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« L’Espion qui venait du froid » le rendit célèbre dans le monde entier. Après une carrière de diplomate, brièvement espion lui-même, John le Carré s’est consacré à l’écriture et laisse derrière lui plus d’une vingtaine de romans.
Le maître britannique du roman d’espionnage John le Carré, qui a vendu plus de 60 millions de livres dans le monde, est décédé à l’âge de 89 ans d’une pneumonie.
« C’est avec une grande tristesse que je dois annoncer que David Cornwell, connu dans le monde sous le nom de John le Carré, est décédé après une courte maladie [non liée à la COVID-19] en Cornouailles samedi soir, le 12 décembre 2020. Il avait 89 ans », a déclaré son agent, Jonny Geller, p.-d.g. du groupe Curtis Brown, dans un communiqué publié sur le site Internet de cette agence artistique basée à Londres. L’écrivain laisse une femme et quatre fils.
« C’est avec une grande tristesse que nous devons confirmer que David Cornwell — John le Carré — est décédé d’une pneumonie samedi soir après une courte bataille contre la maladie », a confirmé sa famille dans un message relayé par son agent.
John le Carré a écrit vingt-cinq romans et un volume de mémoires, Le tunnel aux pigeons (2016).
Il s’était inspiré de sa carrière d’agent secret, ruinée par l’agent double britannique Kim Philby, qui avait révélé sa couverture et celle de nombre de ses compatriotes au KGB, le poussant à démissionner du MI6.
« Nous avons perdu une grande figure de la littérature anglaise », a déclaré son agent, louant son « grand esprit », sa « gentillesse », son « humour » et son « intelligence ».
Le roi du roman d’horreur, l’Américain Stephen King, a déploré sur Twitter la mort d’un « géant littéraire » et « esprit humanitaire ». L’écrivain et historien britannique Simon Sebag Montefiore s’est dit sur le même réseau social « bouleversé » par la mort d’un « titan de la littérature anglaise ».
*« Brillant et populaire »
John le Carré était devenu célèbre dans le monde entier après la parution de son troisième roman, L’espion qui venait du froid (1964), qu’il écrivit à 30 ans, « mangé par l’ennui » que ses activités de diplomate à l’ambassade britannique de Bonn en Allemagne lui procuraient.
Le manuscrit avait été autorisé par les services secrets, qui avaient conclu qu’il s’agissait d’une œuvre de « pure fiction du début à la fin », avait écrit John le Carré en 2013 dans le quotidien The Guardian. Mais la presse avait eu une tout autre opinion, racontait-il, décidant que ce récit n’était « pas simplement authentique, mais était une sorte de message révélateur venu de l’Autre Côté ».
Le roman, vendu à plus de 20 millions d’exemplaires dans le monde, raconte l’histoire d’Alec Leamas, un agent double britannique, passé en Allemagne de l’Est. Son adaptation au grand écran, avec Richard Burton dans le rôle-titre, a marqué le début d’une longue collaboration avec le cinéma et la télévision.
Le romancier Robert Harris a décrit John le Carré comme « l’un de ces auteurs qui non seulement étaient des écrivains brillants, mais qui ont aussi pénétré la culture populaire — et c’est très rare ».
L’espion qui venait du froid est un « chef-d’œuvre », a déclaré M. Harris à la chaîne de télévision SkyNews. « C’est une histoire incroyablement captivante et très profonde, et elle a transformé l’écriture du roman d’espionnage. C’était un brillant portrait psychologique de l’espionnage, de la trahison et du déclin du pouvoir britannique », a-t-il ajouté.
De son côté, Simon Sebag Montefiore n’avait pas manqué de souligner que les « chefs-d’œuvre » de John le Carré, avant d’être des thrillers d’espionnage, étaient de véritables « études de traîtrise, d’honneur, de caractère, d’idéalisme et de pouvoir ».
(AFP)