L’après COVID-19 sera écologique… De plus en plus de citoyens dans le monde y croient !

L’émergence d’une pandémie mondiale et son impact spectaculaire à l’échelle mondiale a conduit les décideurs publics à l’échelle planétaire à mettre leurs économies au ralenti. Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, la préservation des vies humaines a été privilégiée à davantage d’accumulation de richesses ! Cette pause a permis à une très grande partie de l’humanité de faire une introspection, de se poser des questions sur leur propre existence, de prendre conscience de ce qui nous entoure et de prendre conscience de la diversité des formes de vies.
Pour de nombreuses personnes, la surprise a été totale sur le terrain de la biodiversité. Nous n’avons jamais vu autant d’abeilles, de papillons, d’oiseaux, d’insectes sous toutes leurs formes. Nous avons tous remarqué l’amélioration de la qualité de l’air. Nous avons tous remarqué la disparition des pollutions sonores, notamment dans les villes. Cet impressionnant calme des rues nous a permis de passer des nuits avec une qualité de sommeil sans précédent. La couleur du ciel a changé avec l’annulation de près de 120 000 vols par jours et les montagnes de l’Himalaya sont devenues visibles à 200 Kilomètres de distance !
Cette pause écologique a permis de prendre conscience que les humains sont allés trop loin dans la destruction de la biosphère. Pour beaucoup, cela annonce un changement de cap et de comportement pour les humains !
Dans cette courte note, je me pose la question de la pertinence de cette conjecture et de ses fondements. En d’autres termes, allons-nous vers un comportement pro-climat dans les années à venir ? Avant de répondre à cette question, je reviendrai sur le constat et sur les effets bénéfiques écologiques et climatiques du COVID-19, avant de détailler les arguments plaidant pour ce changement profond dans une seconde partie. Dans un troisième temps, je nuancerai cette hypothèse et détaillerai les contre-arguments.

Les effets bénéfiques de court terme du COVID-19 sur le climat et l’environnement
La sortie de la trajectoire actuelle et la redéfinition d’un modèle de développement davantage respectueux de l’environnement naturel est une nécessité absolue. Pour comprendre ce désir de changement profond, qui a été canalisé par l’épisode COVID-19, il convient de rappeler le lien entre l’émergence de cette maladie et le non-respect de l’environnement naturel avant d’évaluer les effets du COVID-19 sur l’environnement. Nombre d’experts font état d’un lien fort entre le non-respect de la nature et l’émergence des coronavirus. La nécessité d’utiliser de plus en plus d’espace pour ses activités humaines a conduit les humains à s’aventurer dans les habitats naturels des espèces sauvages – comme en témoigne la déforestation que subissent les forêts anciennes. Dès lors, l’interaction entre ces espèces sauvages (les agents pathogènes) et les humains a conduit à une transmission de nouvelles maladies comme Ebola, le Sida, le SRAS et le SARS. Le SARS-COV-2 était attendu comme le seront d’autres pandémies par les coronavirus dans le futur. La non préservation stricte d’un capital naturel critique menace les humains de nouvelles maladies dans un avenir proche.
L’épisode du COVID-19 a montré réellement que l’on peut renverser le processus de changement climatique en limitant l’empreinte écologique des humains. Dès lors que les activités humaines ont été réduites, nous avons constaté une inversion des processus. La qualité de l’air s’est améliorée dans le monde, de manière spectaculaire en Chine et en Europe du Nord. La faune et la flore ont pu se développer à un rythme impressionnant, y compris dans les villes. Des animaux sauvages ont été observés aux quatre coins de la planète et la biodiversité s’est manifestée de manière spectaculaire.
Ceci montre clairement que si l’on décide d’agir, nous pouvons encore modifier partiellement la donne et renverser les processus. L’idée de réaliser une carte interactive par l’Université Côte d’Azur permettant de saisir toutes ces améliorations permettra de garder en mémoire cette pause écologique.
La baisse spectaculaire de la consommation énergétique au niveau national et international – consécutive au COVID-19 – aidera probablement à l’atteinte des objectifs à court terme de réduction des GES (la baisse des GES à l’échelle planétaire est de -8% pour cette année). Mais, l’effet anthropique ne peut être stoppé par l’épisode du COVID-19. Les modifications des comportements à long terme est la seule à nous faire arriver aux objectifs de l’accord de Paris. Or, le confinement a eu des impacts forts sur les dynamiques de consommation.

Les signes d’un changement de comportement et de posture à l’égard du climat !
Consommation minimale et revenu de base
Durant le COVID-19, même s’il faut rester prudent, nous avons constaté que le système alimentaire mondial a pu tenir. Des voix dans le monde entier ont réclamé le versement d’un revenu universel permettant de satisfaire les besoins vitaux[1]. Ceci a permis à tous les individus d’assurer leur survie. Mais cela a amené à se poser la question de la durabilité de nos modes de consommation. Matraquée à coup de publicité, une grande part de notre consommation est superflue, inutile, encombrante…cette part est à la base de la boulimie de la consommation des ressources au niveau de la planète.
Le premier désir de changement est venu de cette introspection sur les modes de consommation que le COVID-19 a permis. Le minimalisme, tendance de société qui cherche à restructurer la consommation des individus sur le strict minimum a trouvé un terrain favorable. Des millions de personnes l’ont pratiqué et ont eu envie de continuer dans cette tendance dans le futur. Le COVID-19 a rompu ce cercle infernal du « bronzage sous le soleil des supermarchés » comme l’écrivait le sociologue Baudrillard[2] pour décrire la société de consommation dans laquelle nous nous sommes installés sans critique.

La consommation locale
Face aux ruptures des chaines logistiques et la rupture des chaines d’approvisionnement internationales, la consommation s’est tournée vers les producteurs locaux. Le commerce international a vu sa croissance devenir négative. Les slogans de consommer local ont fleuri dans le monde entier. La Chine, atelier du monde était en panne. Cette consommation nouvelle, même si dans certains territoires elle s’est accompagnée de flambée des prix a été bénéfique. Car le changement tant désiré par les partisans de la « DeepEcology », de « consommer mieux » au lieu de « consommer plus » est enfin mis en place.

Un traumatisme qui marquera les comportements
Enfin, la nature psychologique des individus, fait que seuls les chocs violents conduisent à des changements de comportements : la perte d’un être cher, une guerre, une maladie, une famine…La situation d’un stress extrême, mettant en cause notre existence pourrait même conduire à un changement dans les gênes et le traumatisme reste pour des générations et des générations. Le COVID-19 a été un choc violent et son empreinte ne disparaîtra pas d’aussitôt ! il existe une véritable cassure dans l’humanité et cet épisode sera davantage traumatisant que les guerres amenant à des changements profonds de comportements sanitaires mais également en termes de consommation !

Un désir d’une autre gouvernance
Le changement dont aspirent les populations a également été modifié. La crise a montré de manière importante le rôle des chercheurs et des scientifiques et les limites des hommes politiques. Dès lors que ceci a été parfaitement illustré dans le cas d’une maladie – dont les savants avaient anticipé, le parallèle est vite établi avec le changement climatique où le GIEC et des milliers de chercheurs et scientifiques montrent et clament une modification des comportements. Les dangers des hommes politiques prenant des décisions sans concertations et sans fondements scientifiques sont apparus clairement – avec la parfaite illustration du cas des Etats-Unis. Le rapport de force pour les citoyens a changé. La non-action des hommes politiques de plus en plus redoutée. Jamais un contexte n’a été autant favorable à une action structurée pour le climat et pour l’environnement ! Des voix un peu partout dans le monde pour un changement radical et profond.

Mais les forces du marché sont toujours en place et un retour à la normal est fort probable!
L’effet rebond est redouté
Difficile d’anticiper de nos jours la suite de l’épisode COVID-19, mais si cet épisode ne dure qu’un semestre, voire une année, un effet rebond est fort à redouter. Il s’agira pour les gouvernements de remettre en place des plans de relances économiques laissant de côté l’ambition écologique et les objectifs de réduction des GES. Dans ce contexte, les gains réalisés cette année seraient largement perdus par l’effet rebond. Pire, avec une crise sociale et économique de grande ampleur annoncée, on pourrait vraiment assister à un arrêt des efforts des gouvernements des pays développés en matière écologique. Si l’épisode s’installe dans le temps et qu’aucun remède n’est trouvé, les impacts seraient beaucoup plus prononcés sur les activités économiques et par conséquent sur les émissions de GES. Mais, ceci est peu probable.

La relance future se fera par une consommation…et pas forcément pro-environnementale
La relance économique qui se dessine un peu partout dans le monde est une relance par la demande. Ce qui sera demandé par les gouvernements aux citoyens c’est de consommer et de rattraper leur retard de consommation. Le lobbying actif de certains lobbys comme celui des constructeurs automobiles en France, cherchent à inciter les consommateurs à acheter les stocks et mettent la pression sur les gouvernements pour mettre des mesures incitatives. Les subventions reçues en France par Air France ne sont pas conditionnées par un changement de cap écologique (par exemple ne plus desservir les villes proches).

L’ultra capitalisme virtuel accélérera la consommation d’une autre manière
Les grandes entreprises technologiques sont les gagnantes de cet épisode du COVID-19
En Tunisie, les effets de la crise du COVID-19 invitera le gouvernement à repenser le modèle économique et social. La variable environnementale et climatique est prise en compte clairement dans cette réorientation. Mais notre ambition climatique – intacte – sera fortement dépendante de la mise en place effective de la finance climat et des moyens pour mettre en œuvre nos projets de transition écologique. Notre propre engagement sur nos propres ressources sont presque atteints.

La solidarité internationale s’est disloquée
Sur un plan institutionnel, l’année 2020 était une année charnière pour le processus de négociations climatiques. Les pays étaient invités à relever leurs ambitions. Nous arrivons à la mise en place effective de l’accord de Paris et surtout à la mise en place de l’accord sur la finance climat. Or, la COP 26 a été décalée à une date indéterminée en 2021. Un flou important entoure la manière de poursuivre les débats. La majeure partie des pays africains seront dans une situation de crise économique importante et cela pèsera sur les décisions. Nous aurons besoin d’une initiative mondiale post COVID-19 pour relancer le processus et pour garder les ambitions.

Pour conclure !
Si l’on applique la même urgence aux changements climatiques qu’à l’urgence appliquée au COVID-19, l’humanité pourrait gagner la bataille des changements climatiques. En effet, c’est un épisode unique dans l’histoire de l’humanité où les activités économiques ont été sacrifiées pour sauver des vies humaines. Cette décision impensable il y a quelques semaines, a été ordonnée aux quatre coins de la planète par les plus grandes puissances. C’est exactement ce qui est requis en matière de changements climatiques : sacrifier une partie des activités économiques pour sauver des vies humaines et des activités économiques des générations futures. Sauf que le changement climatique a commencé à agir et son intensité augmentera progressivement dans les décennies à venir (menace diffuse), alors que le COVID a un effet immédiat et visible. Le changement climatique risque de tuer beaucoup plus de personnes que le COVID-19 et l’ensemble des Coronavirus.
A première vue, le COVID-19, en mettant la majorité de la planète à l’arrêt, a permis de stopper net les émissions de Gaz à Effet de Serre (GES). Cet épisode, a été salué par de nombreuses personnes et des militants écologistes comme un signe d’une nécessaire pause des activités humaines afin de rompre le cycle infernal causant le réchauffement climatique. Mais lorsqu’on analyse profondément cette situation, il convient de distinguer entre les effets à court terme et les effets à moyen et long terme.
Nous entrons dans une décennie décisive, où l’on est la dernière génération à pouvoir inverser le cours des choses. Nous devons capitaliser sur les enseignements du COVID-19. Le coût de l’inaction est vraiment très élevé. Si vous demandez à tous les gouvernements mondiaux ce qu’ils auraient pu investir comme argent et comme moyens quelques années auparavant pour éviter cette catastrophe en ayant l’information au préalable, ç’aurait été des sommes élevées (mais sans aucune comparaison avec les dommages actuels). En matière de changement climatique, nous devons agir maintenant pour éviter un naufrage demain.

[1] Voir à ce sujet dans ce même espace mon article sur le revenu permanent
[2] Jean Baudrillart (1970), « La société de consommation », éditions Poche. Paris.

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