Le devoir de mémoire

Il y a quelque chose de touchant dans la démarche de Mohamed Noureddine Dhouib (notre ancien collaborateur) que l’on pourrait pour ainsi dire résumer en un mot : «témoigner». Jeune retraité, finis les tracas et soucis d’une brillante et lumineuse carrière à la STEG dans l’ingénierie électrique. Passionné depuis son enfance d’histoire et plus particulièrement d’histoire militaire aux archives britanniques grâce à une journaliste du Sunday Times qui lui permet de donner naissance à un premier ouvrage.
Ce livre décrit les événements de la Seconde Guerre mondiale en Tunisie, entre le 8 novembre 1942 et le 13 mai 1943. L’auteur ne prétend pas avoir «une compétence dans le domaine de l’histoire, militaire», mais il n’est pas non plus un historien du dimanche… Il préfère le terme de narrateur lorsqu’il affirme «Je préfère la notion de narrateur comme le faisaient nos grands-mères lorsque nous étions enfants. Mon livre est une narration».
En effet, l’auteur a narré, composé, parcouru l’histoire faite d’images et de mots, le déroulement des  différentes batailles et leur aboutissement. Parallèlement à l’aspect militaire, l’auteur décrit l’aspect politique de la Tunisie à cette époque et surtout le calvaire du vécu de la population supportant la réquisition, le rationnement des denrées de base, le marché noir, le bombardement aérien quotidien et le tir croisé des belligérants. Ce que les vainqueurs appelaient la libération de la Tunisie, fut en fin de compte une l’utopie pour les Tunisiens.
En effet et malgré tous les sacrifices consentis, ils assistèrent, impuissants, à la spoliation des trésors (et dont ils ne parlent jamais), à la destitution injuste de leur souverain Moncef Bey et ont subi une répression d’une rare violence de la part des autorités coloniales remises en place par des Alliés supposés être porteurs de démocratie et de liberté.
«Cette période de la guerre a intéressé peu de monde et pourtant elle fut utile, voire cruciale, car elle avait permis aux Alliés de casser le mythe de l’invincibilité nazie et de serrer les rangs pour conquérir la forteresse “Europe” et vaincre définitivement Hitler», affirme Noureddine Dhouib.
Cet ouvrage a tenté de faire ressortir de l’oubli un chapitre de la Seconde Guerre mondiale en rappelant aux Tunisiens que leur pays a payé un lourd tribut et que, malgré ce sacrifice, il n’a pu retrouver sa liberté que treize ans après la fin de la guerre, soit le 20 mars 1956. 
À travers des mots, des «maux», des visages réunis, des archives militaires, loin de tout cliché idéologique simplificateur, apparaît la réalité collective du bonheur, les blessures de l’Histoire et l’héritage spirituel des ancêtres.

Nadia Ayadi
La Tunisie dans le tourbillon
de la Seconde Guerre mondiale,
de Mohamed Noureddine
Édition : MC. EDITIONS

 

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