A l’occasion du 79ème anniversaire de la naissance de l’organisation des Nations Unis (ONU) célébré chaque 24 octobre, le ministère des Affaires étrangères, de la migration et des Tunisiens à l’étranger (MAE) a organisé dans l’après-midi d’hier, jeudi 24 octobre 2024, au siège de l’Académie diplomatique internationale en Tunisie, une Journée symbolique des Nations Unis baptisé sous l’enseigne « les jeunes et le pacte pour l’avenir ». Et ce, en collaboration avec le coordinateur résident en Tunisie de l’ONU, Arnaud Peral et avec la présence de plusieurs figures emblématiques de diplomates accrédités en Tunisie ainsi que des jeunes représentants des agences onusiennes en Tunisie.
C’est le secrétaire d’Etat auprès du ministre des Affaires étrangères qui a donné le coup d’envoi de l’évènement souhaitant, au nom du ministre des Affaires étrangères et au nom de tout le département diplomatique tunisien la bienvenue aux invités. La parole a été donnée à Arnaud Peral qui, une fois au pupitre, a d’emblée appelé la présence à observer une minute de silence à la mémoire de toutes les victimes des guerres déclenchées à Palestine, au Liban, au Soudan et en Ukraine. Cela dit, pour Peral, cette journée est une opportunité précieuse pour réfléchir à la manière de trouver, ensemble, des solutions aux défis complexes auxquels le monde multipolaire et fragmenté est confronté. « Avant de parler d’espoirs, nous devons d’abord reconnaître nos échecs dont certains ont pris la forme d’un conflit atroce qui ont détruit et continuent de détruire des vies humaines irremplaçables ».
L’intervenant a ensuite repris le mot du secrétaire général des Nations Unis qui rappelle que « l’ONU a été créée par le monde et pour le monde, incarne ses espoirs et incarne la notion de la solidarité internationale ». Et c’est en ces phrases que le représentant onusien a poursuivi : « « Aujourd’hui et plus que jamais, notre monde a besoin de coopération et d’engagement commun pour répondre aux enjeux que traverse une société, ici en Tunisie, comme ailleurs. Nous vivons une époque marquée par des défis inédits où des conflits persistent, où la pauvreté demeure entière, où l’immigration augmente, où les changements climatiques menacent nos communautés et les nouvelles technologies, comme l’intelligence artificielle, transforment radicalement notre manière de vivre ». Face à une telle complexité, ajoute Peral, il est facile de se sentir submergé au milieu des images insoutenables, des discours de haine et du désespoir. Mais, nuance-t-il, l’espoir ne meurt jamais. « L’espoir est toujours porté par la jeunesse qui proteste haut et fort contre tous ces désaccords et réclame une action complète de paix. En septembre dernier, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté des accords historiques : le pacte pour l’avenir ! Il s’agit d’un pacte numérique mondial et d’une déclaration sur les générations futures qui visent en particulier d’accorder aux jeunes une place à la table des décisions. Ces accords ouvrent une nouvelle voie pour que notre système unilatéral évolue et rajeunisse afin de répondre plus efficacement aux réalités contemporaines. Et je dois dire que le renforcement de multilatéralisme n’est pas un choix, c’est désormais une nécessité », exprime-t-il. Et d’ajouter qu’en Tunisie, le système des Nations Unies travaille étroitement avec tous ses partenaires pour promouvoir ces valeurs en soutenant le développement durable, la bonne gouvernance et les droits humains.
Une responsabilité commune
Cependant, note-t-il, « nous devons faire plus. La paix et la prospérité partagée, nécessitent une action collective et concertée. Il est impératif de réunir nos efforts pour réduire les inégalités, protéger notre planète et garantir que personne ne soit laissé pour compte en particulier les femmes, les jeunes, les migrants, les personnes porteuses d’handicap et les plus vulnérables. Ici, l’ONU et à travers ses agents, met en place des programmes qui incitent à accompagner les autorités tunisiennes, la société civile et en particulier la jeunesse, pour relever ces défis et atteindre les objectifs du développement durable. Nous croyons fermement que la coopération internationale et le dialogue ouvert sont les axes nécessaires pour y parvenir. Ici, en Tunisie, il existe une jeunesse extraordinaire qui créé la différence, et avec l’aide de l’ONU et de ses partenaires, ils mettent en œuvre des projets qui sont les clés du changement tant ils sont innovateurs et leaders. Nous sommes tous responsables et coresponsables du monde que nous léguons à nos enfants. Dans notre monde en proie à la tourmente, l’espoir ne suffit pas, l’espoir passe par des mesures fermes et des solutions multilatérales en faveur de la paix, d’une prospérité partagée et d’une planète fleurissante. L’espoir passe par une coopération entre tous les pays. L’espoir passe par l’ONU », conclut Peral.
« En Tunisie, il y’a un programme onusien très complet, 27 agences qui font des programmes de travail sur la Tunisie et plus de 100 millions de dollars qui sont engagés sur différents projets sur la Tunisie en permanence. On a créé un fonds spécial pour la jeunesse et l’emploi. Plusieurs pays ont contribué à enrichir ce fonds et on espère qu’il y aura encore plus de disponibilité financière pour soutenir les rêves »
Les jeunes, partenaires à part entière
En guise de démonstration des projets des jeunes évoqués par le coordinateur résident onusien en Tunisie, c’est Badrel Boudour Zahmoul, cheffe du bureau consultatif de la jeunesse auprès du ministère de la Jeunesse et des Sport et l’une des bénéficiaires du programme onusien de développement, qui s’est mise au podium pour exprimer que les jeunes ont soif de justice et de paix. L’intervenante a exprimé la frustration des jeunes à ne pas avoir une marge d’action ou de manœuvre qui leur permet d’opérer un changement ou de faire évoluer les choses.
« Nombreux sont ceux qui se sentent marginalisés alors qu’ils souhaitent participer et activement. Nous œuvrons pour que ces jeunes accèdent à des postes de leadership et pour qu’il y ait des conditions favorables pour que la jeunesse soit incluse pas seulement en donnant des idées mais de manière active. Nous savons que l’avenir ne sera pas facile et simple à construire mais nous pouvons accomplir bien des choses ensemble. Mais nous, les jeunes, avons besoin de soutien. Nous avons besoin de l’aide des autres pays et des Nations Unies pour qu’on puisse devenir des acteurs clés dans le pacte pour l’avenir. Il est temps d’anticiper, de créer, de construire une assise et des structures institutionnelles qui engagent les jeunes en tant qu’acteurs. Des structures qui puissent garantir que la jeunesse fasse partie du processus. Des initiatives locales, régionales et internationales doivent intégrer la participation des jeunes en tant que piliers stratégiques. Qu’il s’agit de la lutte contre l’inégalité, de la bonne gouvernance ou de l’innovation technologique, les jeunes ont des perspectives à partager, des solutions innovantes à proposer et une énergie inépuisable à offrir. D’ailleurs si je suis là aujourd’hui à plaider la cause des jeunes, c’est grâce à une initiative du ministère tunisien de la jeunesse et des sports qui a mis en place une action jeune, qui est l’un des axes de la stratégie nationale de la jeunesse aux horizons de 2035 et qui appelle à l’intégration des jeunes dans le processus de réflexion, de la prise des décisions et de l’action. Et ce, à tous les niveaux et dans tous les secteurs. Cette stratégie traduit la volonté de l’Etat et sa croyance que les jeunes doivent participer parce que l’avenir, on le décide tous ensemble, jeunes et moins jeunes. »
Une jeunesse tunisienne en or !
En marge de la conférence, différents stands exposés par les jeunes agents des Nations Unis en Tunisie ont expliqué leurs idées à la présence. Multiples jeunes Tunisiens tout aussi talentueux que porteurs de projets ont justement réussi à concrétiser leurs idées grâce au soutien de l’ONU. C’est notamment le cas pour TIMUN, une association modèle tunisienne soutenue par les Nations Unies avec le partenariat du HCDH et dont l’objectif est de former les jeunes sur les principes des droits humains. » Nous veillons à choisir des jeunes ayant entre 15 et 24 ans pour les inviter à jouer une simulation. Ils font semblant d’appartenir à un Comité diplomatique et sont à chaque fois redevables de tester leurs connaissances en matière de maîtrise des droits internationaux, des droits universels, des droits de l’Homme et de leur degré de tolérance. Et ce, via des jeux de rôles. Nous leur assurons également des cours gratuits et œuvrons principalement au niveau des régions de l’intérieur », nous a révélé Abir Ben Abdallah, juriste et chargée des affaires académiques nationale au sein de l’association précitée.
Au stand de NUBADER, ONY-femme, nous avons rencontré Safa Nouri, enseignante d’éducation physique et membre de l’association qui nous a révélé que le projet ONY-femme financé par l’ONU, vise d’introduire le droit au sport pour tous. L’équipe a œuvré dans différentes régions de l’intérieur dont Kébili, Zaghouan, le Kéf pour apprendre aux jeunes filles leurs droits au sport tout autant que les garçons. « Nous avons vu des filles toucher pour la première fois de leur vie à un ballon de football. Elles ignoraient jusque-là qu’elles avaient le droit d’y jouer, de s’entrainer et encore moins de pratiquer du sport qui sont considérés comme des spécificités masculines’’ car on leur a inculqué que la place des filles n’est jamais dans un stade d’entrainement ou dans une salle de sport mais dans la cuisine… Nous veillons alors à instaurer la norme de l’égalité entre les deux sexes, notamment en matière des sports et des jeux. A présent bien des filles commencent à faire des entrainements sportifs grâce à notre encadrement ».
Au stand de l’ONUDC, (Office des Nations Unis contre la drogue et le crime), nous avons rencontré un groupe de jeunes qui ont mis en place un projet pilote en Tunisie, le premier du genre dans toute la région de l’Afrique du Nord. Il s’agit d’un Office qui travaille sur la thérapie cognitive et comportementale chez les détenus, une approche de prévention psychologique qui vise de prévenir tout comportement violent chez les détenus, de les préparer à leur réintégration dans la société après leur sortie de prison pour qu’ils ne soient pas proie à la récidive, à la violence, à la drogue, à l’addiction et pour ne plus être acteurs de crime. C’est ce que nous a expliqué Yassine Rebiï « Je suis résident en médecine psychiatrique. L’idée est née de mon stage à l’hôpital Razi où nous supervisons parfois des détenus ou des gens à peine sortis de prisons et qui sont très souvent sujets à des tentatives de suicide, à des addictions, à des actes de violence, à des difficultés de réhabilitation et de réintégration et à des récidives notamment criminelles. Tout ceci peut être évité moyennant un bon suivi psychologique et une approche de prévention psychologique et une thérapie cognitive et comportementale. L’ONU a adhéré à l’idée et le projet est désormais en marche ».
Quelle joie que de voir la jeunesse tunisienne plaider des causes aussi grandes et aussi nobles. Nous avons des trésors tunisiens en herbe à qui il ne manque que les moyens, l’opportunité et un véritable soutien pour qu’il créé un avenir bien meilleur basé sur de majestueuses valeurs, bravo jeunes gens !
Abir CHEMLI