Dans une déclaration à l’Agence TAP, Jihad Azour, directeur du département Moyen-Orient et Asie Centrale du FMI, a estimé que « malgré certains signes d’amélioration, le taux de croissance de la Tunisie demeure faible ». Un taux qui, selon Azour, nécessite des réformes structurelles urgentes. Azour a précisé qu’aucune négociation entre le FMI et le gouvernement tunisien n’est actuellement de mise pour un éventuel nouveau financement. Il a par ailleurs rappelé que le programme précédent prévoyant un accord de principe sur un prêt de 1,9 milliard de dollars en octobre 2022, n’a pas été conclu.
Il est à noter que cette intervention de Jihad Azouz a été effectuée dans le cadre des assemblées annuelles 2024 du Fonds Monétaire International (FMI) et du Groupe de la Banque Mondiale qui se tiennent à Washington du 21 au 26 octobre 2024, où l’intervenant a commenté la situation économique tunisienne. Il est également à rappeler que récemment, le FMI a prévu une croissance d’environ 1,6 % pour la Tunisie aussi bien en 2024 qu’en 2025.
Ainsi le FMI a classé la Tunisie parmi les pays arabes qui ont le taux le plus bas. Le taux de croissance de la Tunisie a été estimée, par le FMI, bien en deçà des taux que le même Fonds prévoit, par exemple, pour l’Égypte et qu’il a estimé à 4,1 %, ceux de la Mauritanie qu’il a estimé à 4,2 %, ceux du Maroc estimés à 3,6 % ainsi que ceux estimés pour l’Algérie pour qui on prévoit 3 % en d’ici 2025 !
Le FMI a-t-il été juste dans ses estimations de la situation économique tunisienne ?
Cette estimation est-elle juste en faveur de la Tunisie? Ça n’est en tout cas pas ce que semble penser le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie, Fathi Zouheir Ennouri ! En effet, depuis Washington et dans le cadre de la même réunion des assemblées annuelles du FMI et du Groupe de la Banque mondiale, le gouverneur Tunisien ne s’est pas résigné à accepter cette sentence avec un béni-oui-oui ! Il a appelé à une « révision des approches actuellement adoptées par le Fonds monétaire international (FMI) » concernant la Tunisie. Et ce, a-t-il noté, « pour mieux tenir compte de la diversité et de la complexité des défis économiques et sociaux auxquels sont confrontés les pays membres » Ennouri a précisé dans ce sens que le FMI est appelé à adapter ses mécanismes d’intervention au contexte spécifique de chaque pays. C’est ce qu’on lit dans un communiqué publié hier, vendredi 25 octobre, par la Banque centrale.
Et tout en signalant que « les meilleures politiques économiques sont celles qui prennent en considération les réalités locales », le gouverneur de la BCT a nuancé ses dires insistant sur « l’importance d’une évaluation continue du FMI afin de rétablir la confiance des pays membres et de tirer des leçons des expériences passées ».
Ennouri a dans cet ordre d’idées rappelé les effets néfastes de certaines mesures d’austérité (que la Tunisie a été contrainte de prendre), lesquels ont souvent entravé la relance économique dans de nombreux pays et ont provoqué des tensions sociales. Il a, à ce titre demandé au FMI d’adopter une approche plus flexible et différente évoquant qu’outre les spécificités précitées, les pays font face à des défis et des dynamiques nouvelles auxquels le monde entier fait face notamment le défi du changement climatique, des évolutions technologiques, des tensions géopolitiques et de l’aggravation des inégalités.
Optimisme…
Dans ce sens, Ennouri a insisté sur la nécessité de prendre en compte les dimensions sociales, économiques et environnementales dans les programmes du FMI. Et ce, pour garantir des réformes à même de favoriser une croissance résiliente, inclusive, équitable et durable.
Il est par ailleurs a noter que le gouverneur tunisien a effectué durant ces journées des assemblées différentes rencontres avec des investisseurs financiers internationaux. Ennouri a présenté à ses vis-à-vis l’évolution de la situation économique et financière en Tunisie, soulignant les avantages comparatifs du pays afin de les encourager à « croire en l’avenir de la Tunisie ».
Il a tenu à expliquer que l’économie tunisienne a fait preuve de résilience. Et ce, grâce à la réussite de la politique du pays à maintenir ses équilibres extérieurs, à stabiliser le taux de change du dinar tunisien et à réduire autant que faire se peut l’inflation. Et ce, ajoute-t-il, tout en continuant à honorer ses engagements intérieurs et extérieurs. Un équilibre qui s’est fait en dépit des défis, grâce aux mesures prises par le gouvernement et grâce à la politique rigoureuse de la Banque centrale en matière de gestion monétaire.
Abir CHEMLI