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Le gouvernement tunisien a présenté mardi 28 décembre le budget de l’année 2022 qui prévoit un endettement de près de 6 milliards d’euros pour relancer une économie lourdement affectée par une crise politique et la pandémie du Covid-19. Il faut souligner que la crise économique tunisienne, caractérisée par une croissance en berne depuis dix ans, 0,6 % par an en moyenne, et une forte inflation de 6 % par an, a été aggravée par la pandémie qui a mis le pays à l’arrêt et l’a privé de cruciales recettes touristiques. Le PIB a ainsi plongé de 8,8 % en 2020, une chute qui devrait être à peine compensée de moitié en 2021 : + 4 % de croissance prévue par la Banque mondiale. Mais, pour de nombreux experts et économistes, le problème économique de la Tunisie est avant tout structurel. Depuis la révolution, les dettes et leurs remboursements ont entraîné le pays dans un cercle vicieux
*Le recours à l’emprunt continue dans le budget 2022
Pour sortir de l’ornière, à l’heure de boucler le budget de l’État pour 2022 – estimé à 57,2 milliards de dinars (environ 17,6 milliards d’euros), soit une hausse de 3,2 % par rapport à celui de 2021 –, le gouvernement a présenté une panoplie de solutions. Le déficit budgétaire prévu en 2022 va atteindre 8,5 milliards de dinars (2,6 milliards d’euros), ce qui représente 6,2 % du PIB, a indiqué lors d’une conférence de presse à Tunis la ministre des Finances, Sihem Boughdiri.
Le budget prévoit également un endettement de près de 20 milliards de dinars (5,7 milliards d’euros) pour couvrir les dépenses prévues par le budget et les besoins de la trésorerie. Avec ces crédits, le niveau de la dette publique atteindra 82,6 % du PIB, contre 85,6 % en 2021. Cet endettement se déclinera sous forme de crédits extérieurs de 12,6 milliards de dinars (3,9 milliards d’euros) et d’emprunts intérieurs de 7,3 milliards de dinars (2,3 milliards d’euros), selon la ministre. Ce projet de loi a été élaboré sur la base d’un taux de croissance hypothétique de 2,6 %, et un prix moyen du baril de pétrole de 75 dollars.
*Le pays suspendu aux négociations avec le FMI
En réalité, le gouvernement n’a guère de marges de manœuvre. En 2021, la dette extérieure de la Tunisie avait atteint un pic de 100 milliards de dinars (environ 30 milliards d’euros), soit 100 % du PIB. Pour renflouer les caisses de l’État et relancer l’économie, les autorités comptent donc conclure un accord avec le Fonds monétaire international (FMI), a affirmé Mme Boughdiri. « Les négociations avec le FMI vont reprendre au début de l’année 2022 », a-t-elle ajouté. Selon la ministre, un document élaboré par plus de 80 experts tunisiens et présentant « un programme de réformes dans plusieurs secteurs » va être négocié avec le FMI. La Tunisie qui peine à rembourser ses dettes avait mené en 2021 des discussions avec le FMI pour un nouveau prêt en contrepartie de réformes socialement difficiles, destinées à assainir ses finances.
Parmi ces réformes figure notamment la diminution des subventions aux produits de première nécessité, une réduction de la masse salariale de l’État qui emploie 680 000 personnes dans un pays de 12 millions d’habitants et une restructuration de nombreuses entreprises publiques. « Ces réformes sont essentielles pour rééquilibrer les comptes budgétaires et assurer la viabilité de la dette à l’avenir dans un contexte de perspectives de croissance modérée », avait indiqué en octobre dernier, l’agence de notation Moody’s, au moment de dégrader la note souveraine de la Tunisie. Sa note passant de B3 à Caa1, signifiant que la confiance accordée aux finances tunisiennes, sur une échelle de AAA à C, diminue, et que le risque que la Tunisie ne rembourse pas certaines de ses dettes est élevé.
(Le Point)