Le constat impitoyable : Ce pouvoir est en passe de détruire l’État !

La nation, dans notre pays, s’est construite autour de l’État moderne à partir de l’indépendance en 1956. Aujourd’hui, après une décennie de braise, marquée par l’anarchie, la corruption, le népotisme et le cynisme éhonté des politicards au pouvoir, l’État est en passe de détruire la nation, par l’incompétence de ses dirigeants, la dégradation de ses services et la perspective de sa faillite morale et financière. La Cour des comptes en dresse le constat impitoyable dans son dernier rapport qui souligne tant les infractions liées aux états financiers des candidats aux élections présidentielle et législatives de l’année 2019, à la légitimité des dépenses et au respect du décret-loi numéro 87 concernant l’organisation des partis politiques, que les risques majeurs qui en résultent pour la soutenabilité de la démocratie.
Une année après ce double scrutin, le pouvoir est toujours à terre, dévasté par cette fameuse méthode machiavélique théorisée et appliquée avec succès par les populistes. l’Etat est marginalisé, ridiculisé et plongé dans une crise insidieuse et infiniment profonde, qui prend la forme d’une inexorable montée en puissance de la défiance des citoyens à l’égard de leurs gouvernants : «Celui qui voulait jouer au réformateur à seule fin d’arriver au pouvoir mériterait de se heurter à des obstacles et dépérir à son tour», avertissait Ibn Khaldoun. Et d’ajouter : «La décadence de l’État est due à la difficulté d’exprimer le réel et l’inaptitude du langage à se prêter à la traduction adéquate des choses» (n’est-ce-pas Monsieur le Président ?!). Alors que les colères montent, la première année du nouveau pouvoir est marquée du sceau de l’immobilisme. Dans les flonflons de leurs campagnes électorales en 2019, les candidats avaient enchaîné tambour battant plusieurs promesses. Élus, leurs horloges se sont déréglées ! Le ras-le-bol s’est cristallisé. Il est même devenu catégoriel. Médecins, agriculteurs, enseignants, éboueurs, infirmiers, fonctionnaires… Alors, convergence des luttes, coagulation des angoisses, addition des colères, juxtaposition des revendications… quel que soit son nom, ce malaise qui s’étend et contamine les secteurs les uns après les autres paraît ne pas inquiéter les hommes au pouvoir ! C’est vrai que l’héritage est lourd car partir sans semer le désordre, les politicards de ces dix dernières années ne savent pas faire. Chaque fois qu’ils quittent le lieu, la tragédie pointe son nez. Volonté de diviser, complexe de Néron «Après moi le déluge» et absence de scrupules de ces jobards de notre scène politique se conjuguent pour expliquer cette malédiction. Depuis son installation, le pouvoir actuel se pose encore la même question de comment on redémarre et comment on atterrit ! Certes, disait Clémenceau, «tout le monde peut faire des erreurs et les imputer à autrui, c’est faire de la politique», mais le pouvoir est toujours suivi par un nuage chargé de détestation. Pour combien de temps ?
La Tunisie d’Hannibal et de Bourguiba et plusieurs générations de Tunisiens pleureront longtemps l’irresponsabilité des politicards machiavéliques, qui n’ont aucun sens de l’intérêt général.
Je n’ai jamais brillé dans le pessimisme et je refuse de mêler ma voix au chœur pleurnicheur de «c’était mieux avant». Mais en ces temps où la Culture et l’Histoire sont considérées comme des pertes de temps, conseillons aux dirigeants au pouvoir de lire attentivement et sans attendre l’œuvre  majeure de l’historien, démographe, humaniste et précurseur de la sociologie, Ibn Khaldoun,  « Le livre des considérations sur l’histoire des Arabes, des Persans et des Berbères », et surtout « Les Prolégomènes (Al Muqaddima )  dans lesquels il expose sa vision de la façon dont naissent et meurent les pouvoirs. «D’une lecture à l’autre, on ne saute jamais les mêmes passages», écrivait Roland Barthes.

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