Le parcours des combattants

 

 


Au mois de novembre, un hommage a été rendu, à tous les combattants y compris de nombreux tunisiens morts, non pas seulement pour la France, mais surtout pour la défense de la Liberté et de la Démocratie contre le totalitarisme fasciste.

Aujourd’hui, nous invitons nos lecteurs curieux à parcourir, durant un week-end, une partie du champs de bataille, de la Campagne de Tunisie, durant les mois de novembre et décembre 1942.

 

L’expectative

Au mois de novembre 1942, la France coupée en deux est gouvernée par le Maréchal Pétain. Le Général De Gaulle prône la résistance à Londres. Moncef Bey règne sur la « Régence de Tunis », soumise au protectorat. Le nouveau Bey, attentif aux idées nationalistes, sera destitué le 14 mai 1943, au lendemain de la « libération » de Tunis.

Les troupes françaises en Tunisie, soumises aux exigences de l’armistice de 1940, ne comptent que 13.000 hommes dont les régiments tunisiens, décimés pendant la Campagne de France et en cours de reconstitution. Le Général Juin, commande, en Afrique du Nord, 120.000 hommes stationnés en Algérie et au Maroc. L’armée française est très mal équipée en blindés et en avions.

Le 8 novembre 1942, les troupes anglo-américaines débarquent au Maroc et en Algérie où les soldats français opposent une résistance énergique durant quelques jours. Ils hésitent entre la « légalité » incarnée par Pétain qui commande de « résister » et le « patriotisme » qui exige de libérer la France avec les Alliés.

En Tunisie, les troupes françaises sont incapables de résister aux Allemands qui débarquent aussitôt à Tunis, Bizerte et Sfax.

Aussi, dès la sortie de Tunis, nous nous souviendrons des négociations et des tergiversations du détachement Le Coutleux qui résiste à El Aouina.

La route de Bizerte rappellera les hésitations de l’Amiral Derrien ce qui permet aux Allemands de capturer des milliers de soldats français.

Les routes nationales N° 5 menant à Medjez El Bab et n° 50 allant à Tébourba verront le Général Barré essayer de barrer (ça ne s’invente pas !) la route aux Allemands. Jusqu’au 14 novembre, les troupes françaises, trop faibles pour engager le combat, se replient « pacifiquement », en essayant d’occuper les meilleurs points de résistance, vers Borj El Amri et Medjez El Bab.

On peut aussi, par une belle petite route forestière, toute en lacets, longeant les contreforts du Jebel Rihane, à partir du bourg de Goubellat, rejoindre Bou Arada qui garde un « couloir «  entre le Jebel Rihane et le Jebel Mansour.

On peut aussi, nous l’avons déjà écrit, aller vers Tébourba, escalader le Jebel Ansarine qui domine la route menant à Medjez El Bab. Elle sinue dans la vallée de la Medjerda. Elle a mené les combattants jusqu’au village de Grich El Oued / Tissidium, connu pour avoir abrité le consul Metellus qui y avait convoqué Jugurtha à venir se rendre !! « Le terrain conserve, à travers les âges, une valeur intrinsèque : on ne se bat pas n’importe où », a écrit le Maréchal Juin.

Chemin faisant du Jebel Ansarine, à Medjez El Bab et jusqu’au Jebel Mansour, les troupes françaises se replient sur les « remparts de Carthage ». De Zaghouan à Bizerte, les collines dessinent une grande courbe autour de la « cuvette » de Tunis, indéfendable pour l’armée française, Jugurtha et Hannibal contre une armée romaine ou allemande mieux équipée.

Quels itinéraires allez-vous choisir ?

 

Les premiers combats

Vers Mateur, Teskraïa et Sejnane : région où les collines boisées des Mogod succèdent aux plaines céréalières de Mateur. Les troupes anglaises débarquées à Annaba / El Kalaa résisteront le long de la route menant à Tabarka essayant vainement de conquérir deux collines appelées « la verte » et « la blanche » en raison de la végétation qui couvre l’une et le calcaire formant l’autre. Un petit monument commémoratif rappelle cette dure bataille à Sidi Nsir, près de Joumine. On raconte qu’un soir, après des attaques aussi vaines que meurtrières, les Anglais tentent un dernier assaut avec quelques hommes et un officier, armé d’un pistolet ! Il sera retrouvé dans un hôpital de Naples où les Allemands, émus par son héroïsme, l’avaient fait soigner.

On peut choisir d’aller vers Jedaïda, Tébourba, puis longer la Medjerda au pied des Jebel Ansarine et Baouela encore couverts d’éclats d’obus tant les combats y ont été longs et âpres. On raconte que les soldats anglais qui y résistaient ont finalement reçu l’ordre de se replier vers Medjez qui était déjà tombé aux mains des Allemands. Les combattants anglais, arrivant à Medjez El Bab, pour ne pas avoir une allure de vaincus, se mettent en rangs et entrent dans la ville en chantant ! Les Allemands, stupéfaits par leur courage, se rangent sur les trottoirs, leurs présentent les armes et les laissent passer : on ne capture pas des héros ! Un peu plus à l’ouest du bourg, l’humour anglais se révèlera encore dans le nom donné à une colline sur laquelle les Allemands résistent longuement : « Long Phill Stop » !

Finalement, les Allemands seront arrêtés, au pied du Jebel Munchar dans la plaine de Béja.

 

La guerre en montagne

Allez-vous choisir de partir vers El Fahs et de suivre une magnifique route bordée par des monts boisés ? Elle passe à proximité immédiate du bourg berbéro-romain appelé « Oum El Abouèb » : « la mère aux portes ». Dans l’antiquité, cette cité s’opposait aux remontées des berbères hostiles. La voie romaine conduit à la citadelle byzantine de Ksar Lemsa : « on ne se bat pas n’importe où ! ». Dans cette région, les monts Bargou, Serj, Oueslat ont été de tous les combats depuis la nuit des temps.

Rappelons seulement, l’insurrection des Oueslati, leur défaite, l’interdiction qui leur a été faite de retourner dans leur montagne et leur dispersion à travers le pays. Vers Haffouz / Pichon, nous nous souviendrons des combats héroïques menés ici par les « troupes coloniales » dont les héros sont inhumés au « Cimetière National français » de Haffouz. Nous penserons aussi aux résistants tunisiens combattant à 1 contre 10, en novembre 1954, contre les troupes coloniales appuyées par l’artillerie et l’aviation, dans le Jebel Bargou.

Nous aurons une véritable émotion en nous rappelant qu’au printemps 1943, dans la plaine, au tombant de ces monts, vers Kairouan, les Spahis ont chargé à cheval, héroïquement et victorieusement, sabre au clair contre les mitrailleuses ennemies, écrivant une page de gloire de plus, s’il en était besoin, à la longue histoire des combattants maghrébins, depuis la renommée de la cavalerie numide, jusqu’aux combats du Belvédère en Italie, et à la résistance héroïque des tirailleurs tunisiens, durant 7 jours de tempête de neige, à plus de 1000 mètres d’altitude, sur le Hohneck dans les Vosges ! Elle a cessé faute de munitions ! C’est aussi l’adjudant Hamed El Abed qui a été un des premiers soldats de l’armée française à avoir pénétré en Allemagne !

Essayez d’imaginer, en ce début d’hiver, ce qu’à pu être la vie de ces combattants, vivant dans des trous boueux, sous les pluies glaciales, en montagne, sans feu, sous peine d’être tirés par l’ennemi, ravitaillés, quand c’était possible, durant de courtes trêves, par des files de mulets, surnommées, avec humour, par les Anglais : La « Royal Brel Force » !

Nous vous garantissons des promenades superbes tout au long de ces différents itinéraires et la découverte de paysages, à notre avis, méconnus « en dehors des sentiers battus » : par exemple : Foum El Afrit, « la bouche du démon », encore « dotée » d’un superbe pont romain, entre les Jebel Serj et Ballouta, le village et les forêts de la Kesra, le Jebel Oueslat et ses grottes préhistoriques ornées de peintures rupestres magnifiques, les vestiges d’Aggar, une bourgade romaine …

 

Alix Martin

 

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