliciter des privilèges dans l’application de la loi. Tout comme mes collègues détenus arbitrairement, je suis convaincu que notre innocence de toutes les accusations portées contre nous sera évidente. Je vous exhorte simplement à respecter le devoir de la profession d’avocat et à défier toute interférence illégale qui pourrait porter atteinte aux droits de la profession et à la dignité des avocats. Ce que nous vous demandons, c’est de vous acquitter de la mission confiée à la tête du barreau en respectant l’intégrité de la profession. Je vous rappelle que chacun de nous portera le fardeau de ses actions, et que l’histoire sera la meilleure des juges ».
Rappelons que l’avocat et membre du Front de salut, Ridha Belhaj, a fait l’objet, le 25 février 2023, d’un mandat de dépôt  qui a été émis par le juge d’instruction auprès du pôle antiterroriste. Il fait partie d’un nombre de personnalités politiques  telles que Jawhar Ben Mbarek, Ghazi Chaouachi, Khayam Turki et Abdelhamid Jelassi, incarcérées depuis des mois sur fond d’implication dans l’affaire dite « complot contre la sûreté de l’Etat ».

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