Le Crédit Bureau en Tunisie, Mitigan sur une rampe de lancement

Le Crédit Bureau qui avait rencontré des réticences et connu des atermoiements pour obtenir les agréments nécessaires pour s’implanter en Tunisie il y a quelques années, alors qu’il est présent et actif dans 80 pays, semble avoir acquis une certaine maturité aujourd’hui.

C’est pourquoi les promoteurs qui tiennent bon pour faire aboutir le projet en raison de ses retombées économiques positives attendues sur la santé financière des entreprises et sur le processus du développement viennent d’organiser à Tunis une réunion pour la relance de Mitigan devant un parterre prestigieux de banquiers et de chefs de grandes entreprises économiques.

Le promoteur Omar El Materi ainsi que des responsables d’institutions tunisiennes et internationales sont intervenus au cours du débat pour présenter les avantages du projet et exprimer leur soutien à la réalisation prochaine de ce projet.

Appui sans réserve de l’UTICA

Vice-président de l’UTICA, M. Hichem Elloumi pense qu’il s’agit d’un projet pertinent qui arrive au bon moment alors que l’économie tunisienne traverse une conjoncture difficile. La problématique des très petites PME en Tunisie consiste en la difficulté d’accès au crédit pour le financement des projets ainsi que l’application délicate des critères relatifs à la gestion et à la maitrise des risques.

L’UTICA soutient ouvertement la création d’un crédit Bureau, qui favorisera la rapidité des formalités de crédit au profit des entreprises, qui est fondée sur l’analyse de la personnalité des promoteurs ainsi que la solvabilité et la qualité du projet à financer.

Il s’agit de réduire les problèmes liés aux impayés des entreprises ainsi que l’amélioration de l’environnement des affaires, sans compter l’urgence de porter secours aux entreprises en difficulté.

Le crédit Bureau a pour objet l’estimation du risque, la promotion de l’investissement et des exportations. Nous devons professionnaliser l’octroi du crédit et résoudre les problèmes liés à l’organisation des crédits à la consommation. Selon M. Elloumi, il faut préserver la confidentialité des informations. À ce propos, il y a lieu de demander quelles garanties seront mises en place. Le but, selon l’UTICA, est de parvenir à une croissance économique plus rapide tout en créant plus d’emplois.

Les avantages du crédit Bureau selon la BM et la SFI

M. Antoine Courcelles-Labrousse, représentent de la SFI (société financière internationale) filiale de la Banque mondiale chargée de la promotion du secteur privé, est intervenu dans le débat en affirmant ses convictions relatives au projet d’implantation d’un crédit Bureau en Tunisie.

La SFI encourage la création d’un crédit Bureau afin de pallier la carence d’informations relatives à la situation des PME et afin de faciliter l’obtention de crédits bancaires par les entreprises économiques.

Les avantages sont doubles. Tout d’abord, la baisse du taux de créances classées et litigieuses chez les banques et institutions financières d’une part. D’autre part, cela permettra d’augmenter le taux de pénétration du crédit chez les PME.  Le crédit Bureau apporte une aide aux institutions financières, car les PME manquent de garanties réelles à présenter aux banques en appui à leurs demandes de crédit.

Il s’agit donc d’un puissant facteur de bancarisation du tissu entrepreneurial. Il faut dire que le crédit consiste à faire confiance à une personne d’après son historique de bon ou mauvais payeur.

Le crédit bureau est ouvert aux institutions financières, assurances, banques et aux grandes entreprises nationales telles la STEG, la CNSS, la CDC… Les informations collectées par le crédit Bureau permettent d’accorder un score de comportement qui permet d’évaluer le risque non basé sur la comptabilité. Cela permettra d’accorder des crédits de façon automatique, mais aussi de faire baisser le coût de la transaction pour les institutions financières. Cela devrait logiquement faire baisser le taux d’intérêt des crédits bancaires. Normalement il n’y a pas de double emploi entre la centrale des risques, gérée par la BCT et le crédit bureau qui est privé ne coûte rien à l’État.

La centrale des risques publique a ses limites, il est destiné à éviter aux banques la prise de risques inconsidérés vis-à-vis de certaines entreprises. Il faudrait laisser le marché s’autoréguler, car il s’agit d’un investissement minimum pour obtenir un bénéfice important. Il y a lieu à ce propos de remarquer la ténacité des promoteurs pour faire aboutir le projet. Cependant, il reste à identifier rapidement un partenaire technique compétent et fiable.

La CDC entre au capital de Mitigan

M. Jamal Belhaj, PDG de la Caisse des Dépôts et consignations, est intervenu en faveur du crédit Bureau Mitigan en affirmant que la CDC est un instrument d’innovation financière qui intervient dans le cadre d’une stratégie de soutien à l’investissement dans les régions. La CDC est en train de mettre en place ses propres structures afin de financer les technopoles, des espaces spécialisés dans la promotion des entreprises économiques intégrées avec des institutions de recherche et de formation.

Deux fonds d’investissement ont été créés, dont un spécialisé dans le développement des régions.

La conjoncture est celle de la carence des porteurs de projets, c’est pourquoi la CDC a obtenu de la Banque mondiale une ligne de crédit pour financer des PME alors qu’en principe sa vocation première consiste à participer au capital des grands projets.

La CDC va également financer la création d’un réseau d’incubateurs de projets.

Elle a participé au capital de Mitigan qu’elle considère comme un appui à ce nouvel instrument de marché destiné à améliorer la gestion des risques.

Pourquoi implanter Mitigan en Tunisie ?

Selon M. Omar El Materi, promoteur du projet, il s’agit de la maîtrise de l’industrie de l’information, une activité créatrice de valeur ajoutée. La base du système consiste à partager les données relatives au comportement du client et à ses engagements, ce qui doit couvrir l’ensemble du cycle de la relation-client. Il s’agit de mieux connaître le client pour prévenir toute défaillance de ses futurs engagements. La procédure favorise l’amélioration de la qualité des actifs des institutions financières et facilite les opérations de recouvrement.

Le business modèle comporte trois étapes importantes. À la base, il y a la collecte des informations avec une infrastructure informatique appropriée, suivie immédiatement par le traitement et l’analyse des données en deux phases. Cela aboutit à un score donné significatif du degré de risque pris vis-à-vis d’une entreprise donnée. Ensuite, il y a la phase des conseils mis à la disposition des clients. Le promoteur affirme qu’il y a un ensemble de bonnes pratiques, the best practices, établies dans la profession.

Il s’agit de l’indépendance du bureau vis-à-vis de tous les lobbies, du secteur privé en général, de la fourniture de services à valeur ajoutée et de la mise au point d’un modèle multisectoriel. Le résultat est intéressant à connaître, car il s’agit de réduire de 43% les défauts de paiement.

Ce projet, qui a rencontré des réticences il y a quelques années, semble maintenant réunir autour de sa concrétisation un certain consensus.

Il reste encore à achever le tour de table avec des banques et de grandes entreprises, sans oublier les personnes physiques, avant d’obtenir l’agrément des autorités.

La notoriété et la fiabilité du partenaire technique comptent beaucoup pour la réussite du projet.

 

Ridha Lahmar

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