Nominations, grèves, obstacles techniques et financiers, l’audiovisuel est en crise. La télévision tunisienne se trouve face à un nouveau défi, celui des réformes. La pratique de la théorie du consensus s’instaure de plus en plus en Tunisie. Deux réunions ont été organisées au moment de la crise qui sévit au sein de la télévision tunisienne.
Une délégation de la commission de la réforme administrative et de la lutte contre la corruption à l’Assemblée nationale constituante (ANC) s’est rendue à la télévision tunisienne. La délégation de députés a rencontré le Président directeur général par intérim de la télévision, Hichem Issa. Lors de cette réunion, plusieurs questions relatives à la gestion ont été soulevées. Cette délégation émane de la commission de la réforme administrative et de la lutte contre la corruption à l’ANC, présidée par l’élu d’Ennahda Néjib Mrad.
Cette action est survenue suite à la publication par Hichem Issa, d’un communiqué accusant les médias de le discréditer et à cause de la situation administrative et financière alarmante de l’établissement.
Des dettes évaluées à 40 millions de dinars doivent être remboursées, souligne Issa. Pour sa part, Néjib Mrad estime que la création d’un bureau d’étude permettra d’identifier les problèmes structurels et de déterminer les champs de dysfonctionnement.
Mais, mardi 13 mai, la télévision tunisienne a publié un communiqué excluant tout dysfonctionnement au niveau de la gestion administrative ou financière, notamment depuis 2014. Toutes les décisions du Conseil d’administration ont été appliquées dans les délais et le Conseil s’est même réuni avec la Commission des marchés publics à plusieurs reprises, ce qui prouve qu’il n’y a pas eu de dysfonctionnement, souligne le communiqué.
«Le dysfonctionnement a été évoqué par certaines parties pour des intêrets personnels ou simplement pour contraindre l’établissement à conclure des contrats avec des sociétés identifiées au préalable, ce qui agira sur l’argent public et le budget de l’État » a indiqué le communiqué.
Journalistes et patrons
Le journaliste Iheb Chaouch a été convoqué par le directeur de Wataniya 1, Charfeddine Ben Salem, pour un questionnaire, souligne un communiqué, suite à une déclaration donnée à une chaîne télévisée concurrente dans laquelle il a vivement critiqué le gouvernement ainsi que les conditions précaires de son travail, notamment en ce qui concerne «la pression qu’il subit».
Chaouch a été accusé de nuire à l’image de la chaîne télévisée. Dans le même temps, le directeur de la chaîne lui a promis d’entamer «les mesures nécessaires» afin de le protéger, si ses propos sont vérifiés.
Le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT) a appelé, dans ce contexte, la Haute autorité de la communication audiovisuelle (HAICA) à fournir des efforts pour dévoiler la vérité, notamment en ce qui concerne la révision des nominations.
«Je voudrais réagir par rapport à ce qu’a dit mon collègue Iheb Chaouch. Ce qui a été dit n’est autre que la simple réalité que nous vivons à la Télévision nationale. C’est exactement la vérité et rien d’autre… Des dizaines d’entre nous, viennent tous les jours et repartent en fin de journée, ou en milieu de journée, en ne faisant absolument rien», a affirmé Amel Chahed journaliste et animatrice à la Télévision nationale.
Le syndicat de base de la télévision tunisienne a décidé d’observer une grève générale centrale et régionale les 27 et 28 mai 2014, en réaction à la question des nominations. Le SNJT avait organisé, quant à lui, deux grèves en une année. La première a porté essentiellement sur les questions des nominations, notamment à Assabah.
«Suite à ma déclaration à la chaîne télévisée, mes confrères m’ont contacté et dit qu’ils avaient travaillé dans les mêmes conditions. Nous avons convenu d’organiser une conférence de presse lors de laquelle chacun de nous abordera sa propre expérience si la situation ne change pas dans un délai de 10 jours. Le silence doit être brisé. La bataille continue», a averti Iheb Chaouch.
La télévision tunisienne se cherche et se réinvente. En ce qui concerne la situation actuelle, le «qui a fait quoi» n’est pas la question la plus importante, mais la vraie question est «comment les journalistes pourraient-ils améliorer leurs conditions de travail ?» «La grève est utile si elle sert l’intérêt général du secteur», nous a affirmé le syndicaliste Mongi Khadraoui. Mais cette question est à relativiser, car les grèves conduisent au blocage temporaire du système de «transition». Une réunion avec des intellectuels, des technocrates et des experts pourrait apporter une solution efficace.
Ch.B.