Le scandale de trop !

L’affaire des stents périmés, qui a éclaté au grand jour ces derniers temps et animé le débat public, a été un révélateur du délabrement avancé que connait la société tunisienne dans tous les secteurs d’activités. Cette lente et inexorable descente aux abysses de l’immoral et de l’illégal ne concerne malheureusement plus un secteur particulier comme le système de santé, un secteur qui a été toujours un fleuron et une marque de fabrique de la bonne image dont jouit la Tunisie sur le plan international, mais a tendance à se propager dans toutes les sphères.
Elle témoigne, d’une société en panne d’idéal, en perte de valeurs et de référentiels, d’une société où seul le gain compte et où l’impunité et la faiblesse de l’Etat sont légion. Si depuis quelques années, on n’a eu de cesse de tirer la sonnette d’alarme sur la généralisation de la corruption, qui n’épargne presque aucun corps de métier, y compris ceux qui symbolisent le plus l’Etat de droit, le scandale des stents périmés qui remonte à plus de deux ans, a suscité un grand choc émotionnel chez les citoyens, puisqu’il touche ce que le Tunisien à de plus précieux, à savoir sa santé. Un secteur noble, qui a toujours valu à la Tunisie une notoriété au plan régional et même international, nonobstant les dysfonctionnements dont il souffre en termes d’insuffisances des infrastructures, de manque médecins spécialistes dans les régions intérieures, de la réapparition de maladies infectieuses qu’on croyait définitivement rayées de la carte nationale. Un secteur  qui se trouve aujourd’hui éclaboussé par des pratiques qui touchent l’esprit et la lettre de la noble mission qui lui est impartie et dont les acteurs sont en plein malström.
Au-delà des condamnations, des mesures disciplinaires décidées et des poursuites judiciaires engagées, cette affaire, d’une grande gravité, a montré que le ver est dans le fruit et que par la conjugaison de plusieurs facteurs, il y a eu manquement flagrant à l’éthique professionnelle par ceux-là mêmes qui ont fait le serment d’Hippocrate.
Une carence qui porte gravement préjudice à une profession, à l’image du pays, au rôle dévolu aux structures de santé privées et publiques et à la confiance acquise au fil des ans par le système de santé en Tunisie.
Ce qui dérange le plus, c’est le manque de sursaut d’orgueil de la profession qui, au lieu de dénoncer ces abus, de montrer qu’il s’agit de cas isolés et de réaffirmer sa résolution à éviter que ce secteur névralgique et sensible ne dérive dans l’approximatif et la piste glissante du gain à tout va, a crié vite à la manipulation, au complot.
Pourtant, les faits sont tenaces, les manquements sont flagrants et les abus ne souffrent d’aucune ambiguïté. Il aurait été loisible de tirer les bonnes conclusions, de faire la lumière, toute la lumière sur une affaire qui touche le cœur même de la santé du citoyen et de mettre le doigt sur les dysfonctionnements qui sont à l’origine de ce scandale sans précédent dans les annales du système de santé national.
A l’évidence, se cacher derrière des considérations corporatistes serait suicidaire dans le cas d’espèce. Faire preuve de courage et de sens de responsabilité ne peut que barrer la route devant ceux qui essayent de porter atteinte à notre système de santé avec ses deux composantes et à instrumentaliser cette affaire pour régler des comptes politiques contre des adversaires qui ne se sont pas pliés parfois au diktat que certains syndicats ont voulu leur imposer.
En assumant pleinement leurs responsabilités, en reconnaissant les torts et en œuvrant sereinement et sincèrement pour assainir notre système de santé, faire prévaloir les règles de bonne gouvernance et renforcer son efficacité, toutes les parties concernées feront que le secteur gagnera en échange. Il gagnera surtout la confiance des Tunisiens et de tous ceux qui recourent dans un moment de détresse à ces structures pour recevoir des prestations censées être de qualité et assurées dans un cadre de transparence.
C’est par ce truchement qu’il sera possible de rendre à ce secteur son honneur perdu et sa notoriété entachée.

 

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