Avec une tradition vieille maintenant de plus de vingt ans, on a longtemps cru que l’Algérie était devenue le pays le plus aguerri dans la lutte contre le terrorisme. Or et encore une fois après Ain Amenas, les obscurantistes réagissent toujours et avec la même méthode : prise d’otages puis exécution, mais cette fois-ci ils ont revendiqué un « objectif » politique, pas une rançon. Ainsi et face à la guerre totale désormais déclarée contre le terrorisme sous toutes ses formes — Al-Qaida, ledit «État islamique» et les «Ansar Acharia» —, on s’attend à un changement de tactique de ces groupes qui ciblent les civils et les étrangers sur nos terres. Ce lâche assassinat laisse perplexe ici en Tunisie face à l’éventualité d’un « remake » sur notre sol, surtout que les touristes abondent.
Point d’excuse et d’oubli pour un assassinat barbare
L’otage français Hervé Gourdel a été exécuté mercredi 24 septembre, dans les hautes montagnes Kabyles, par le groupe dit «Jund Al-Khalifa», dont les méthodes rappellent ces groupuscules qui s’identifient à l’Islam. La presse algérienne était unanime à condamner ce crime odieux le qualifiant de«sanglant», «macabre», «barbare», «odieux». «Le massif du Djurdjura [zone où l’otage français était recherché] était bouclé, des milliers d’hommes ont été mobilisés» en Kabylie, rappelle le quotidien francophone El Watan. Mais malgré la présence de quelque 2.000 soldats, épaulés par une centaine d’hommes des forces spéciales, les recherches ont échoué. Jeudi, plusieurs médias locaux critiquaient les autorités algériennes pour leur rôle, dans cette région difficile du nord du pays qui abrite des terroristes.
Les assassins justifient leur acte par la soi-disant réponse à la coalition internationale mise en place contre ce «Daech». Mais on se demande alors comment ces groupes possèdent-ils encore une force de frappe malgré l’immense mobilisation des forces algériennes et l’étendue et l’efficacité des renseignements algériens capables d’informer ses voisins de la présence de terroristes sur leurs propres territoires ?
Le rapt, instrument de guerre
L’exécution d’Hervé Gourdel nous pousse à nous interroger sur le risque de contamination de la Tunisie.Notre pays accueille des millions de touristes. Il est urgent de réviser notre stratégie à la lumière de ce qui se passe chez nos voisins. Car, si l’on a longtemps cru que notre flanc ouest (Algérie) était quasiment immunisé et que l’on s’inquiétait davantage pour flanc est (Libye) la donne est maintenant autre.
L’atroce exécution d’Hervé Gourdel par ces sanguinaires qui se revendiquent désormais de DAECH, doit déclencher chez nous la sonnette d’alarme quant aux méthodes de ces terroristes.
La création du «pôle de lutte contre le terrorisme», annoncé pour le 13 octobre prochain, s’il augure une nouvelle structure centralisée de toutes nos forces de sécurité, aussi bien policière que militaire, reste malgré tout en-deçà de nos espérances. Il est temps de penser sérieusement à mettre sur pied une agence pour la sécurité nationale, car le phénomène terroriste n’est qu’une composante parmi tant d’autres. Il faudrait à notre sens se doter d’une vision stratégique pour l’avenir de la Tunisie, en pensant à sécuriser d’autres composantes de notre sécurité nationale, à savoir l’énergie, l’enseignement, le transport, l’environnement, la santé (les virus et les maladies). Face à un danger global, la réponse doit être globale.
Fayçal Chérif