La Tunisie accueille le Green Growth Summit: pour une transition juste et verte dans la région MENA

Le « Green Growth Summit« , tenu ce mardi 30 avril 2024 à Tunis, a marqué un jalon significatif dans les efforts déployés pour promouvoir une transition écologique et équitable au sein de la région MENA. Initié par l’organisation internationale de coopération Hivos, ce sommet représente un engagement concret en faveur d’un avenir durable, aussi bien pour la Tunisie que pour l’ensemble de la région. L’objectif principal de cette initiative est de revitaliser les écosystèmes verts en Afrique du Nord tout en soutenant activement les stratégies de transition écologique régionales. À travers des partenariats solides entre les différents acteurs impliqués, ce sommet vise à catalyser des solutions innovantes et tangibles pour répondre aux défis environnementaux pressants. La participation de diverses organisations de soutien aux entreprises, des PME, des investisseurs, des bailleurs de fonds et des décideurs souligne l’importance cruciale de cette initiative pour façonner un avenir plus durable et résilient.

Soutenir la transition verte dans la région MENA

Noha El Sebaie, responsable des programmes d’entrepreneuriat vert et d’employabilité chez Hivos MENA, a souligné que depuis 2018, Hivos travaille activement dans le domaine de l’économie verte en Tunisie et dans la région MENA, comblant ainsi un vide laissé par l’absence d’organisations internationales se concentrant sur la création d’emplois et d’opportunités dans le secteur vert.

S’exprimant au micro de Réalités online, elle a expliqué que ces projets sont financés par le ministère des affaires étrangères du Royaume des Pays-Bas et par l’Union Européenne. Avec le temps, l’expérience accumulée a suscité un intérêt croissant de diverses parties prenantes, notamment les partenaires financiers, les réseaux d’investisseurs et les gouvernements locaux, témoignant de l’intérêt grandissant pour le développement du secteur vert dans la région.

Elle a souligné la nécessité de partager ces expériences et d’unir les efforts, en particulier en Tunisie, où l’intérêt pour le secteur vert est en plein essor. L’objectif du Green Growth Summit est donc de rassembler ces parties prenantes non seulement pour discuter, mais surtout pour partager des objectifs communs et unir les stratégies et les efforts dans ce domaine.

Elle a également mentionné qu’un deuxième Green Growth Summit se tiendra en Égypte dans deux semaines, le 14 mai, avec des objectifs similaires. Tout en tenant compte des différences entre les contextes locaux de la Tunisie et de l’Égypte, l’objectif reste le même : réunir les efforts et aligner les stratégies avec les gouvernements locaux pour promouvoir la croissance verte dans la région.

En termes de réalisations concrètes, elle a souligné que, en Tunisie, Hivos a pu aider plus d’une centaine d’entreprises en matière de Responsabilité sociétale et former et soutenir plus de 3500 jeunes. Elle a également réussi à employer 2500 jeunes dans le secteur vert.

Changement climatique : l’urgence d’agir 

Lors de son allocution lors de la séance d’ouverture du Green Growth Summit, S.E.M Josephine Frantzen, ambassadeur du Royaume des Pays-Bas en Tunisie, a souligné l’urgence climatique  ajoutant que la tenue de ce sommet était « absolument nécessaire ». Alors que le rythme du changement climatique s’intensifie, ses répercussions se font de plus en plus ressentir sur les plans social, économique et environnemental, touchant de manière particulièrement aiguë les groupes les plus vulnérables, notamment les femmes.

Ce sommet, placé sous le signe de la transition verte et du renforcement des liens sociaux entre les différentes entités, qu’elles soient des organisations, des entreprises, du secteur privé ou public, aspire à ériger des sociétés plus justes, inclusives et durables. L’objectif est clair : revitaliser les écosystèmes verts en Afrique du Nord et apporter un soutien actif aux stratégies de transition écologique régionales.

En évoquant les effets dévastateurs du changement climatique, l’ambassadrice a mis en lumière des réalités alarmantes telles que la hausse des températures, les catastrophes naturelles, la raréfaction de l’eau potable, la montée du niveau de la mer et la perte de biodiversité. Ces défis ont des conséquences profondes sur la stabilité sociale et politique, ainsi que sur la santé et les moyens de subsistance des populations.

Face à cette situation alarmante, la diplomate a plaidé pour une action immédiate et décisive. Elle a insisté sur l’importance cruciale de la transition verte comme moyen de transformer les défis climatiques en opportunités pour une croissance économique durable et une société plus équitable et inclusive.

Dans ce contexte, elle a rappelé que son pays a confirmé son engagement en faveur de l’environnement en réservant un budget annuel de 1,8 milliard d’euros à partir de 2025 pour soutenir la transition verte, tant au niveau national qu’international. Des mesures concrètes, telles que la réduction des émissions de gaz à effet de serre, le soutien aux énergies renouvelables et la gestion durable de l’eau, sont au cœur de cette approche.

La Tunisie, un pays pionnier en matière de croissance verte 

De son coté, la ministre de l’Environnement, Leila Chikhaoui, a souligné l’impact significatif de cet événement pour la Tunisie, qui accueille pour la première fois un sommet sur la croissance verte dans la région MENA. Elle a rappelé que la Tunisie était parmi les premiers pays à s’être engagée en faveur de la croissance verte, précisant que cet engagement remonte à plus de 25 ans.

Dans ce contexte, la ministre est revenue sur la mise en œuvre de la stratégie nationale de transition écologique approuvée en 2023. Comprenant des initiatives de transition énergétique, cette stratégie découle de la collaboration entre plusieurs ministères et vise à harmoniser les politiques sectorielles pour répondre aux défis climatiques mondiaux. Cette stratégie s’articule autour de cinq axes principaux et compte 53 mesures spécifiques, soutenues par une approche transversale de digitalisation.

La ministre a souligné l’importance cruciale de la gouvernance et du financement dans la mise en œuvre de cette stratégie, soulignant la nécessité d’une coordination efficace entre les secteurs public, privé et gouvernemental. Elle a également annoncé la création prochaine d’une haute instance dédiée à la transition écologique et l’élaboration d’un projet de code de l’environnement.

Le deuxième axe de la stratégie se concentre sur la lutte contre le changement climatique, avec des engagements pris par la Tunisie dans le cadre de la Convention des Nations Unies depuis 1992, dont une contribution nationale visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 45% d’ici 2030.

Les autres axes de la stratégie portent sur la préservation des ressources naturelles, la promotion de modes de production et de consommation durables, ainsi que sur des initiatives de sensibilisation, d’éducation et de recherche scientifique en faveur de la transition écologique.

Transition énergétique : la Tunisie se fixe des objectifs ambitieux 

S’exprimant lors du premier panel intitulé « L’avenir est vert : construire une transition juste et verte en Tunisie », Ouael Chouchane, secrétaire d’État auprès de la ministre de l’Industrie, des Mines et de l’Énergie, chargé de la transition énergétique, a expliqué les défis rencontrés lors du long processus de transition énergétique en Tunisie. « Il a fallu un certain temps au gouvernement pour synthétiser le projet et engager les discussions. C’est ainsi que tous les programmes antérieurs ont été annulés, représentant notre principal obstacle lors de cette transition.’ a-t-il noté. En revanche, le secrétaire d’État a souligné une stabilisation, notamment dans le domaine des énergies renouvelables et du marché solaire, considérant que le secteur financier nécessite encore des ajustements. « Nous avons enfin pu conclure nos discussions et débloquer un programme de 500 MW, le premier projet à débuter en moins d’une semaine, les autres étant déjà signés. Aujourd’hui, j’ai eu le plaisir d’annoncer l’attribution du projet 5, marquant ainsi une étape significative. » a-t-il noté.

Il a précisé que dans le cadre du plan de développement des énergies renouvelables 2022/ 2025, la Tunisie a lancé un programme ambitieux, lequel prévoit la production de 1,7 GW en énergie solaire et éolienne, avec 500 MW déjà opérationnels.

Ouael Chouchane a estimé que la Tunisie a lancé une stratégie reposant sur un objectif transversal axé sur une transition équitable. « Nous cherchons à garantir cela à travers des initiatives telles que Smaller Streets »a-t-il précisé.

Il a dans ce contexte salué l’enthousiasme des investisseurs tunisiens à créer des emplois dans le secteur vert, en collaboration avec des partenaires internationaux. « Une véritable industrie émerge autour de notre secteur énergétique, ce qui est très encourageant. Je suis également encouragé par la coopération croissante entre les investisseurs tunisiens et internationaux pour concrétiser ces projets. » a-t-il conclu.

L’économie d’impact, pour une durabilité économique

Lors d’une déclaration accordée à Réalités online, Aslan Berjeb, président de la CONECT, a mis en avant l’importance de la participation de son organisation aux débats sur les énergies renouvelables et la transition énergétique à l’instar du Green Growth Summit soulignant que la CONECT avait été parmi les organismes pionniers à aborder ces sujets dès 2010.

Berjeb a partagé ses réflexions sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE), notant que certains entrepreneurs ne voient pas les avantages de se conformer aux normes RSE en raison du manque de retour sur investissement direct. Il a mis en lumière l’émergence d’un concept novateur, à savoir l’économie d’impact, qui marie la RSE avec la viabilité financière, estimant que cette approche contribue à la durabilité économique.

Normes sociales et environnementales : un impératif pour la compétitivité des produits locaux 

Le président de la CONECT a souligné l’importance de la durabilité des entreprises dans la compétitivité économique, mettant en avant que la compétitivité des produits ne se mesure plus uniquement par leur qualité et leur coût, mais aussi par leur conformité aux normes sociales et environnementales. Il a prévenu que le non-respect de ces normes pourrait placer la Tunisie en retard par rapport à d’autres pays concurrents sur la scène internationale en termes d’exportation.

Berjeb a dans ce contexte abordé l’importance de la décarbonisation pour maintenir la compétitivité des entreprises tunisiennes sur le marché mondial, soulignant le rôle croissant des nouvelles taxes environnementales, comme la taxe carbone, dans le commerce international.

Il a également évoqué l’organisation prochaine du rendu de la consultation nationale sur les énergies renouvelables par la CONECT le 16 mai, soulignant l’importance de sensibiliser et d’impliquer les institutions et les acteurs gouvernementaux dans le processus de transition écologique.

Le Green Growth Summit en Tunisie est organisé par Hivos et financé par le projet Greenov’i d’Expertise France, avec, en plus, le soutien du ministère des Affaires étrangères des Pays-Bas, du Challenge Fund for Youth Employment, d’Impact Europe et de l’Union européenne. L’évènement est mis en œuvre par New Silk Roads.

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