C’est la première fois qu’un président serbe se rende en Tunisie, bien que les relations diplomatiques entre les deux pays datent depuis plus de 55 ans. L’objectif étant actuellement de mieux les renforcer et d’élargir le partenariat bilatéral à de nouveaux domaines d’activité, surtout que la Tunisie nouvelle offre plus d‘opportunités d’investissement et de collaboration.
Son excellence a bien accepté de nous donner cette interview.
Pourquoi cette visite maintenant du Président serbe en Tunisie ?
L’arrivée dans un pays ami telle la Tunisie sur invitation du Président tunisien, est une suite naturelle de mon activité de politique étrangère parce que je souhaite renouveler toutes les anciennes amitiés de mon pays qui, pendant des décennies, ont été injustement mises à l’écart. La Serbie de tous les pays issus du démantèlement de l’ex-Yougoslavie a entièrement hérité et adopté la politique de l’ancienne Yougoslavie, vis-à-vis des pays du Mouvement des non-alignés, dont la Tunisie fut membre à part entière. J’ai été également à la tête de la délégation serbe au sommet jubilaire de l’Union africaine qui a eu lieu le 25 mai 2013, à l’occasion du 50e anniversaire de la fondation de l’Organisation de l’Unité africaine, ce qui traduit l’importance que revêt pour moi la culture des relations d’amitié avec nos amis africains.
Je suis persuadé que la visite représentera une nouvelle page dans les relations bilatérales à tout point de vue – visant à établir un dialogue politique plus régulier et de nouer une nouvelle coopération dans le domaine de l’économie, où existe un énorme potentiel servant l’intérêt commun.
Quels sont les moyens pour renforcer les relations bilatérales (plus de 50 ans depuis l’établissement des relations diplomatiques) ?
L’un des objectifs de ma visite est de créer des conditions favorables à la promotion des relations économiques qui ne sont pas au même niveau des bonnes relations politiques. Nous sommes prêts à promouvoir la coopération dans le domaine de l’agriculture, de la pharmacie, de la construction, de la coopération militaire et économique. Il y a un intérêt à réaliser un partenariat, en implantant des sociétés mixtes et en s’ouvrant aux marchés tiers. Nous pouvons également explorer les domaines où jusqu’ici il n’y a pas eu de coopération, telles que les ressources naturelles, les mines, l’énergie, l’aménagement du territoire etc. Nous souhaitons la poursuite de la coopération et le développement des affaires de la société Hidrotehnika, spécialisée dans la construction de tous les types d’installation d’énergie et hydrauliques. Cette société est implantée, depuis plus de quatre décennies dans cette région et elle a réalisé 10 installations capitales (barrages, pipelines, tunnels hydrotechniques), dont la valeur est estimée à environ un milliard de dollars. Il est très important de voir le plus tôt possible, se réunir la commission mixte et le forum de business, en tant que cadres adéquats pour la relance de la coopération économique bilatérale, réalisée jusque là à une échelle très modeste.
Dans le programme de votre visite, la signature de plusieurs accords. Quels sont les centres d’intérêt pour la coopération entre les deux pays actuellement ?
Il a été prévu de signer trois accords lors de cette visite (coopération économique et commerciale, transport routier et coopération dans le domaine de la culture, éducation…).
Il existe de nombreuses possibilités pour renforcer les relations économiques entre les deux pays, dans les domaines de l’agriculture, des complexes du traitement agraire, de la construction, de la pharmacie, de l’industrie chimique, du tourisme, pétrochimie, de l’industrie pétrolière, de la coopération militaire, en plus de diverses formes de coopération éducationnelle, scientifique et technique.
En 2010, les deux pays ont signé un accord de coopération pour l’échange d’expériences et de compétence dans le domaine de la recherche scientifique et techniques agricoles. Y a-t-il eu des résultats tangibles de cet accord ?
L’agriculture est potentiellement le domaine de coopération le plus prometteur, puisqu’il a un grand potentiel dans le secteur de l’agroalimentaire. En Tunisie, la demande en blé, orge, poulet et viande bovine est en hausse constante (32%), tandis que la Serbie a de grands potentiels dans le secteur agraire, ce qui rend naturellement ce domaine prioritaire. Ce domaine également est réglementé car entre les deux gouvernements, deux accords ont été signés en Tunisie le 16 juin 2010 :
L’accord sur la coopération scientifique technique dans le domaine de l’agriculture ouvre les possibilités d’échange d’expériences, de transfert du savoir-faire et de technologies, de recherche scientifique dans le domaine de l’agriculture, de la promotion de l’échange des marchandises agro-alimentaires, ainsi que la possibilité de définir les termes de la poursuite de la coopération selon les nécessités des États signataires.
L’accord sur la coopération dans le domaine vétérinaire, définit le cadre juridique pour la coopération des autorités vétérinaires compétentes des deux pays, des instituts scientifiques dans ce domaine et des opérateurs économiques, visant à permettre un meilleur placement des produits d’origine animalière qui font défaut sur le marché tunisien.
En mars 2013, plusieurs Tunisiens ont été refoulés du sol serbe, alors que votre pays n’exige pas de visa d’entrée normalement et cela a créé un incident dans les relations bilatérales. Pourquoi l’État serbe procède-t-il désormais à un contrôle systématique des Tunisiens qui arrivent ?
Le contrôle a été renforcé par nos autorités frontalières sur l’entrée des étrangers. Cela vise à empêcher l’immigration illégale, via le territoire serbe, vers les pays de l’UE. Nous ne refoulons pas systématiquement les ressortissants tunisiens.
Le Protocole sur la coopération dans le domaine du tourisme a été signé en 2006 et représente une bonne base pour réaliser les programmes concrets de coopération, notamment dans la partie concernant les potentiels touristiques serbes. Après la Grèce et la Turquie, la Tunisie représente la destination de prédilection pour nos citoyens. Les développements positifs récents dans votre pays, tout comme la stabilisation des conditions sécuritaires inciteront un échange plus riche dans le domaine du tourisme et une arrivée plus massive des touristes serbes. Parallèlement, la coopération dans le secteur touristique peut englober aussi l’échange d’expériences, de savoir-faire, de normes en gastronomie et en hôtellerie, et de produits touristiques. La présente visite est l’occasion de faire savoir à la partie tunisienne les potentiels d’investissements dans ce secteur.
Entretien conduit par Hanène Zbiss