Malgré les tensions diplomatiques persistantes entre Rabat et Alger, une vague de produits alimentaires algériens déferle sur le marché marocain, suscitant un engouement surprenant. Au cœur de cette percée, la pâte à tartiner El Mordjene s’impose comme une véritable sensation, rivalisant avec les géants du secteur.
Un circuit de distribution clandestin
Dans les ruelles animées des souks marocains, El Mordjene a conquis les palais les plus exigeants. Disponible dans les échoppes et épiceries spécialisées, ce délice algérien s’arrache à prix d’or. Un pot de 700 grammes, vendu à plus de 350 dirhams au Maroc, ne dépasse pas l’équivalent de 40 dirhams en Algérie. Cette disparité de prix, relayée par Bladi, n’a pas refroidi l’ardeur des consommateurs, bien au contraire. Un commerçant de Rabat témoigne de son succès, écoulant une cinquantaine de pots par mois, un chiffre impressionnant compte tenu du prix élevé.
L’étiquette « Made in Türkiye » apposée sur les pots d’El Mordjene vendus au Maroc intrigue. Cette mention faciliterait-elle l’entrée du produit grâce à l’accord de libre-échange entre le Maroc et la Turquie ? Ouadie Madih, président de l’Association de Protection du Consommateur (UNICONSO), s’interroge sur l’absence de ce produit dans les grandes surfaces et sur l’absence du tampon de l’Office national de Sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA).
Une commerçante en ligne d’Agadir lève le voile sur le mystère : El Mordjene est introduit clandestinement au Maroc. Les pots transitent par les bagages de ressortissants marocains en provenance de Tunisie, des Émirats arabes unis ou du Qatar. Des commerçants prennent ensuite le relais, proposant la livraison à domicile pour un prix pouvant atteindre, voire dépasser, 400 dirhams pour 700 grammes.
Le succès des dattes algériennes
Les dattes algériennes, notamment la variété Deglet Nour, connaissent également un succès retentissant. Malgré les campagnes de boycott, elles sont préférées aux dattes marocaines, dont la qualité est jugée en baisse. Des commerçants de Bni Drar, ville frontalière, affirment importer légalement ces dattes via les ports de Béni Ansar à Nador et de Tanger.
Ce commerce transfrontalier, bien que complexe et parfois clandestin, témoigne de l’attrait des produits algériens pour les consommateurs marocains. Il met en lumière les failles des circuits de distribution officiels et la force d’un marché parallèle qui s’adapte aux contraintes politiques et économiques.
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