Pourrait-on se gouverner par ses propres lois et moyens ? Ou, autrement dit, pourrait-on posséder une autonomie politique, économique et culturelle qui sauvegarde notre souveraineté alors que le pays est contraint d’ouvrir ses marchés à une concurrence mondiale inéquitable, de contracter de lourdes dettes ou de s’engager dans des accords de partenariat avec de puissantes communautés économiques régionales ? Si on refuse l’intégration dans l’économie globalisée et la civilisation universelle, si on résiste à la mondialisation sous le prétexte de préserver notre autonomie de décision, alors la menace d’isolement et de marginalisation pèsera lourdement sur le pays.
Dans ce contexte, il est très difficile d’éviter le piège de la surenchère et d’accuser des régimes politiques pris entre le marteau et l’enclume : d’un côté, ils font face aux revendications sociales et sont dans l’obligation d’agir pour préserver leur souveraineté nationale et, de l’autre, ils sont sommés d’obéir aux injonctions des institutions et des banques internationales et d’honorer leurs engagements envers les grandes puissances.
Il est certainement utile sur le plan théorique du moins, et pour rendre possibles des comparaisons que nos experts traitent de la genèse du concept de la «souveraineté nationale» et examinent sur quelle base ce concept s’est établi dans les conventions internationales, les lois universelles et les constitutions de divers pays. Il serait également utile de mettre en exergue les transformations subies par ce concept au long des différentes époques de l’histoire de l’humanité, comme il est primordial d’écouter nos compétences nationales exposer de façon exhaustive leurs expériences et rappeler les instruments et les mécanismes à mettre en place pour asseoir la souveraineté nationale sur des bases solides. Seulement, le problème dépasse ce niveau d’analyse en dépit de l’utilité de ces rappels car il s’agit en l’occurrence d’examiner avec lucidité les transformations qui impliquent la planète entière et menacent la souveraineté des Etats. Ce qui s’est passé sur le terrain durant les trois dernières décennies a transcendé toutes les conventions, règlements, lois et principes et consacré un nouveau type de relations entre les pays, fondé sur la domination du plus fort. Le monde nouveau n’est pas une mer d’huile. Il est un océan tumultueux où seules les nations fortes pourront naviguer en paix. Il faudrait par conséquent choisir d’être en prise directe avec le monde actuel, adopter l’ancrage dans l’économie mondiale en prenant le risque d’y laisser des plumes.
Il faut reconnaître que dans le but de préserver la souveraineté et d’atténuer les effets pervers des influences extérieures, les solutions ne sont pas évidentes. Tout cela nous conduit à compter sur une solidarité nationale sans faille, améliorer notre compétitivité et produire plus et mieux pour permettre au pays de retrouver une santé économique. Notre effort doit aussi tendre vers l’autosuffisance dans la production agricole, industrielle et des matières premières. Un effort doit également être consenti en matière d’épargne nationale et de consolidation de l’investissement intérieur, autant d’atouts précieux qui permettent de réussir une insertion harmonieuse dans l’économie mondiale globalisée et de s’y adapter.
Si les réponses semblent aussi claires politiquement et économiquement, il devient légitime de poser la question suivante : comment se présentent les défis dans le domaine culturel, domaine particulièrement sensible aux influences ?