Qui finance les services de santé dans le pays? Combien d’argent est dépensé pour la santé? Quelle est la destination de cet argent? Quels biens et services ces ressources permettent- elles d’acheter? Qui fournit ces biens et services? Qui bénéficie de ces biens et services? A toutes ces questions que nous nous posons tous, le ministère de la Santé a essayé de répondre en publiant un rapport sur les comptes de la santé en Tunisie durant la période 2012-2013.
Les précédents comptes de la santé de la Tunisie remontent aux années 2000 (concernant la période 1997-1998) et 2007 (pour la période 2004-2005). Il s’agit de deux études réalisées par l’équipe de recherche de l’Institut national de la santé publique.
Comptes de la santé en 2012-2013
Les dépenses totales de santé pour cette période ont coûté au contribuable 5362,7 millions de dinars ( X 2,4 par rapport à 2005) soit 7.1% du Produit Intérieur Brut (PIB) (+1.2 point de pourcentage par rapport à 2005). Autrement dit, le Tunisien consomme en moyenne : 493 dinars par an pour les services de santé ( X 2.3 par rapport à 2005)
Dans la région EMRO, seuls la Jordanie et le Liban font mieux que nous avec respectivement 9,8 et 7,4% de leur PIB, pour les dépenses de santé. Au Maghreb, nous sommes en tête de classement suivi loin derrière par le Maroc et la Mauritanie avec 6,4% du PIB pour chacun de ces pays. Pour mieux se situer avec les pays européens, la France dépense 11,7 et l’Italie 9,2.
Qui paye pour les dépenses de santé ?
La part la plus importante du financement des dépenses de santé provient directement des ménages (37,5%). La CNAM contribue pour plus du tiers (34,9%). La contribution du ministère de la Santé est d’environ un quart (26,3%). Quant aux assurances privées et aux mutuelles, leur contribution est minime.
Les dépenses directes des ménages sont élevées : 37.5% des dépenses totales de santé, même si elles ont diminué par rapport aux autres années. ( – 5.4 points en pourcentage par rapport à 2005).
A ce propos rappelons que l’OMS insiste pour que ces dépenses directes des citoyens soient inférieures à 20% pour éviter le risque d’appauvrissement.
Les ménages tunisiens payent dans 91% des cas dans le secteur privé avec 37% pour les frais de pharmacies, 30% en frais de cliniques, 10% en honoraires des médecins et dentistes et 8% en laboratoires et radiologie.
Où sont dépensés les fonds ?
Le citoyen tunisien, le ministère de la Santé, la CNAM sont donc les principaux financeurs des dépenses de santé. Mais comment sont distribués tous ces fonds ? Selon le rapport de 2012-2013, 5% vont aux services pour la collectivité (administration et programmes nationaux), 39% biens médicaux (médicaments, produits pharmaceutiques, prothèses, etc.), 2% soins de longue durée (réhabilitation et maladie longue durée), 54% soins ambulatoires et hospitaliers (y compris les services auxiliaires: imagerie, radiologie, etc.) Au vu de ces chiffres, on est en droit de se demander s’il n’y a pas une surconsommation (ou surprescription) de biens médicaux?
Quel est le poids du secteur privé pour chacun des financeurs ?
On a dit plus haut que 91% des dépenses directes des ménages vont au secteur privé. Mais la CNAM est également un bailleur de fonds puisque 45% de ses dépenses vont au secteur privé (alors que seulement 35% des bénéficiaires de la CNAM sont dans les filières privées)
Les dépenses de la CNAM par prestataire (2013) sont comme suit : 28% secteur public, 45% secteur privé , 20 % médicaments spécifiques (CNSS), 6% Administration, 1% soins à l’étranger
Les dépenses dans les hôpitaux publics
Combien coûte l’hôpital à l’Etat ? La 1ère ligne (dispensaires et hôpitaux de circonscription) bénéficie de 26% des dépenses de la santé avec 360.6 MDT en 2012 et 420.6 en 2013, ce qui représente une évolution de 17%
La 2e ligne, constituée par les hôpitaux régionaux, bénéficie de 25% des dépenses de santé avec un budget de 337.6 MDT en 2012 et 380.6 en 2013. L’amélioration est de 13%.
La 3e ligne 49% (établissements publics de santé, ex CHU devenus EPS) a consommé 776.1MDTen 2012 et 840.2 en 2013, soit une augmentation de 8%
Les comptes de santé, à quoi ça sert ?
C’est toujours intéressant de savoir combien un pays dépense-t-il pour la santé de ces citoyens ? Les comptes de la santé sont également un outil conçu pour aider les décideurs politiques à mieux comprendre et évaluer la performance du système de santé.
Conclusion
Dans ce dernier rapport, on constate que la part des dépenses directes des ménages reste importante, que les médicaments semblent être la question prioritaire à résoudre (premier poste de dépenses pour les ménages et pour la CNAM, et proportionnellement élevé par rapport aux dépenses totales).
Samira Rekik